Permettez-moi d’abord de remercier tous les services de l’Assemblée nationale, tous les agents de cette belle maison, qui nous ont permis de passer ces heures de débat dans des conditions optimales.
Ce n’était pourtant pas facile.
Ces débats s’achèvent de façon bien triste. Une triste fin, non dénuée de confusion, qui n’a pas respecté la diversité de notre Assemblée, ni la coconstruction promise par le Gouvernement.
Monsieur le ministre, monsieur le ministre délégué, vous ne vous étonnerez pas que les députés du groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES estiment que quatre jours de débats ont été loin de suffire à dissiper les craintes dont nous avions fait état lors de la discussion générale – c’est un euphémisme.
L’acte qui résume le mieux nos craintes, c’est bien entendu votre refus catégorique de taxer les superprofits et les superpatrimoines, au détriment de la justice sociale, fiscale et environnementale. Alors que Total, les sociétés d’autoroute ou la compagnie de fret maritime CMA CGM empochent des dizaines de milliards d’euros de profits grâce aux crises successives alors que les 500 plus gros patrimoines français viennent de dépasser le chiffre astronomique de 1 000 milliards d’euros en richesse cumulée, vous restez campés sur vos positions et continuez à défendre la théorie du ruissellement. Je concède que cette théorie fonctionne, puisque vous parvenez à organiser le ruissellement des efforts des Français vers les poches d’une petite caste qui s’engraisse ! (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et LFI-NUPES.)
C’est une faute politique que de vous entêter à ne pas vouloir toucher à la répartition des richesses. C’est une faute budgétaire que de se priver d’une marge de manœuvre exceptionnelle dans un moment exceptionnel.
Ce sujet sera de nouveau sur la table dès la rentrée de septembre, face aux urgences sociales et à l’indécence des surprofits – les profits de Total atteignaient 13 milliards d’euros en 2021, et ils devraient plus que doubler en 2022.
Votre credo, monsieur le ministre, c’est de refuser les hausses de salaires et du SMIC pour favoriser les primes et l’intéressement, ce qui fragilise le socle de la rémunération, d’accroître le nombre d’heures de travail désocialisées et défiscalisées, d’attaquer les RTT en les monétisant. Sous prétexte de soutenir les salariés, vous grignotez les conquis sociaux.
Votre credo est de ne pas revaloriser les pensions, les minima sociaux et les allocations à la hauteur de l’inflation, comme nous l’avons vu ce soir.
Votre credo, c’est un accord de bout de table sur le carburant, dans lequel l’État et Total feront assaut de connivence pour baisser de 50 centimes le prix à la pompe en septembre et octobre, de 30 centimes en novembre, de 20 centimes en décembre et de zéro en janvier. Voilà la réalité : l’absence de mesures pérennes pour les Français.
Votre credo, c’est une aumône de 250 euros, accordée dans sa grande mansuétude par la CMA CGM qui a engrangé des profits records grâce au bond de 6 000, 8 000 ou 10 000 euros du prix de ses conteneurs, plongeant un peu plus les départements et régions d’outre-mer et leurs habitants dans la spirale de la vie chère. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES ainsi que sur plusieurs bancs du groupe LFI-NUPES.)
Votre credo, c’est de toujours opposer un refus à nos compatriotes ultramarins à qui vous n’avez envoyé aucun signe, ni dans la loi sur le pouvoir d’achat ni dans ce PLFR. Quelle occasion manquée !
(Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES.)
Ce sont des piliers de notre démocratie qui sont ainsi rognés, comme le prouve votre choix de supprimer la contribution à l’audiovisuel public, qui ne se résume pas à une simple question de prélèvement obligatoire : c’est l’avenir de l’audiovisuel public qui se joue, son indépendance et la pérennité de ses ressources.
Pour conclure, je veux revenir sur le compromis au sujet des collectivités locales, qui ne vaut surtout pas solde de tout compte. Les collectivités territoriales, particulièrement les communes et intercommunalités, sont des garantes de la République. Elles sont le premier accès et bien souvent le dernier recours pour les plus fragiles de nos concitoyens. Affaiblir les collectivités locales n’est pas un choix d’avenir. Nous y reviendrons dans les discussions budgétaires de l’automne avec toute la force nécessaire.
Vous aurez donc compris, monsieur le ministre, monsieur le ministre délégué, que les députés du groupe Gauche démocrate et républicaine s’opposeront à ce texte. Nous serons au rendez-vous du projet de loi de finances pour 2023, qui s’annonce… stimulant, au regard des votes et des débats de ce soir. Et à la lumière de ce qui s’est passé tout à l’heure sur les pensions, je vous le dis en toute amitié, il y a de petites victoires qui sont annonciatrices de grandes défaites. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES, SOC, Écolo-NUPES.)