Ma question porte aussi sur la gratuité et le remboursement des masques, et je regrette que vous n’ayez pas répondu à celle de collègue Elsa Faucillon.
Nous allons discuter des masques jusqu’à la fin de l’après-midi. Je rappelle pour ma part que, dans un rapport parlementaire de 2005, des experts prédisaient déjà que des pandémies ne manqueraient pas de survenir, et de plus en plus souvent. Dès lors, ils estimaient que le port du masque, bien que coûteux, serait un outil de protection efficace pour la population, en précisant : « La mise à disposition de masques en nombre suffisant aurait certainement un coût très élevé mais, en même temps, aiderait à limiter la paralysie du pays. »
Je sais bien qu’à l’époque de ce rapport, ni vous, monsieur le ministre, ni moi n’étions chargés de ce dossier, et que de nombreux ministres de la santé se sont succédé depuis lors. Malheureusement, le problème des masques et de leur production reste d’actualité.
Sans faire de procès d’intention mais en me plaçant sur un terrain politique, je note que ce problème de masques est une réalité et qu’il faut en être conscient, surtout lorsque le Président de la République dit que « le jour d’après […] ne sera pas un retour au jour d’avant ». Vous répondez que vous essayez de faire au mieux ; nous demandons encore mieux que ce mieux. Au cas où la pandémie durerait – il faudrait alors vivre avec – et où il manquerait de nouveau des masques, il est important que nous puissions savoir si des dispositions seront prises en matière de stockage, et lesquelles, et que vous nous apportiez des précisions concernant la production. La question de la gratuité des masques est également importante car c’est un problème de santé publique. J’en profite d’ailleurs pour signaler qu’elle fera l’objet d’une proposition du groupe communiste.
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre.
M. Olivier Véran, ministre. Concernant l’accès aux masques, comme l’a dit Mme Pannier-Runacher, 5 millions d’entre eux sont distribués au public précaire par le biais des CCAS et 100 millions de masques sont déstockés et distribués gratuitement chaque semaine à l’ensemble des soignants, à partir du stock d’État provenant des 3 milliards d’exemplaires commandés en Chine.
Une réflexion est menée et se trouve à un stade avancé, concernant la prise en charge par l’assurance maladie de masques de protection destinés à certains publics, notamment les bénéficiaires de la CMU – la couverture maladie universelle – ou de l’ASS – l’allocation spécifique de solidarité –, afin de renforcer encore le niveau de protection.
Vous m’avez également interrogé sur la doctrine en matière de gestion future des masques et des stocks. Nous allons revoir tout ça. Comme vous pouvez l’imaginer, nous n’allons pas repartir comme avant en prétendant que le problème est derrière nous. Croyez-moi : la première décision que nous prendrons après la crise sera de nous préparer à l’éventualité d’une nouvelle crise.
Il y aura un stock d’État. Cette fois, on ne trouvera personne pour critiquer le ministre qui décidera de conserver un stock d’État massif de masques. Je rappelle simplement que la première ministre à avoir pris une telle décision a été moquée très fortement, pendant des semaines et même des mois.
Il s’agit de Roselyne Bachelot, à qui je rends d’ailleurs hommage car elle a été la première à dire qu’il fallait constituer un stock de masques important alors qu’on entendait dire, dans les médias, que c’était une dépense inutile, une gabegie.
Avec un peu de recul, ces faits doivent inciter à la modestie et peut-être à éviter, madame Faucillon, d’asséner certains propos dans un débat parlementaire. L’histoire jugera.
Concernant la doctrine du port du masque par la population générale, on peut refaire l’histoire cent fois – c’est d’ailleurs ce qui va arriver – mais, au moment où je vous parle, dans certains pays européens, le port du masque n’est pas recommandé par la population générale, voire pas recommandé du tout. Des études sont actuellement menées pour savoir si, oui ou non, c’est un outil efficace. L’OMS – l’Organisation mondiale de la santé – se montre prudente en indiquant que, si vous vous croyez en sécurité avec le masque et que cela vous incite à ne plus appliquer les gestes barrières, cela risque d’être pire que tout. Nous disposerons d’éléments scientifiques.
Nous avons pris les devants pour ne pas être pris en défaut si le port du masque par la population générale s’avérait vraiment utile face à l’épidémie coronavirus. Nous aurons l’occasion d’en reparler. D’ici là, prudence : l’histoire a donné bien des leçons, notamment aux donneurs de leçons.