Vous avez, madame la ministre des affaires sociales et de la santé, mené une véritable campagne de communication pour faire croire à nos concitoyens que le fameux « trou de la Sécu » était comblé. Il s’agit là d’une présentation trompeuse et mensongère.
M. Arnaud Richard et M. Francis Vercamer. Très bien !
Mme Jacqueline Fraysse. En annonçant un déficit de 400 millions d’euros pour 2017, vous omettez volontairement de parler du FSV, le Fonds de solidarité vieillesse, qui prend en charge des dépenses de solidarité envers les personnes âgées, par exemple le minimum vieillesse, et dont le déficit est estimé à 3,800 milliards pour 2017. Ainsi, avec le déficit du FSV, le « trou » atteindra 4,200 milliards d’euros en 2017.
M. Jean-Jacques Candelier. Vrai.
Mme Jacqueline Fraysse. Telle est la réalité.
Je vous accorde que c’est mieux que les 7,100 milliards de déficit global en 2016 mais c’est dix fois plus que les 400 millions d’euros de déficit dont vous vous vantez.
Pourquoi cette falsification ? Peut-être – je le redoute, dans ce contexte préélectoral – pour convaincre une majorité de nos concitoyens, déçus à juste titre de la politique d’austérité menée par ce gouvernement, que « la gauche a fait le job », comme vous dites ; sans doute aussi pour tenter de masquer ce que traduisent concrètement les chiffres, à savoir la dégradation à l’issue de ce quinquennat de l’accès aux soins pour tous ainsi que de notre système de Sécurité sociale solidaire.
Mme Luce Pane. Ce n’est pas vrai !
Mme Jacqueline Fraysse. Réduire le déficit de la Sécurité sociale est légitime tant il est important de veiller au bon usage des deniers publics, mais le faire en infligeant aux Français, notamment aux plus modestes d’entre eux, des économies drastiques n’est pas une performance très glorieuse.
Car la réalité est que vous avez partout diminué les prestations. Les prestations familiales n’ont été revalorisées ni en 2014 ni en 2015 et la modulation des allocations familiales vous a permis de réaliser 865 millions d’euros d’économies par an sans en redistribuer la totalité aux familles modestes comme vous l’aviez pourtant promis.
M. Marc Dolez. Très bien !
Mme Jacqueline Fraysse. Le retour à l’équilibre de la branche vieillesse est supporté par les salariés qui, par la faute de votre réforme de 2014, doivent travailler toujours plus pour bénéficier d’une retraite à taux plein.
M. Jean-Jacques Candelier. Exact.
Mme Jacqueline Fraysse. Quant à l’excédent de la branche Accidents du travail-Maladies professionnelles, dite AT-MP, il s’explique notamment par la sous-déclaration des accidents, supportés de ce fait par la branche maladie, cette branche maladie qui doit réaliser 4 milliards d’euros d’économies en 2017, dont 1,500 milliard d’économies supplémentaires pour les hôpitaux publics, pourtant déjà au bord du gouffre.
De plus, vous siphonnez tous les crédits. Le fonds dédié à la formation des personnels hospitaliers sera ponctionné de 300 millions d’euros pour financer la mise en œuvre des groupements hospitaliers de territoire, pourtant partout décriés parce qu’ils aggravent les conditions de travail des personnels. Les crédits de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie vont être ponctionnés de 230 millions d’euros, au détriment des personnes âgées et handicapées.
Certes, ce PLFSS comporte quelques mesures positives que mon groupe a soutenues : l’amélioration de la prise en charge de la souffrance psychique chez les jeunes, de celle des victimes du terrorisme ou encore du recouvrement des pensions alimentaires non payées. De même, nous nous réjouissons que la proposition de notre collègue Valérie Rabault visant à redonner un peu de pouvoir d’achat – une quarantaine d’euros par mois en moyenne – à 550 000 retraités appauvris par des mesures prises par ce gouvernement ait trouvé une issue favorable. Mais il est incroyable que cette disposition, qui coûtera 280 millions d’euros, ait fait l’objet de tant de tergiversations quand vous distribuez si facilement 40 milliards d’argent public aux grandes entreprises, sans contrepartie ni contrôle de leur utilisation !
M. Marc Dolez. Excellent !
Mme Jacqueline Fraysse. Décidément, ce sont toujours les plus modestes que vous taxez d’abord. Par exemple vous élargissez les exonérations de cotisations sociales patronales pour plus de 44 milliards d’euros en 2017 mais vous remettez en cause le dispositif dont bénéficient les chômeurs qui créent leur entreprise. S’agissant de l’encadrement de l’économie collaborative, plutôt que de vous attaquer aux plates-formes telles que Airbnb, laquelle a payé en 2015 moins de 70 000 euros d’impôts en France, vous taxez les personnes qui retirent un petit complément de revenus de l’économie de partage.
M. Marc Dolez. Quel scandale !
Mme Jacqueline Fraysse. Pourquoi n’avez-vous pas la même sévérité à l’égard des entreprises spécialistes de la fraude sociale, estimée à près de 25 milliards d’euros par an ?
Non décidément, que l’on s’attache à la comptabilité elle-même, qui est insincère et ne propose aucune recette nouvelle, ou à l’injustice sociale de viser toujours les plus modestes dans un pays où il y a beaucoup d’argent, le compte n’y est pas.
Nous ne pouvons donc que voter contre ce projet de financement de la Sécurité sociale pour 2017. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
Explications de vote et scrutins