Propositions

Propositions de loi

PL n° 1757 - tendant à responsabiliser le prêteur pour juguler le surendettement

EXPOSE DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Le nombre de situations de surendettement avec la détresse qu’elles génèrent, ne cesse de s’accroître. Aujourd’hui ce sont près d’un million et demi de foyers touchés par ce fléau dont 185 000 familles nouvellement surendettées en 2007 et ce chiffre devrait malheureusement exploser en 2008 et 2009 en raison des incidences de la crise économique.
La loi Neiertz de 1989 fut la première à instituer un droit du surendettement avec la création de commissions ad hoc. Depuis cette loi les réformes furent nombreuses mais insuffisantes au regard de ce que représente aujourd’hui le surendettement. Peu de réformes ont envisagé de s’atteler à la prévention du surendettement ; elles se concentraient sur le volet curatif. Aucune réforme ne s’est encore réellement attelée à juguler une offre de crédit à la consommation prolifique et inconsistante.
Près de deux tiers des 200 000 nouveaux cas de surendettement enregistrés en 2004 sont directement imputables à la profusion d’offres de crédit à la consommation. Certaines sociétés de crédit peu scrupuleuses offrent ainsi par le biais de publicités aguicheuses des milliers d’euros sans réel contrôle de la capacité de remboursement de l’emprunteur et l’encourt des crédits déjà souscrits.
Cette proposition de loi a donc pour objet de responsabiliser les organismes prêteurs qui devront dorénavant apporter la preuve de leurs démarches visant à s’informer de la situation de solvabilité de l’emprunteur. Si le prêteur ne peut apporter cette preuve, il commet une faute par l’omission d’une formalité substantielle et se voit retirer le droit d’exercer toute procédure de recouvrement à l’encontre de l’emprunteur défaillant. De même s’il s’avère que le prêteur a accordé un crédit alors que la solvabilité de l’emprunteur était manifestement insuffisante lors de la signature ; le créancier ne pourra plus engager de procédure de recouvrement.
Certains craignent que cette réforme instituant une réelle responsabilité du prêteur restreigne l’offre de crédit et la croissance. Mais il ne saurait y avoir de croissance économique saine et durable fondée sur un surendettement et la détresse de la population. Cette croissance par endettement serait fictive et socialement destructrice. Il est donc préférable de s’en prémunir en encadrant de façon plus responsable l’offre de crédit.
Dans ce même esprit, il est indispensable de supprimer le système de l’hypothèque rechargeable introduite par le Gouvernement en 20007 et copiant le modèle anglo-saxon du prêt hypothécaire. Ce prêt dit « mortgage » est en partie responsable de l’ampleur de la crise financière actuelle. C’est un type de montage financier qui incitait à la création des « subprimes » dans lequel la capacité d’emprunt est réévaluée au regard de la valeur escomptée des biens hypothéqués. Il aura suffi d’un léger retournement du marché pour que le taux d’endettement des ménages dépasse les maximums fixés par les banques et déclenchent l’insolvabilité du foyer. Nous connaissons malheureusement l’ampleur de l’effet « boule de neige » et de la destruction de richesse générés par ces mécanismes.
Il nous a également semblé impératif de réviser le niveau et le mode de calcul du taux d’usure. Nombre de crédits à la consommation ou revolving flirtent avec la légalité et s’approchent de l’usure. Certains particuliers payent plus de 15 % d’intérêt et remboursent ainsi pendant des mois, voire des années les crédits, même modestes qui leur furent consentis.
Le coût de l’argent pour les particuliers est bien trop important au regard du prix des crédits sur le marché interbancaire. Ces banques et organismes prêteurs ont un comportement prédateur car le coût très élevé du crédit leur permet de supporter l’insolvabilité des emprunteurs et le non-remboursement des crédits afférents.
La baisse de la rétribution du crédit (par la baisse du taux d’usure) diminuera corrélativement le niveau à partir duquel il n’est plus rentable pour le prêteur d’accorder des crédits à une population non solvable. En conséquence pour rester rentable le prêteur devra limiter le risque d’insolvabilité des emprunteurs et donc se soucier un peu plus de leur santé financière et de leur réelle capacité à rembourser.
La baisse du taux d’usure présente un double bénéfice. Un bénéfice direct de baisse du coût pour les particuliers mais surtout un bénéfice indirect de contrainte vers la vertu qui détournerait les organismes des proies les plus fragiles et les moins solvables. En baissant le taux d’usure on protègera les familles les plus modestes de la spirale du surendettement.
Nous proposons donc de baisser ce taux d’usure et de modifier son mode de calcul. L’article L. 313-3 du code de la consommation utilise comme référence le taux effectif moyen qui lui-même intègre la multiplication des crédits proches du taux d’usure. Cette référence au taux effectif moyen n’est donc ni objective ni vertueuse. Il est donc souhaitable de lui substituer le taux moyen des prêts à 12 mois sur le marché interbancaire auquel on appliquerait un coefficient multiplicateur (entre 2 et 4) représentant le risque assumé et la plus-value escomptée par le prêteur.
Telles sont les principales dispositions de la présente proposition de loi qu’il vous est demandé, Mesdames, Messieurs, de bien vouloir adopter.

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Jacques
Desallangre

Député de Aisne (4ème circonscription)
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