Interventions

Evaluation et contrôle du Gouvernement

Question sur les zones de non traitement

Je reviendrai sur mon inquiétude initiale face à l’inscription dans la loi EGALIM, la loi no] 2018-938 du 30 octobre 2018 pour l’équilibre des relations commerciales dans le secteur agricole et alimentaire et une alimentation saine, durable et accessible à tous, des dispositions relatives aux ZNT. Nous allions nous enferrer dans une bataille juridique opposant les agriculteurs et les riverains, sans pour autant apporter de solution équilibrée aux problèmes de fond liés à l’utilisation des produits phytosanitaires. Nous y sommes aujourd’hui, cheminant vers un énième renvoi des mesures réglementaire, la patate chaude étant confiée à l’ANSES, après les arbitrages successifs du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État. Notre débat ne peut que refléter les oppositions sur l’appréciation et la portée juridique de la loi, des nouveaux décrets et des arrêtés ministériels qui en découlent.

Si je comprends à la fois la sensibilité du monde agricole devant des contraintes supplémentaires et celle des habitants et de la société civile, qui attendent plus de protection, la problématique essentielle demeure exclue – celle des moyens que nous mettons en œuvre pour accompagner la transformation agroécologique globale de l’ensemble des systèmes agricoles. En nous focalisant sur les conséquences après autorisation de mise sur le marché des produits phyto, comme vous l’avez dit tout à l’heure, nous continuons à prendre le problème à l’envers, avec toutes les stigmatisations et dérives possibles, tout en évacuant les enjeux de fond qui surdéterminent l’usage de ces produits, l’intégration des agriculteurs dans une chaîne de production, avec leur dépendance socio-économique et technique, le niveau des prix d’achat des productions, qui conditionne les rendements et conditionne par conséquent l’usage des phyto.

Face à une PAC sans réelle ambition agroécologique et un plan stratégique national qui essaie de ne fâcher personne tout en essayant de tirer parti au maximum des outils financements offerts, comment reparler vraiment des objectifs et des orientations structurels de notre politique – car c’est bien là le fond du problème ?

Mme la présidente.

La parole est à M. le ministre.

M. Julien Denormandie, ministre.

Monsieur le président Chassaigne, je connais votre engagement et je crois que nous avons beaucoup de choses en commun, mais je ne peux pas vous laisser dire qu’il n’y a pas, dans cette nouvelle politique agricole commune, une vision très fortement engagée. Je pourrais vous en donner de très nombreux exemples : qu’il s’agisse des protéines, des haies, que nous défendons avec force, de ces mesures agroenvironnementales, du plan d’augmentation de 30 %, de l’installation en bio ou des nouvelles conditionnalités, on y trouve une véritable vision, mais une vision avec une méthode. En effet, pour pouvoir effectuer une transition, il faut pouvoir investir, et pour pouvoir investir, il faut consolider le revenu, car jamais personne ne peut investir s’il n’y a pas un revenu en face.

Le deuxième élément, qui doit nous interroger et dont je sais qu’il vous a interpellé, c’est que, si la politique agricole commune n’est pas mise en œuvre au niveau européen avec la méthode et le pragmatisme que j’ai défendus dans le plan stratégique national français, cela pourrait se traduire par une réduction de 13 % de notre production et une augmentation de 20 % de nos importations. C’est un non-sens, car ces importations sont beaucoup moins bien-disantes d’un point de vue environnemental car, aujourd’hui, il n’y a pas de frontières à l’environnement. Notre souveraineté agroalimentaire est absolument impérieuse et l’Europe a d’ailleurs dans le monde un rôle nourricier.

On voit donc bien que nous devons réussir à remettre de la raison et de la science dans ce débat. C’est cependant très difficile. Parfois, en effet – et nous en avons parlé à propos du glyphosate, sur lequel je connais votre position courageuse –, on voit parfois s’opposer certains objectifs – environnementaux, nourriciers ou liés aux territoires. Il faut avoir le courage d’affronter cette complexité. C’est avec une vision et avec ce courage que nous ferons avancer les choses.

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