L’accouchement est un jour singulier, dont les mères se souviennent toute leur vie. Qu’il soit attendu avec impatience ou redouté avec angoisse, ce jour-là est souvent le premier d’une aventure unique. Pour celles et ceux qui exercent la profession de sage-femme, accompagner les femmes lorsqu’elles donnent la vie est plus qu’un métier, c’est un engagement.
Depuis plusieurs années, les sages-femmes ont acquis de nouvelles responsabilités pour prendre soin de la santé des femmes tout au long de la grossesse et après l’accouchement : suivi gynécologique, accompagnement et informations sur le déroulement de la grossesse, détection des infections sexuellement transmissibles, vaccination ou encore pratique de l’interruption de grossesse médicamenteuse. En somme, leurs missions s’étendent désormais bien au-delà du seul accouchement.
Si cela peut être interprété comme une reconnaissance de leurs savoirs et de leurs compétences, les sages-femmes souffrent d’un manque de valorisation de leur profession, qui reste considérée comme paramédicale et non médicale à part entière. Le métier attire de moins en moins et le nombre de démissions augmente. À la rentrée 2022, 20 % des places en deuxième année d’études de maïeutique étaient vacantes.
Cette proposition de loi répond en partie aux revendications des sages-femmes en leur conférant enfin un statut médical. À l’article 1er, leur formation est confiée aux universités, ce qui permet le rapprochement avec les formations médicales et pharmaceutiques ; à l’article 2, la durée des études, considérée comme trop courte, est portée à six ans par l’ajout d’un troisième cycle. L’article 4 prévoit le reclassement de la profession parmi les professions médicales, ce qui met fin à un paradoxe curieux puisque les maïeuticiens qui exercent à l’hôpital sont rattachés au corps des fonctionnaires et non à celui des praticiens hospitaliers, quand le code de la santé publique considère qu’ils font partie du corps médical. Enfin, la création à l’article 3 d’un statut d’enseignant-chercheur en maïeutique permet de poursuivre les études jusqu’au doctorat et de se consacrer à la recherche universitaire. Le statut de maître de stage agréé en maïeutique, une avancée très attendue, permettra d’encadrer les étudiants en stage en ambulatoire, comme c’est déjà le cas en médecine.
Déposé sous la précédente législature, ce texte, dont je salue l’autrice, Annie Chapelier, a été adopté à l’unanimité en première lecture dans les deux chambres. J’y vois le signe d’un consensus et de la nécessité, urgente, de légiférer dans ce domaine.
Trois articles ayant été adoptés conformes par le Sénat et l’Assemblée, il nous reste deux articles à approuver. Nous soutiendrons pleinement le texte, tout en regrettant que le sujet de la valorisation salariale ait été éludé. Nous espérons que cette question fera l’objet d’une concertation rapide et efficace. Comme toutes les professions de santé, celle de sage-femme a beaucoup souffert des mesures libérales et dévastatrices de ces vingt dernières années. Les décisions de fermeture de nombreuses maternités, d’hôpitaux de proximité, de services et de lits ont écœuré les soignants et éloigné nos concitoyens des parcours de soins. Jamais la médecine de ville et l’hôpital ne pourront fonctionner correctement si leurs fondements reposent sur un système de rentabilité. La bonne santé des Français ne s’accommode pas de la recherche désespérée du profit. Les professionnels de santé souhaitent exercer leurs missions de la meilleure des façons possibles – c’est-à-dire humainement.
Nous saluons néanmoins les avancées que comporte ce texte, en faveur duquel le groupe de la Gauche démocrate et républicaine-NUPES votera. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)