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Explications de vote et scrutins

PLF 2017 (EV)

Monsieur le président, monsieur le ministre, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission des finances, madame la rapporteure générale, mes chers collègues, nous voici au terme de l’examen de ce projet de loi de finances pour 2017, dernier budget du quinquennat. Le temps est donc venu de prendre du recul pour faire le bilan de la politique budgétaire menée depuis 2012.
Soyons francs : ce quinquennat aura été celui d’un transfert inédit de fiscalité. En effet, le choix exclusif d’une politique de l’offre, fait dès 2012 et amplifié en 2014, aura conduit à diminuer de plus de 30 milliards d’euros les prélèvements sur les entreprises et à augmenter de 20 milliards d’euros environ les prélèvements sur les ménages.
Avec la hausse du taux de CICE et la baisse programmée du taux de l’impôt sur les sociétés, adoptées dans ce budget, ce choix est, malheureusement, conforté. Dès lors, messieurs les ministres, que va-t-il rester de notre impôt sur les sociétés dont le rendement sera deux fois moindre que celui de la moyenne des pays de l’OCDE ?
Autre question : ce transfert massif – et douloureux –des prélèvements des entreprises vers les ménages, qui s’accompagne d’une TVA désormais en surpoids, a-t-il été bénéfique pour l’emploi et la cohésion sociale ? Malheureusement non ! En quatre ans et demi, le chômage comme la précarité n’auront cessé de croître. L’erreur manifeste aura été de croire et de faire croire que la compétitivité des entreprises dépendait exclusivement du prix du travail, je dis bien de son prix car le travail n’est pas un coût !
Or c’est par l’investissement, l’innovation et la formation que notre pays doit se singulariser. C’est par un mode de développement fondé sur la transition écologique, la réussite éducative ainsi qu’un véritable accompagnement dans l’emploi tout au long de la vie que nous parviendrons à proposer un chemin d’espérance et d’optimisme à nos concitoyens.
Ce chemin est, pour le moment, coupé par une fracture territoriale, silencieuse et pourtant si douloureuse, qui s’aggrave : la métropolisation a contribué à accroître les inégalités sociales et le sentiment d’abandon. La baisse des investissements publics, en particulier à l’échelon local, qui a subi une baisse drastique et indifférenciée de ses moyens, a été lourde de conséquences pour nos territoires.
Bien sûr, nous avons salué certains efforts nécessaires, en matière de police, de gendarmerie et de justice, pour assurer la sécurité de nos concitoyens. Nous avons également soutenu le rattrapage concernant l’éducation nationale, même si un effort supplémentaire reste nécessaire.
Ce soutien, nous l’avons apporté en responsabilité, ce dont nous nous félicitons, compte tenu de ce que d’aucuns promettent ! Contrainte de faire de la surenchère pour pouvoir se démarquer politiquement, la droite annonce, selon les goûts, entre 80 et 110 milliards d’euros de diminution de dépenses publiques, ce qui aurait des conséquences dramatiques sur notre capacité à répondre aux défis du temps présent.
M. Sylvain Berrios. Mais vous n’avez pas encore perdu !
M. Gaby Charroux. C’est une ineptie au moment où toutes les grandes institutions prônent un desserrement des politiques d’austérité qui font tant de mal aux plus fragiles.
Mais si nous en sommes là, messieurs les ministres, si nos concitoyens font preuve d’un tel rejet à l’égard de la politique menée depuis 2012, c’est tout simplement parce que le chemin choisi n’a pas été à la hauteur de leurs attentes et de vos engagements.
En refusant de toucher à une ligne du Traité européen sur la stabilité, la coordination et la gouvernance – TSCG – et donc en refusant de porter le fer contre l’orthodoxie européenne qui fait des 3 % de déficit l’horizon indépassable, notre pays s’est mis dans l’impasse.
En ne portant pas une véritable réforme fiscale posant la progressivité et la justice comme valeurs cardinales, modulant les prélèvements des entreprises en fonction de l’utilisation des bénéfices et décourageant la rente, le Gouvernement est resté dans le couloir de l’ordolibéralisme ambiant.
Le prélèvement à la source n’est en aucun cas une réforme fiscale. Source de complexité, qualifié par certains d’usine à gaz, il présente des risques importants en matière de confidentialité et d’efficacité du recouvrement en associant un tiers à la collecte, en l’occurrence l’entreprise, dont ce n’est pourtant pas le rôle.
Pis, le prélèvement à la source pourrait être pour la droite le cheval de Troie d’une flat tax, un impôt proportionnel qui toucherait uniformément les plus riches et les plus pauvres, ce qui constituerait un désastre social.
Dans sa philosophie, ce budget ne diffère pas des précédents. Au terme de cette législature, il signe la déception de ne pas avoir ouvert un autre chemin : celui d’une création et d’une répartition plus égalitaires des richesses, celui du progrès et de l’ambition, celui de l’innovation et de l’espoir.
C’est pour avoir oublié sa volonté de battre en brèche une finance internationale toute-puissante, c’est pour avoir pris le parti de la doxa libérale que le Gouvernement, entraînant toute la gauche, a perdu une grande partie du peuple. L’urgence est telle que la résignation comme la satisfaction seraient une faute. Nous voterons contre ce projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine.)
M. Marc Dolez. Excellent !

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Gaby
Charroux

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