Interventions

Explications de vote et scrutins

Pt engagement dans la vie locale et proximité de l’action publique

Quand arrive le temps du vote sur un projet de loi, trois questions se posent. Quel est le contexte politique lié à cette évolution législative ? Quelle est la volonté affichée du Gouvernement ? Et surtout, quels sont le contenu du texte à l’issue des débats et l’impact concret qu’il aura sur le quotidien de nos concitoyens – et pour le présent projet de loi, bien évidemment, pour les élus locaux et les communes ? Je m’attacherai à répondre à ces trois questions pour expliquer le vote des députés communistes.

Le contexte ? C’est celui des difficultés accrues de nos communes pour répondre aux besoins de leur population et mener à bien leurs projets. Je prendrai l’exemple de la commune rurale dont je suis conseiller municipal : sa dotation globale de fonctionnement – DGF – a brutalement baissé de près d’un quart en 2018. Le cas est certes extrême, mais il n’est pas isolé. Quant aux maires, ils ont été, au fil des réformes, déconsidérés par le pouvoir central. Et les territoires sont abîmés par la saignée des services publics de proximité, comme c’est le cas avec le rouleau compresseur de la réorganisation en cours des finances publiques.

Quelques mots ensuite sur la volonté du Gouvernement. Après avoir négligé la commune, cellule de base de notre organisation territoriale, il a mis sur rails son entreprise de câlinothérapie : maires, je vous aime ! Nous avons péché. Nos prédécesseurs ont péché. Nous faisons acte de contrition. Nous allons réparer nos propres fautes. Nous allons aussi remédier au désastre des lois adoptées lors de la précédente législature. Nous ne faisons pas nôtre la loi NOTRe – la loi portant nouvelle organisation territoriale de la République –, nous allons la nettoyer de ses pires effets. Nous allons redonner le pouvoir aux premiers de cordée municipaux… Jouez hautbois, résonnez musettes : les trompettes de la renommée se sont mises en action. (Sourires sur plusieurs bancs.) Mais il faut aussi écrire la partition. Marguerite Yourcenar l’exprimait fort bien : « On ne doit plus craindre les mots lorsqu’on a consenti aux choses ».

Qu’en est-il à l’issue de nos débats ? En positif, quelques progrès sont à noter en direction des élus locaux.

Nous nous félicitons notamment de l’augmentation de leurs indemnités et de celle, annoncée par le Premier ministre, de la dotation particulière accordée aux plus petites communes – nous l’avions proposée lors des débats car nous savons bien que les communes rurales ne peuvent pas augmenter les indemnités sans l’appui de la puissance publique.

Nous nous réjouissions aussi de la disposition introduite après la catastrophe de Lubrizol, cher collègue Wulfranc, qui prévoit l’information des maires des communes dont le territoire est affecté par une calamité lorsque le préfet prend la direction des opérations de secours. L’État réaffirme ainsi le rôle pivot des maires dans le système d’alerte et d’information de la population.

Cependant, les avancées sont minimes pour que les maires, notamment des petites communes, soient davantage entendus au sein des intercommunalités.

Dans le même temps, vous avez fait preuve d’un manque de confiance affligeant quant à la capacité des élus municipaux à répondre au mieux aux exigences de proximité, puisque vous continuez de les soumettre aux décisions majoritaires des conseils communautaires.

Le meilleur exemple en est le refus de les laisser décider du choix de gestion des services d’eau et d’assainissement – vous avez confirmé le transfert définitif de ces compétences aux intercommunalités avant de céder ces biens communs aux multinationales du secteur.

En Bonnie et Clyde du Gouvernement, les deux ministres concernés ont confirmé ce hold-up d’une liberté communale en mettant le pistolet sur la tempe des élus de proximité. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

C’est ce qu’a si bien traduit le président du Sénat au congrès des maires de France : « À force de raisonner efficacité et productivité, on a oublié ce qu’est la République dans sa chair. »

Cette faute politique gravissime, monsieur le ministre, plombe votre projet de loi.

Parmi bien d’autres renoncements, on doit aussi regretter que la majorité n’ait pas accepté d’accroître le niveau de régulation des plateformes comme Airbnb.

Il est pourtant urgent d’encadrer davantage ce mode de location de courte durée qui a des conséquences dramatiques pour l’accès au logement et la vie de nos quartiers.

Pour conclure, je reprendrai la belle formule d’un jeune poète, Victor Blanc : « Au cœur de chaque galaxie vit une grande araignée qui étouffe les étoiles comme des mouches isolées. » C’est malheureusement ce que vous avez continué à faire en détricotant le projet de loi qui nous était arrivé du Sénat et que les sénatrices et sénateurs communistes avaient voté, ce que nous ne pourrons pas faire aujourd’hui : nous voterons contre, dans l’attente d’une prise de conscience en CMP. C’est dire l’intensité de notre foi ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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Vote solennel du 26 novembre 2019

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André
Chassaigne

Président de groupe
Député du Puy-de-Dôme (5ème circonscription)

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