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Propositions de loi

PL n° 554 - visant à aménager la législation destinée à lutter contre le tabagisme

EXPOSE DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
La consommation de tabac provoque, chaque année, 66 000 décès et le tabagisme passif 5 000 morts.
La nécessité d’agir constitue donc un enjeu majeur de santé publique.
La France s’est dotée d’une législation en la matière tout particulièrement depuis 1991 avec la loi dite « loi Evin », relative à la lutte contre le tabagisme et l’alcoolisme.
Elle a été accompagnée et complétée, depuis cette date, de multiples dispositions.
Ainsi ont été menées des campagnes d’information et de prévention. La publicité en faveur du tabac a été interdite. Les paquets de cigarettes comportent désormais des avertissements aux fumeurs sur les dangers qu’ils courent. La vente du tabac aux mineurs a été réglementée. Des zones non fumeurs ont été imposées dans les restaurants. De nombreuses et régulières augmentations des prix et des taxes sont intervenues, soit une hausse de 40 % depuis 2003.
Ces différentes mesures ont produit d’incontestables effets entraînant la diminution du nombre des fumeurs. Ainsi 1,4 million de français ont arrêté de fumer en trois ans et nous avons enregistré, entre 2002 et 2006, une diminution de 30 % de la consommation de cigarettes.
Le décret n° 2006-1386 du 16 novembre 2006 vise à prendre de nouvelles initiatives et à interdire de fumer dans les lieux publics.
Depuis le 1er février 2007, cette interdiction concerne tous les lieux fermés et couverts accueillant du public ou constituant des lieux de travail, les établissements de santé, l’ensemble des transports en commun et toutes les enceintes, y compris les endroits ouverts, des écoles, collèges et lycées publics ou privés, ainsi que des établissements destinés à l’accueil, à la formation ou à l’hébergement des mineurs.
À partir du 1er janvier 2008, ces mesures concerneront également les débits de boissons, hôtels, restaurants, débits de tabac, casinos, cercles de jeux et discothèques, qui devront aménager des emplacements fumeurs équipés s’ils souhaitent accueillir des consommateurs de tabac.
Avec cette deuxième vague d’interdictions il semble que nous touchions aux limites d’une politique justifiée de prévention.
Des mesures restrictives en la matière n’ont d’efficacité que si elles sont comprises et partagées, si elles ont valeur pédagogique.
Interdire le tabac sur les lieux de travail, dans les entreprises, les établissements scolaires ou de santé est désormais une disposition en vigueur et admise par les Français.
Procéder de la même manière dans les lieux de détente et de convivialité, que constituent les débits de tabac et de boissons, les hôtels, les restaurants, en revanche, risque d’être davantage assimilé à une disposition de prohibition que de prévention.
Ces établissements sont des lieux précieux de rencontres et d’échanges, où fumeurs et non fumeurs cohabitent dans un respect mutuel. Cette richesse doit être préservée surtout lorsque nous constatons que trop souvent dans notre société l’individualisme tend à se substituer à l’intérêt commun et à la solidarité.
Par ailleurs, des mesures, qui ne sont pas comprises du public, sont le plus souvent inefficaces et contre-productives.
À titre d’exemple, si le nombre de cigarettes vendues officiellement en France a baissé de 21 % depuis fin 2003, le nombre de paquets achetés dans les pays limitrophes où le prix est quatre fois moins élevé, a explosé. Aujourd’hui, 22 % des cigarettes fumées en France proviennent de ces achats transfrontaliers. Au final, la hausse des prix destinée à décourager les fumeurs n’a pas produit l’effet attendu et nous savons, en outre, que la vente clandestine de tabac s’est développée en France.
À quoi faut-il donc s’attendre avec l’interdiction de fumer dans les cafés, hôtels et restaurants ? Pas tant à la baisse du nombre des fumeurs qu’à la fermeture programmée de nombre d’établissements.
Il s’agit souvent de commerces de proximité qui, par leur maillage du territoire, jouent un rôle essentiel de lien social et d’aménagement des espaces en particulier en milieu rural.
Les communes rurales sont déjà durement confrontées à la disparition de leurs commerces et de leurs derniers lieux de convivialité. Le dispositif d’interdiction globale, tel qu’il est prévu, ne pourra qu’accélérer le processus.
Il apparaît, en outre, absurde d’interdire la consommation du tabac dans les établissements qui ont l’autorisation de le commercialiser.
Les débitants de tabac sont en nombre de 30 000. Parmi eux, 15 000 sont des bars-tabac sur les 200 000 établissements qui sont habilités par les services des douanes à revendre du tabac (cafés, hôtels, restaurants, discothèques…).
La première mesure qui semble s’imposer serait d’autoriser à fumer dans ces commerces habilités à vendre ou à revendre du tabac, à l’exclusion des discothèques où les clients séjournent longtemps dans des atmosphères enfumées et sont souvent jeunes.
En second lieu, il serait souhaitable de laisser aux exploitants des bars de moins de 100 m2 la possibilité d’être des lieux fumeurs ou non fumeurs, selon un choix qui devrait être légalement déclaré et reconnu.
Ces dispositions ne sont pas de nature à mettre en cause la lutte contre le tabagisme. Elles visent à instaurer des mesures de limitation des lieux où il est autorisé de fumer, de telle sorte qu’elles soient comprises et partagées par tous.
Elles prennent en compte le fait que la diminution du nombre des fumeurs n’est pas obligatoirement le fait des pays qui interdisent totalement le tabac dans les lieux publics.
Parmi les nations les plus sévères figurent la Grèce qui compte pourtant 42 % de fumeurs, le Royaume-Uni qui en compte 33 % et l’Italie 31 %.
En revanche, l’Allemagne qui n’impose pas d’interdiction compte 31 % de fumeurs, moins que la France avec 33 %, dont la législation établit, pour le moment, une interdiction partielle.
Il convient d’ajouter que si le tabagisme passif doit être combattu, 90 % des victimes le subissent à leur domicile contre 10 % seulement dans les lieux à usage collectif.
Les mesures préconisées ici sont donc de nature à faire face au danger dans sa juste proportion.
Sous le bénéfice de ces observations, Mesdames, Messieurs, il vous est demandé de bien adopter la proposition de loi suivante.

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André
Gerin

Daniel
Paul

Député de Seine-Maritime (8ème circonscription)

Jacques
Desallangre

Député de Aisne (4ème circonscription)
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