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Fonction publique : La Poste et les activités postales

En faisant de La Poste une société anonyme, le Gouvernement franchit une étape décisive dans la casse du secteur public de notre pays.
Rien n’obligeait à ce changement de statut, et le prétexte des moyens nécessaires à la modernisation de La Poste ne tient pas.
Vous prétendez que La Poste conservera un capital 100 % public, mais cette promesse ne convainc personne. Un autre ministre s’était engagé, ici même, à ne pas privatiser GDF. Devenu Président de la République, il décida la privatisation et la fusion de GDF avec le groupe Suez ; la leçon vient donc de haut.
Vous savez que, progressivement, l’État réduira sa part dans le capital de cette société anonyme au profit d’actionnaires privés et que, au terme du processus, les capitaux publics seront minoritaires. Il n’existe aucun exemple de pays européen ayant déjà libéralisé son secteur postal où les emplois, la présence postale et la qualité du service aient été maintenus. Partout, des milliers d’emplois ont été supprimés, des bureaux de poste ont été fermés et la qualité du service s’est dégradée.
Vous fermez les yeux devant cette réalité. En fait, vous êtes pleinement solidaire et acteur de la mise en œuvre du dogme libéral qui préside à la construction européenne. Après les télécommunications, l’énergie et le ferroviaire, c’est le tour de la Poste, avec ses 285 000 salariés, sa présence territoriale, son prix unique du timbre, avec la perspective d’un service universel version rabougrie du service public postal. En fait, c’est tout le secteur public qui est menacé, alors que l’on sait son rôle protecteur face à la crise et qu’une étude de l’INSEE montre qu’il contribue à 69 % à la réduction des inégalités.
C’est bien cela que plus de deux millions de nos compatriotes ont compris en participant, au début du mois d’octobre, à la votation citoyenne. Vous affichez votre mépris à l’égard de cette initiative, alors qu’elle montre l’attachement profond de notre peuple au service public postal et sa volonté qu’il reste public. Nous vous avons d’ailleurs proposé d’organiser vous-même un référendum, ce que vous refusez tant vous craignez sans doute le verdict du peuple.
Vous transformez La Poste en une société anonyme. Logiquement, elle va devoir être rentable et verser des dividendes à l’État et à la Caisse des dépôts. J’illustrerai les conséquences de cette logique infernale par trois exemples.
La loi précise que La Poste gardera 17 000 points de contact, mais elle ne dit rien de leur statut. On sait qu’il n’y a aujourd’hui que 11 000 bureaux de poste, les 6 000 autres, aux services réduits, étant des agences postales communales et des relais poste chez des commerçants. On sait aussi que les bureaux de poste de plein exercice, aujourd’hui 11 000, sont destinés à être de moins en moins nombreux. Or La Poste décide seule, sur la base de critères liés aux encours financiers, donc à la nature de la clientèle, des bureaux à déclasser et à transformer en agences postales communales.
Vous avez rejeté notre demande d’un avis conforme du conseil municipal. Votre refus d’un telle procédure, pourtant démocratique, justifie notre inquiétude quant à l’évolution de la présence territoriale de La Poste.
Vous voulez faire de la banque postale, dont on sait le rôle dans l’accessibilité bancaire comme on sait qu’elle est, plus que toute autre, la banque des gens modestes, une banque comme les autres. Elle va distribuer des crédits à la consommation comme toutes les autres banques. Nous avions souhaité qu’il lui soit interdit de proposer des crédits revolving, ces crédits renouvelables à l’origine de tant de dossiers de surendettement. Vous avez refusé cette proposition ; ce n’est pas acceptable.
Enfin, plus de 6 000 fonctionnaires de La Poste ne cessent de demander que leurs droits, aujourd’hui bafoués, soient enfin reconnus. Le Sénat avait décidé la reconstitution de carrière de ces agents, estimant qu’il n’était que justice d’accéder à leur demande. Eh bien, non ! Prétextant un coût trop élevé pour La Poste et pour l’État en matière de retraite, vous avez décidé de maintenir l’injustice, et le décret que vous consentez à prendre ne vaut que pour l’avenir. Vous aviez l’occasion de régler ainsi un problème qui n’a que trop duré et de sortir par le haut de la situation actuelle, mais vous n’affichez que mépris à l’égard de ces 6 000 agents.
En définitive, ce texte participe de votre offensive générale contre le secteur public, que vous voulez adapter aux exigences du capitalisme mondialisé. Porteur de menaces pour l’entreprise publique et les postiers, pour la présence postale territoriale, il est une étape vers la privatisation de La Poste.
C’est pourquoi, bien entendu, les députés communistes, Verts, du parti de gauche et ultramarins du groupe GDR appellent à la mobilisation et voteront contre ce projet de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur plusieurs bancs du groupe SRC.)
 

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Pierre
Gosnat

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