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Explications de vote et scrutins

Aménagement du Rhône

Alors que la Commission européenne avait adressé à la France il y a deux ans une nouvelle mise en demeure pour obtenir, dans le cadre du renouvellement des concessions, l’ouverture à la concurrence de nos installations hydroélectriques, nous avions été, en avril 2019, à l’initiative d’une proposition de résolution européenne pour l’avenir du secteur. Signé par plus d’une centaine de députés de tous bords, ce texte invitait le Gouvernement à se rapprocher de ses partenaires européens en vue d’exclure explicitement le secteur hydroélectrique du champ des directives européennes sur les services dans le marché intérieur et l’attribution de contrats de concession. Nous y rejetions comme dangereuse et irrationnelle l’ouverture à la concurrence de ce secteur stratégique sur les plans économique, social et environnemental, qui s’adosse à un patrimoine financé de longue date par les Français et conservé en excellent état. Nous prenions fait et cause pour nos opérateurs historiques – la Compagnie nationale du Rhône mais aussi EDF ou la Société hydroélectrique du Midi – s’agissant de l’exploitation de nos ouvrages électriques.

Nous estimons en effet, comme une majorité de nos citoyens et de très nombreux élus de nos territoires, que l’hydroélectricité dépasse de très loin le seul cadre de la production d’énergie et recouvre de multiples enjeux, qu’il s’agisse des questions environnementales ou de l’importance du service public. Ce dernier est en effet incontournable dans un secteur qui met en jeu les différents usages de la ressource en eau et dont les barrages jouent un véritable rôle dans nos territoires en matière d’irrigation agricole, de fourniture d’eau potable, de soutien d’étiage ou de tourisme.

La pluralité des missions de la société anonyme d’intérêt général Compagnie nationale du Rhône est une illustration du bien-fondé d’une approche guidée par l’intérêt général.

Comme je le soulignais en commission, le premier mérite du texte que nous examinons est de garantir la maîtrise publique de ce formidable outil qu’est la Compagnie nationale du Rhône en évitant une fragmentation, un éclatement entre les trois objets d’une gestion aujourd’hui unifiée – les ouvrages hydroélectriques, les infrastructures de transport fluvial et les installations portuaires, répartis sur 27 000 hectares de domaine public qui permettent une valorisation économique favorable à l’agriculture et à l’accompagnement des projets de territoire.

Son deuxième mérite est de mettre en exergue le caractère indispensable des opérateurs historiques tels que la Compagnie nationale du Rhône. Ils sont en effet les seuls à même d’offrir des garanties suffisantes en matière de gestion des risques, de soutien à l’économie et à l’emploi et de prise en considération effective de la diversité des usages de la ressource en eau. Ils sont aussi les seuls à pouvoir s’inscrire dans des logiques de long terme et à conduire les investissements nécessaires pour accroître nos capacités en énergie – hydroélectrique en particulier – dans le respect de l’environnement.

Les projets inclus dans le texte en sont la démonstration, ne serait-ce que la construction de petites centrales hydroélectriques – pour 1,6 % de production en plus – ou l’augmentation des capacités de production de l’aménagement hydroélectrique de Montélimar.

Le troisième mérite du texte est de permettre à la Compagnie nationale du Rhône de poursuivre la réalisation de ses missions d’intérêt général en faveur du développement de la vallée du Rhône tout en lui donnant les moyens d’affronter les défis qui l’attendent en matière d’anticipation et de gestion des conséquences du réchauffement climatique ainsi que de reconquête de la biodiversité, en concertation étroite avec les élus locaux, comme vous l’avez très bien montré dans votre présentation, monsieur le rapporteur.

On l’a souligné en commission, la Compagnie nationale du Rhône est un outil exemplaire en ce qu’il permet de gérer l’ensemble des enjeux, qu’ils soient énergétiques, économiques ou environnementaux, tout au long du Rhône et au sein d’un même organisme – je m’exprime avec beaucoup moins de poésie que vous parce que je ne suis pas rhodanien mais auvergnat, monsieur le rapporteur. (Sourires.) Cette compagnie illustre la pertinence d’une approche intégrée, sous maîtrise publique, des enjeux liés à l’eau dans la multiplicité de ses usages : cela doit nous alerter sur le caractère impraticable et dangereux d’une ouverture à la concurrence qui aboutirait à démanteler de tels outils qui, au contraire, ont vocation à se multiplier.

Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera donc en faveur du présent texte, en espérant que la réussite du modèle de la CNR dessillera les yeux des tenants du démantèlement de notre système hydroélectrique – mais je me doute bien qu’après ce vote, chacun aura compris qu’il ne s’agit pas de suivre cette voie. (Applaudissements sur les bancs du groupe LT ainsi que sur quelques bancs des groupes LaREM et Dem.)

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André
Chassaigne

Président de groupe
Député du Puy-de-Dôme (5ème circonscription)

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