Le cadre légal tel que défini jusqu’à présent permettait aux influenceurs et influenceuses de jouir d’une certaine liberté dans leurs activités promotionnelles, la législation en vigueur n’étant que peu adaptée à ces nouvelles pratiques commerciales. Pourtant, ces activités n’échappent pas aux dérives : arnaques aux placements financiers et au compte personnel de formation, promotion de médicaments et d’actes de chirurgie esthétique, publicité pour des jeux d’argent et de hasard en sont quelques exemples. Il est devenu indispensable de protéger les consommateurs et consommatrices face à des influenceurs très suivis par un public majoritairement jeune, donc plus influençable, qui ne respectent pas certains cadres légaux et dérogent aux règles des plateformes qui les hébergent.
Grâce à cette proposition de loi, la France devient aujourd’hui l’un des premiers pays à légiférer sur cette activité nouvelle et à définir ainsi un encadrement de ces pratiques. C’est pourquoi je tiens à remercier les rapporteurs de ce texte et à saluer leur travail. Le groupe Gauche démocrate et républicaine partage l’essentiel des ambitions de ce texte, notamment la définition de l’activité d’influenceur telle qu’elle a été adoptée. La seule remarque que nous souhaitons faire concerne le lien très spécifique qui unit l’influenceur ou l’influenceuse à ce que l’on appelle sa communauté. Ce lien d’influence n’existerait pas sans une relation de confiance particulière, qui s’apparente à une forme d’emprise psychologique. En effet, l’activité d’un influenceur ne se limite pas à la vente de produits ou de services à sa communauté, activité pour laquelle les entreprises le rémunèrent ensuite. Son activité commerciale se mêle souvent aux mises en scène de sa vie quotidienne, dans lesquelles les internautes se projettent, voire sur lesquelles ils fantasment parfois.
C’est en entretenant un faux lien de proximité, voire d’intimité, avec son public, que l’influenceur construit son influence.
Notre groupe partage aussi l’objectif que poursuit cette proposition de loi avec la création d’un statut d’agent d’influenceur, car les responsabilités promotionnelles sont en réalité partagées. S’agissant des influenceurs installés hors de l’Union européenne et dont les contenus visent un public français, nous soutenons la volonté des rapporteurs qu’ils soient représentés par une personne morale ou physique en France. Nous sommes également satisfaits du renforcement de l’interdiction de la promotion de la chirurgie et de la médecine esthétiques par les influenceurs.
L’interdiction de la publicité pour des produits contenant de la nicotine est également une très bonne nouvelle. Nous aurions cependant souhaité qu’elle soit étendue aux boissons alcoolisées, au-delà des dispositions de la loi Évin. Nous regrettons également que la publicité pour les jeux de hasard et les paris sportifs n’ait pas fait l’objet d’une mesure similaire. Le rappel de l’interdiction de ces pratiques pour les mineurs est évidemment important mais, cette addiction étant de plus en plus répandue, nous aurions préféré qu’elle ne fasse pas l’objet de publicités qui contribuent à sa banalisation.
Nous émettons par ailleurs quelques réserves sur le rôle des signaleurs de confiance chargés de faire remonter les contenus illicites à la DGCCRF. Le recours à des associations de consommateurs ou à des acteurs privés ne nous apparaît pas judicieux : pour nous, ces missions devraient être assumées par l’État. Enfin, nous regrettons que le nombre d’agents au sein de la brigade spécialisée de la DGCCRF chargée de procéder aux contrôles et aux enquêtes ne soit toujours pas suffisant, alors que celle-ci révèle que les pratiques de 60 % des influenceurs contrôlés dans le cadre de ses enquêtes ne sont pas conformes à la réglementation.
Vous l’aurez compris, nous aurions souhaité que ce texte aille un peu plus loin et pose des interdits clairs en matière de publicité pour les produits de santé, les jeux d’argent et de hasard ou les produits financiers et cryptomonnaies. Ces produits seront certes mieux régulés, mais ils pourront toujours faire l’objet de promotions. Le groupe GDR considère néanmoins que la présente proposition de loi constitue une première pierre indispensable pour lutter contre les dérives des influenceurs et pour la protection des droits des consommateurs – ce dont je tiens d’ailleurs à remercier une nouvelle fois les rapporteurs. Notre groupe votera donc ce texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)