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Épreuve de « formation aux premiers secours » au brevet des collèges

M. le président. Pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine, la parole est à Mme Marie-Hélène Amiable.
Mme Marie-Hélène Amiable. Monsieur le président, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, seuls 40 % de nos concitoyens sont formés aux premiers secours, chiffre faible si on le compare notamment à celui des pays du Nord de l’Europe.
Sachant l’importance de ces gestes pour limiter la gravité des blessures et sauver des vies, nous sommes devant une évidente responsabilité que souligne bien la proposition de loi déposée par nos collègues du groupe SRC.
Ses auteurs l’ont rappelé, environ 30 % des décès imputables aux arrêts cardiaques, aux accidents domestiques ou aux accidents de la route pourraient être évités si des soins de premiers secours étaient prodigués dans les minutes suivant l’accident. Or, si l’obligation de formation aux premiers secours dans les établissements d’enseignement des premier et second degrés est bien inscrite dans la loi, le rapporteur du texte a également démontré son insuffisante application puisque seuls 480 525 écoliers ont été formés depuis 2007.
Il nous est proposé, en conséquence, de conditionner l’obtention du diplôme national du brevet par le suivi d’une formation aux premiers secours de dix heures dispensée dans le cadre scolaire.
Si l’école semble propice à cet apprentissage, les modalités proposées ne sont pas sans faire naître quelques inquiétudes.
Il n’a tout d’abord pas été véritablement répondu à notre préoccupation de garantir la fonction éducative de cette formation. On s’est contenté de nous préciser que cette dimension ne faisait pas de doute puisqu’il s’agissait « d’acquérir des compétences dans le cadre scolaire, en présence d’enseignants ». Connaissant la réalité de la formation de ces derniers depuis la réforme imposée par le Gouvernement et leur difficulté à assurer leur mission dans le contexte de démolition du service public d’éducation dicté par les forces libérales, une telle assertion n’est pas pour nous rassurer.
L’obtention du brevet dépend déjà, depuis 2008, de celles du B2I, le brevet informatique et internet, et du niveau A2 du « cadre européen commun de référence pour les langues » dans une langue vivante. Nous nous interrogeons donc fortement sur le fait de la conditionner par une nouvelle épreuve de formation aux premiers secours.
Sans revenir sur les raisons qui ont fondé notre opposition à la proposition de loi relative au service civique soutenue par le Gouvernement, nous soulignons aujourd’hui les limites qu’il y aurait à confier cette formation à des volontaires du service civique. L’article L. 312-13-1 du code de l’éducation précise d’ailleurs que « cette formation ne peut être assurée que par des organismes habilités ou des associations agréées ». Or vous n’avez pas fait la preuve que ces volontaires pourront être assimilés à de tels organismes. La question de la responsabilité des formateurs et des élèves amenés à pratiquer ces gestes reste donc entière.
Il est proposé que ces missions soient effectuées dans le cadre de conventions passées entre les services départementaux et les conseils généraux. Mais puisque M. Féron, le rapporteur de la proposition de loi, a lui-même précisé qu’« aucun SDIS ne sera contraint de contribuer au dispositif », il est à craindre une application différenciée sur l’ensemble du territoire.
Pour notre part, nous préconiserions plutôt de renforcer les partenariats entre les organismes habilités et l’éducation nationale. Mais le Gouvernement n’est apparemment pas prêt à en supporter le coût puisque le ministre de l’éducation nationale s’est borné à se féliciter de la tranquille « montée en puissance » de l’existant au lieu de défendre cette « idée généreuse », ainsi qu’il l’a lui-même qualifiée. Nous déplorons la faible ambition au regard des enjeux majeurs qui sont posés tant au plan éducatif qu’en matière de santé publique.
Enfin, ce texte nous semble maladroit dans le contexte du malaise persistant aujourd’hui dans les SDIS, soumis à la révision générale des politiques publiques. En organisant un peu plus les dérogations au droit du travail, la loi du 20 juillet 2011 relative à l’engagement des sapeurs-pompiers volontaires et à son cadre juridique n’a visiblement pas contredit la logique de la RGPP.
Parce que les questions soulevées par ce texte méritent de meilleures réponses, et parce que le dispositif proposé nous semble pour l’heure insuffisamment ajusté, les députés communistes, républicains et du parti de gauche s’abstiendront sur cette proposition de loi. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.)

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Marie-Hélène
Amiable

Députée des Hauts-de-Seine (11ème circonscription)

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