Contre-partie en matière d’emploi aux aides publiques
Depuis le début de la crise sanitaire, le Gouvernement a déployé plusieurs dispositifs visant à soutenir financièrement les entreprises : activité partielle pour un montant de 27 milliards d’euros en 2020, fonds de solidarité pour un montant de 17 milliards d’euros, prêts garantis aux entreprises.
Si ces aides publiques étaient justifiées au regard du choc économique entraîné par l’arrêt brutal de certaines activités, elles n’ont pas été accompagnées d’exigences en matière de préservation de l’emploi. Le déploiement des PGE – prêts garantis par l’État – auprès des grands groupes témoigne de l’absurdité de cette politique qui consiste à déverser des milliards d’euros sans exiger de contreparties sociales. Ainsi, malgré des aides publiques massives, depuis plusieurs mois, les plans sociaux se multiplient.
Renault qui a touché 5 milliards d’euros de PGE a présenté, dès mai 2020, un plan d’économies prévoyant 4 600 suppressions de postes en France et 15 000 dans le monde. De même, Air France qui a perçu 7 milliards d’euros de soutien financier de la part de la puissance publique prévoit la suppression de 7 500 postes d’ici à 2022. Le groupe Accor qui a perçu 500 millions d’euros de prêts par l’État a fait savoir mi-janvier qu’il envisageait de supprimer 1 900 emplois en Europe, dont 770 en France. Dernier exemple entre beaucoup d’autres : le groupe Galeries Lafayette a présenté un plan de départs volontaires à la fin de l’année 2020.
Dès le début de la crise, nous avions exigé que les aides publiques soient conditionnées socialement et écologiquement, et que leur utilisation soit contrôlée. Les chiffres de suppression d’emplois que je viens d’évoquer nous donnent raison. Il faut que ces pratiques indécentes cessent car elles alimentent une forme d’impunité. Madame la secrétaire d’État, le Gouvernement a le devoir d’agir. Quelles actions met-il en œuvre pour faire cesser ces abus ?
Mme la présidente.
La parole est à Mme la secrétaire d’État.
Mme Sarah El Haïry, secrétaire d’État.
Je sais à quel point vous êtes engagé sur la question de la conditionnalité sociale, économique et territoriale des aides versées aux entreprises. Je crois que nous partageons un point d’accord : il fallait être à la hauteur de la situation, et protéger d’abord les travailleurs, c’est-à-dire les femmes et les hommes, sans tomber dans l’iniquité, mais en nous concentrant sur eux en priorité.
Le temps est désormais venu d’aller plus loin, d’assurer l’égalité salariale, de protéger les plus fragiles des entreprises, d’encourager le dialogue social et de conditionner les aides. C’est pourquoi la ministre du travail entend mobiliser, entre autres dispositifs, l’activité partielle de longue durée, en l’assortissant de conditionnalités et en incitant les entreprises à rendre publiques les aides perçues en les communiquant aux CSE. Nous croyons en effet au dialogue social au sein des entreprises – comme vous, me semble-t-il.
Évidemment, nous ne nous habituerons jamais à ce que des emplois disparaissent ou à ce que des salariés soient mis en difficulté. La priorité absolue est bien la sauvegarde des emplois. Les entreprises ont certes été aidées de manière inégale en fonction de leur situation, mais l’objectif est toujours resté le même : protéger un maximum de salariés. Depuis quinze mois, l’activité économique de la France a chuté de près de 10 % et nous avons perdu – c’est déjà beaucoup trop – plus de 240 000 emplois privés. Par comparaison, plus de 480 000 emplois avaient été détruits lors de la crise de 2008-2009.
La protection des emplois doit se poursuivre. Il faut maintenant y adjoindre les composantes sociales et environnementales auxquelles nous sommes attachés et que, je le crois, chacun ici, quel que soit le banc sur lequel il siège, défend comme autant d’éléments de notre modèle social.
Les PGE ne donnent pas lieu à des versements de dividendes, monsieur le député. Qu’il s’agisse de Renault ou d’Accor, l’objectif est évidemment de sauver des emplois grâce aux négociations en cours sur l’activité partielle de longue durée : c’est la priorité des équipes concernées. Je sais la ministre du travail pleinement mobilisée et engagée personnellement sur ces dossiers.