Interventions

Explications de vote et scrutins

Réforme des retraites

« Comment accepter que sur un sujet essentiel, qui engage le pacte social et républicain, on refuse aux élus de la nation le temps nécessaire au débat ? Le recours au vote bloqué déshonore et discrédite le Gouvernement et le Président ».(Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs des groupes UMP et UDI.)
Ceci est une citation : c’est en ces termes que le parti socialiste dénonçait le recours au vote bloqué en 2010 sur la réforme des retraites. (« Eh oui ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Après un vote en première lecture à l’Assemblée nationale, lors duquel la réforme des retraites a été adoptée par une majorité toute relative, après son rejet par le Sénat et l’échec de la commission mixte paritaire, puis après un second rejet de l’article 4, vous avez choisi de passer en force.
Chacun a compris que le Gouvernement voulait écarter le débat : en effet, plus on débat et plus la vérité devient une évidence. Et cette vérité est sans appel : votre projet est profondément injuste et antisocial ! Ce n’est pas une réforme sociale, mais une réforme pour satisfaire aux exigences de la Commission européenne et des marchés financiers.
Pour nous convaincre, pour vous convaincre de vos choix guidés par votre obsession austéritaire, vous usez d’arguments qui tordent la vérité : sur la démographie, sur les femmes, sur les petites retraites, sur la préservation de la nature de notre système de retraite, sur l’innocuité de la réforme pour les jeunes ou encore sur l’efficacité financière de votre texte. Tout a été mis en œuvre pour que le débat n’ait pas lieu et que puissent, ainsi, être mis en exergue ces petits arrangements avec la vérité.
Vous avez préféré la concertation à la négociation, dévoilé votre texte en pleine session extraordinaire, choisi la procédure accélérée et même tenté d’imposer le temps programmé pour museler la représentation nationale.
Le vote bloqué, enfin, sur ce funeste article 4, ne laisse pas d’autre choix à votre majorité que d’entériner dans un seul vote l’ensemble du texte et cet article, qui baissera le niveau de vie des retraités les plus modestes.
Face à la montée de la contestation sur cette réforme, face aux réticences de votre propre majorité à voter un article 4 aussi régressif, vous avez choisi la voie de l’autoritarisme.
Oui, mes chers collègues, notre démocratie est aujourd’hui en berne !
Pour tenter de désamorcer la fronde qui agitait votre propre majorité sur l’article 4, vous avez, in extremis, présenté au milieu de la nuit dernière deux mesures dérisoires : la revalorisation du minimum vieillesse à hauteur de 13 euros, et celle de l’aide à la complémentaire santé uniquement pour les assurés de plus de 60 ans. Hélas, ces promesses ne changent rien sur le fond, rien ! Laisser croire le contraire est une tromperie politique, voire une forme de mépris pour les retraités qui survivent avec 800 euros par mois ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, UMP et UDI.)
Comment osez-vous parler de justice et d’équité ? L’équité n’a pas vocation à s’appliquer qu’entre les pauvres ! Or, dans ce texte, si l’on excepte le volet non rétroactif sur la pénibilité, les efforts demandés reposent sur les travailleurs, sur le travail, sur les jeunes, sur les retraités. Les modestes doivent se serrer la ceinture, quand les amis du Cercle de l’industrie et du MEDEF sont épargnés !
Vous avez délibérément choisi de n’agir que sur les leviers les plus injustes pour les assurés. Pourtant, plusieurs dizaines de milliards d’euros de recettes auraient été dégagées par l’élargissement de l’assiette des cotisations sociales aux revenus financiers, par la modulation de ces cotisations en fonction du comportement des entreprises, par la résorption rapide des inégalités salariales et professionnelles entre femmes et hommes. Autant de propositions portées par les députés du Front de gauche que vous avez balayées avec mépris !
En définitive, l’Histoire retiendra que ce gouvernement a entériné et prolongé toutes les régressions sociales imposées par la droite depuis plus de vingt ans, de l’allongement automatique de la durée de cotisation à la désindexation des pensions, en passant par le report de l’âge légal de départ. Une triste première pour un gouvernement de gauche !
M. Jean-Paul Bacquet. L’Histoire retiendra surtout que le stalinisme a fait faillite…
M. André Chassaigne. L’Histoire retiendra que votre réforme a pour effet de repousser de fait au-delà de 66 ans l’âge moyen effectif de départ à la retraite. L’Histoire retiendra que vous avez ponctionné plusieurs milliards dans les poches des retraités et que vous avez dispensé les entreprises du même effort. Fidèles à la défense des conquêtes sociales du Conseil national de la Résistance, fidèles aux avancées poussées par la gauche tout entière dans son histoire, nous voterons contre ce texte !
Nous continuerons à le dénoncer et à le combattre jusqu’à son vote ultime. Nous osons en effet croire que, d’ici là, dans un sursaut salvateur, les députés élus par le peuple de gauche prendront la décision qui s’impose : le rejet pur et simple de ce projet de loi en rupture avec le progrès social ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et quelques bancs du groupe UMP.)
Source Photo : Flickr - Khol

Imprimer cet article

André
Chassaigne

Président de groupe
Député du Puy-de-Dôme (5ème circonscription)

Thématiques :

Pouvoir d’achat Affaires économiques Lois Finances Développement durable Affaires sociales Défense nationale Affaires étrangères Voir toutes les thématiques