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Propositions de loi

PL n° 3370 - Taxer les actifs financiers des entreprises pour augmenter les ressources des collectivités territoriales et renforcer la péréquation

Mesdames, Messieurs,
La suppression de la taxe professionnelle par la loi de finances pour 2010 a créé des incertitudes sur les finances des collectivités territoriales.
Elle tend à réduire leur autonomie financière, voire à la faire disparaître s’agissant des régions.
Les élus ne disposent plus des ressources dynamiques indispensables en provenance des entreprises pour mener des politiques en faveur du bien-être des populations. Ils se trouvent contraints à une alternative simple : rogner sur les services publics ou augmenter les impôts qui pèsent sur les ménages.
Dans tous les cas, les choix à faire sont douloureux. Au fond, c’est la démocratie locale issue de la décentralisation qui est remise en cause.
Il faut bien comprendre que la contribution économique territoriale des entreprises mise en place ne remplace pas la base imposable de la défunte taxe professionnelle. Et la cotisation sur la valeur ajoutée, à l’évolution incertaine, risque vite de souffrir des effets d’éviction que les entreprises ne manqueront d’activer pour alléger leur facture fiscale (c’est ce que l’on appelle pudiquement l’optimisation fiscale !).
De plus, aucune réponse n’est apportée à la question essentielle de la péréquation entre collectivités riches et pauvres, faute de la création d’un nouvel outil approprié. La cotisation sur la valeur ajoutée n’est qu’une compensation, et non une recette nouvelle, et dans la mesure où les sommes en jeu s’avèrent encore plus réduites qu’avant, on comprend aisément que celles destinées à la réduction des inégalités entre collectivités sont d’autant plus faibles !
Une vraie réforme des finances publiques locales ne peut se résumer à remplacer la taxe professionnelle, laquelle, bien qu’imparfaite, procurait néanmoins des recettes relativement dynamiques, par une cotisation foncière à base étroite et par un complément de taxe sur la valeur ajoutée. Le mécanisme actuel revient d’ailleurs à taxer indirectement les salaires, puisque ceux-ci représentent une part essentielle de l’usage de la valeur ajoutée !
De surcroît, la contribution économique territoriale ne prend aucunement en compte la réalité de l’activité économique moderne ni la réalité des choix capitalistes des entreprises.
Nous vivons dans une économie financiarisée à outrance devenue invivable pour la plupart de nos concitoyens. Il est parfaitement légitime de chercher à décourager l’accumulation du capital financier, y compris à visée spéculative, dans la mesure où cette accumulation trouve son origine dans le détournement systématique des richesses créées par les seuls travailleurs.
Par ailleurs, nous l’avons dit, puisque c’est la valeur ajoutée qui est prise en compte par le second volet de la contribution économique territoriale, divers stratagèmes peuvent être utilisés par les gestionnaires, comme le recours au chômage partiel et le gaspillage de moyens matériels et humains, pour adoucir la quittance fiscale pourtant due aux collectivités.
C’est pourquoi il nous a semblé nécessaire de procéder à une adaptation de la base de la contribution économique territoriale, en y ajoutant, en base imposable, les actifs financiers figurant au bilan des entreprises assujetties. Partant, nous accroissons cette base imposable de la somme astronomique d’environ 6 000 milliards d’euros !
Cette proposition est d’autant plus pertinente qu’il faut donner un contenu tangible à la péréquation des ressources entre collectivités territoriales. En effet, cette péréquation est aujourd’hui largement inachevée, la répartition de la cotisation valeur ajoutée s’apparentant, de fait, à une cote mal taillée destinée à compenser la disparition de la taxe professionnelle.
Enfin, la prise en compte des actifs financiers peut contribuer à modifier les choix de gestion des entreprises en faveur de l’emploi, des salaires et de l’investissement productif, ce qui n’est pas le moindre des avantages quand on constate à quel point l’économie réelle est actuellement sacrifiée sur l’autel de l’économie financière !
L’article 1er place les actifs financiers des entreprises dans l’assiette de la contribution économique territoriale.
L’article 2 fixe le taux de contribution des entreprises. Le taux retenu, de seulement 0,5 %, engendrera néanmoins une recette de 30 milliards d’euros au bénéfice des collectivités.
L’article 3 prévoit une clé de répartition de cette nouvelle ressource entre les différents types de collectivités. Celle-ci est déterminée en fonction de ce qui existe déjà en matière de dispositifs de solidarité : dotation de solidarité urbaine (DSU) et dotation de solidarité rurale (DSR) pour les communes, dotation de fonctionnement minimal (DFM) des départements, par exemple. Une fois déduit le demi-milliard d’euros nécessaire pour reprendre le montant des fonds de péréquation existants, ce sont 6 milliards d’euros qui seront accordés aux conseils régionaux, 9 milliards aux conseils généraux et 15 milliards aux communes et aux établissements publics de coopération intercommunale.
Enfin, les articles 4 et 5 ont trait aux ajustements nécessaires du code général des impôts consécutifs à cette nouvelle imposition.

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André
Chassaigne

Président de groupe
Député du Puy-de-Dôme (5ème circonscription)

Jean-Paul
Lecoq

Député de Seine-Maritime (8ème circonscription)

Alain
Bocquet

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