Je l’ai dit lors de la discussion générale, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera en faveur de ce projet de loi constitutionnelle, et ce, en pleine connaissance de cause.
Il s’inscrit dans la continuité des propositions de la convention citoyenne pour le climat. Certes, nous pourrions encore débattre longuement de la portée normative de ce texte ; il reste qu’inscrire la protection de l’environnement et la lutte contre les dérèglements climatiques à l’article 1er de la Constitution est une avancée politique. Nous y voyons un appel pressant à ce que l’urgence climatique soit élevée au niveau d’exigence nécessaire et irrigue enfin l’ensemble des politiques publiques.
Nous avions proposé au cours des débats de reprendre la proposition de modification du préambule de la Constitution, bien vite rejetée par le chef de l’État en juin dernier. Quel était l’enjeu de cette modification ? Tout simplement de mettre fin à l’exercice abusif du droit de propriété et de la liberté d’entreprendre, qui constituent de puissants leviers, et en même temps, des obstacles à la reconnaissance des biens communs. Le terrible exemple des brevets des vaccins est d’actualité pour le démontrer dans le champ de la santé. En la circonstance, il s’agissait d’affirmer que le droit de propriété ne pouvait plus être le droit de détruire et de dégrader l’environnement, que la liberté d’entreprendre n’était pas la liberté de nuire au patrimoine commun de l’humanité.
Nous comprenons, dans le débat politique, que les libéraux ne veuillent pas s’engager sur ce terrain. Mais le débat sur les biens communs est nécessaire, indispensable et contemporain ; il devrait nous inviter à reconsidérer les politiques de privatisation de secteurs socialement et écologiquement stratégiques, tels que ceux de l’eau ou de l’énergie.
Bien évidemment, vous avez refusé d’autres propositions, telles que l’inscription du principe de non-régression. Nous comprenons vos réticences, après l’épisode des néonicotinoïdes. Cependant, la rigidité dont vous avez fait preuve lors des débats et votre refus d’adopter tout amendement traduisent selon nous la volonté de vous en tenir à un texte, mais surtout à un débat le plus étroit possible et le plus déconnecté des réalités. Quelques passes d’armes avec certains de nos collègues – je pense à François Ruffin – l’ont démontré.
L’enjeu pour votre majorité est aussi, disons-le, d’user du terrain écologique pour essayer de faire progresser une démarche de référendum et un plébiscite pour le Président. Si nul n’est dupe de la man ?uvre politique, la question majeure qui intéresse les Français demeure de savoir quelles suites opérationnelles vous entendez réserver à cette réforme de la Constitution.
Eh bien, l’examen en commission spéciale de la loi portant lutte contre le dérèglement climatique semble donner le ton : selon nous, c’est une loi brouillonne, qui multiplie les mesures d’ajustement et les dispositions accessoires. Elle ne traduit aucune ambition réelle, faute de s’inscrire dans une perspective de transformation économique, écologique et sociale à long terme.
Vous prétendez concilier la préservation de l’environnement avec la logique de l’autorégulation des marchés. Sans l’affirmer explicitement, votre credo est que la concurrence libre et non faussée finira d’elle-même par faire de l’écologie une opportunité économique majeure pour l’économie de marché, le rôle de l’État ne consistant qu’à accompagner ce mouvement, en évitant de trop dépenser et de faire peser des obligations de résultat sur les grandes entreprises.
Monsieur le garde des sceaux, les déboires du PDG de Danone devraient pourtant vous ouvrir les yeux : les dividendes et les cours de bourse, toujours à la hausse, demeurent et demeureront encore longtemps l’unique boussole de ceux pour qui la responsabilité sociale et sociétale n’est que de la publicité mensongère. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR. – M. François Ruffin applaudit également.)