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Débat sur les conséquences de la réforme de l’assurance chômage

2ème volet de la réforme de l’assurance chômage et territoire « zéro chômeurs »

Le premier volet de la réforme de l’assurance chômage est entré en vigueur le 1er novembre dernier. Nous nous étions fait l’écho de la prévision évaluant à 450 000 le nombre de personnes qui seraient privées de droits. C’était sans compter les effets de la crise sanitaire, durant laquelle le durcissement des conditions d’accès aux droits, cumulé à l’arrêt des recrutements, expose les travailleurs précaires à un effet de ciseau.

Dès la fin du premier trimestre de cette année, l’emploi salarié avait chuté de 2,3 %, soit une destruction de près de 455 000 emplois. L’emploi intérimaire est particulièrement touché, avec une baisse de 37 % par rapport à 2019, soit près de 300 000 emplois. Or le premier volet de votre réforme pénalise particulièrement les employés précaires. De nombreux salariés de l’hôtellerie, de la restauration, du tourisme, du secteur de l’animation et des arts ou encore de certaines industries attendent toujours des contrats : le taux d’emploi connaît ainsi son plus bas niveau depuis 2009.

Au regard de ces constats, plusieurs questions se posent.

Allez-vous non seulement surseoir à l’application du deuxième volet de la réforme de l’assurance chômage, prévue au 1er septembre 2020, mais également revenir sur le mode de calcul de l’ouverture des droits à l’indemnisation initié par le premier volet ? Il faudrait alors ouvrir des négociations avec les organisations syndicales : vous avez annoncé des discussions, mais encore faut-il qu’elles posent le problème global de l’assurance chômage.

Prendrez-vous en compte la revendication, portée par certains, d’un prolongement exceptionnel de douze mois des droits ouverts, au regard de l’état de l’emploi dû aux conséquences dramatiques de la crise sanitaire sur différents secteurs d’activité ?

Enfin, allez-vous poursuivre l’expérimentation des « territoires zéro chômeur de longue durée » et confirmer l’extension du dispositif à de nouvelles zones, comme vous l’aviez annoncé lors du comité interministériel aux ruralités du 20 février dernier ? (Mme Laurence Dumont et M. Alain Bruneel applaudissent.)

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Muriel Pénicaud, ministre. Vos questions, complètes et riches, montrent à quel point la discussion qui s’engage avec les partenaires sociaux est nécessaire. Il y a plusieurs registres.

S’agissant du principe même de la réforme, il faut être attentif, me semble-t-il, à bien tenir compte de la réalité et de l’intégralité de celle-ci. Par exemple, elle a permis à des démissionnaires quittant une entreprise pour créer la leur ou à des travailleurs indépendants – agriculteurs, artisans, commerçants – d’être éligibles à l’assurance chômage. Je crains, malheureusement, que cela ne soit très utile.
Elle a aussi permis de renforcer considérablement les moyens de Pôle emploi, au profit d’un accompagnement renforcé des demandeurs d’emploi, avec deux demi-journées d’accompagnement intensif dès les deux premiers mois, ce qui n’était pas encore le cas. Elle a également permis de développer l’accompagnement des entreprises, afin de le rapprocher des offres de terrain.

J’espère que nous sommes au moins tous d’accord qu’il s’agit là d’apports de la réforme de l’assurance chômage. Non seulement la crise que nous vivons ne les remet pas en cause, mais elle renforce leur pertinence.

J’en viens aux sujets que vous avez évoqués à juste titre. Le recul de l’intérim et de l’emploi précaire n’obéissent pas aujourd’hui à de bonnes raisons : ils s’expliquent par le fait qu’ils sont la première variable d’ajustement en cas de crise. La façon d’accompagner ceux qui occupent un emploi précaire et de les protéger fait partie des sujets abordés dans le cadre non seulement de la réforme de l’assurance chômage, mais aussi de la relance de l’emploi à laquelle nous devons procéder.

S’agissant de l’ouverture des droits, elle fait partie des sujets dont nous débattrons avec les partenaires sociaux. Faut-il ou non modifier les conditions d’accès à l’assurance chômage, donc à l’ouverture des droits ? Je ne peux pas préjuger des discussions à venir, ni des décisions que nous prendrons, mais il va de soi que le sujet sera abordé.

Vous avez enfin soulevé la question des territoires zéro chômeur de longue durée. Je m’y étais engagée. Nous sommes favorables à la prolongation et à l’extension de cette expérimentation, dans des conditions dont il faudra débattre au Parlement. Je rappelle que la loi du 29 février 2016 ne permet pas d’étendre le nombre d’expérimentations en l’absence d’une loi complémentaire.

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