Interventions

Explications de vote et scrutins

Projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2026

Il me faut d’abord noter que nous avons eu un débat, un vrai débat, suivi d’un vote. Pour moi qui suis député depuis 2022, c’est une première. Les discussions ont permis de faire évoluer le texte initial et de rendre saillantes, s’il en était encore besoin, les positions politiques de la gauche et de la droite en matière de justice sociale ; de mesurer qui a réellement à cœur de préserver notre modèle de protection sociale.

Madame la ministre, vous avez souligné mes principes en la matière. Avec l’ensemble des députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine, je défends vigoureusement le principe de solidarité de la sécurité sociale, selon lequel chacun doit contribuer selon ses moyens, sur la base de la richesse produite, et recevoir selon ses besoins. En ces temps de grande incertitude sociale, économique et environnementale, alors que la pauvreté n’a jamais autant gangrené notre société, renoncer ne serait-ce qu’un peu à ce principe serait renoncer à ce qui reste de notre cohésion sociale.

Au gouvernement et à la droite qui nous interpellent au sujet de la dette inouïe que nous laisserions aux générations futures, je réponds que je n’ai pas davantage envie de leur laisser un monde où la retraite sera fonction de ce que chacun aura pu épargner, où n’auront accès à des soins que ceux qui pourront les payer, où régnera le chacun pour soi, sans plus aucun esprit de solidarité.

Notre effort doit être double. D’un seul et même geste, inspirés précisément par les principes de la sécurité sociale, nous devons bel et bien rétablir l’équilibre du système tout en lui donnant les moyens de son existence, c’est-à-dire en le dotant des ressources issues de la cotisation sociale, car il n’y a pas de méthode plus juste, plus équitable, plus pérenne. La difficulté est que, pour certains, davantage de ressources ne peuvent consister qu’en de moindres dépenses. Tel était le défaut majeur du texte initial –⁠ d’autant que ces moindres dépenses pesaient quasiment intégralement sur les assurés sociaux. À ce titre, je regrette qu’une majorité ait maintenu la taxe de 2 % sur les complémentaires santé sans avoir l’assurance qu’elles ne la répercuteront pas sur les assurés. Je me réjouis à l’inverse qu’ait pu être préservé le pouvoir d’achat des apprentis –⁠ au demeurant bien faible – et que l’ensemble des prestations sociales et des pensions de retraite soient bien revalorisées en 2026.

Le gouvernement a renoncé à augmenter les franchises médicales et je prends acte de son engagement. C’est la moindre des décences quand on sait que plus de la moitié de nos concitoyens renoncent à des soins.

Nous avons pu avoir un début de débat sur la CSG. En obtenant la suppression du gel de cette dernière sur les pensions de retraite, les pensions d’invalidité et les allocations chômage, nous avons évité à bon nombre de Français de subir une nouvelle perte de pouvoir d’achat. Le compromis trouvé au sujet de la CSG sur le capital n’est en revanche pas pleinement satisfaisant. Nous souhaitions que les petits épargnants soient exemptés, et c’est chose faite. Néanmoins, l’Assemblée nationale, sur proposition du gouvernement, a également épargné au passage les plus aisés, qui tirent du capital la plus grande part de leur revenu. Sur l’objectif d’un juste effort demandé à chacun, il y a encore une grande marge de progression.

Nous ne cessons de le dire : les ressources de la sécurité sociale sont grevées par les exonérations de cotisations sociales non compensées. À cet égard, nous apprécions que le gouvernement ait entendu notre demande, formulée de longue date, en s’engageant à compenser les exonérations sur les heures supplémentaires pour un montant de 2,5 milliards d’euros, ainsi qu’à rattraper la sous-compensation des allègements généraux, estimée aux alentours de 2 milliards. Néanmoins, le débat sur la masse des exonérations de cotisations, ainsi que sur les exemptions d’assiette sans contreparties, reste devant nous : se trouve là un grand gisement de recettes pour la sécurité sociale.

En définitive, si nos délibérations ont permis de colmater quelques brèches et d’éviter de bien mauvais coups pour les Français, elles n’ont pas sauvé notre modèle social. L’insuffisance des ressources nouvelles demeure très préoccupante. Le rehaussement de l’Ondam à 3,1 % éloigne un peu la sentence du comité d’alerte mais il fait fi, une fois de plus, de la nécessité d’en venir à une loi de programmation pluriannuelle.

Le fait d’avoir de nouveau affecté 15 milliards d’euros de dette à la Cades pour éviter un débat de fond sur cette dette et sa financiarisation fragilise la sécurité sociale. Autrement dit, des débats de fond, urgents, restent devant nous. Si nous voulons réellement préserver notre système, il serait bon d’oser les mener avant l’automne prochain.

Quoi qu’il en soit, dans ce contexte particulier, une majorité du groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera contre le texte, tandis qu’une autre part non négligeable –⁠ dont je fais partie – s’abstiendra. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR, EPR et Dem.)

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Yannick
Monnet

Député de l' Allier (1ère circonscription)
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