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Evaluation et contrôle du Gouvernement

Débat sur rapport d’information sur le bilan de la loi de programmation militaire 2019-2025

QUESTION

Ce débat sur la loi de programmation militaire pour les années 2019 à 2025 nous permet de nous interroger sur la dissuasion militaire française, le positionnement de la France dans l’Indo-Pacifique et en Amérique et l’échec du réinvestissement dans les petits équipements militaires.

Vous le savez, les députés du groupe de la Gauche démocrate et républicaine sont opposés au modèle d’armée actuel qui ne tient que grâce à la clé de voûte nucléaire – M. Fabien Roussel vient de le rappeler à la tribune. Ce modèle coûte cher et son utilité est remise en cause à l’heure où la Russie s’est servie de son arme nucléaire, non pas en l’activant, mais pour empêcher une réaction militaire des alliés de l’Ukraine face à la sale guerre qu’elle mène dans ce pays. Nous avions critiqué très fortement la forte augmentation du budget du nucléaire militaire, qui aura coûté aux Français 14,6 millions d’euros par jour depuis le vote de cette loi.

D’autre part, le bilan de la LPM est en demi-teinte s’agissant de la protection de nos zones économiques exclusives (ZEE). Malgré une stratégie présentée en 2019, l’engagement militaire est très en deçà des besoins.
Enfin, comme l’a rappelé André Chassaigne dans le rapport d’information, rédigé avec Jean-Pierre Cubertafon, sur la politique d’approvisionnement du ministère des armées en « petits » équipements, ces derniers continuent de faire l’objet d’un sous-investissement chronique alors qu’ils ont un impact très important sur le moral des soldats et leur efficacité au combat. La guerre en Ukraine, telle qu’elle est menée, montre que la LPM, qui se voulait « à hauteur d’homme », a totalement manqué sa cible.

Première question : pourquoi avoir investi dans le nucléaire militaire en violation du traité sur la non-prolifération des armes nucléaires ? Deuxième question : pourquoi n’avoir toujours pas amélioré la protection des zones économiques exclusives dans l’Indo-Pacifique et dans les Caraïbes ? Troisième question : pourquoi, dans le cadre du financement du plan France relance, avoir annulé 202 millions d’euros du programme Équipement des forces alors qu’il était prioritaire dans cette LPM ?

Mme la présidente

M. Sébastien Lecornu, ministre

Je vous trouve sévère ! Vous prétendez que notre modèle ne tient que grâce à la clé de voûte nucléaire. L’opération Sagittaire, menée il y a seulement dix jours et qui a permis à la France d’être le premier pays à évacuer de Khartoum ses ressortissants, et d’autres Européens, a démontré que nous disposions d’une armée expéditionnaire réactive et endurante, au-delà même de la lutte contre le terrorisme et des missions de réassurance sur le flanc est de l’Otan. Ce malheureux cas pratique – je m’excuse de cette expression, sans doute mal choisie – montre bien que l’action de l’armée française ne peut être résumée aux seules missions de dissuasion nucléaire.

Oui, mais j’aimerais aussi que vous compreniez le mien. Par ailleurs, vous jugez durement la manière dont nous protégeons les zones économiques exclusives en outre-mer. Un travail remarquable a été fourni en la matière par la marine nationale et l’armée de l’air ; la situation n’est plus la même grâce à la loi de programmation militaire en vigueur.

Jeune secrétaire d’État à l’écologie ou ministre des outre-mer, j’ai eu à traiter les questions de pêche illégale en ZEE calédonienne ou polynésienne. Si vous le souhaitez, je pourrai vous fournir des informations plus détaillées mais l’imagerie spatiale permet désormais de défendre et de protéger nos ZEE, au prix d’un effort important de la marine nationale et de l’armée de l’air. Nous tenterons de rendre cet effort plus soutenable dans les années qui viennent, grâce aux drones, à l’imagerie spatiale et aux nouvelles technologies. C’est un enjeu important.
Je suis un fervent militant de la dissuasion nucléaire, mais je vous remercie de ne pas avancer masqué – c’est ce que j’apprécie au sein du groupe communiste ! Depuis toujours, votre opinion est connue et vous avez le mérite de la cohérence. Pendant les débats sur le projet de loi de programmation militaire, je m’efforcerai, comme Pierre Messmer en 1960 avec vos prédécesseurs, députés communistes – qui suivaient alors peut-être les instructions de Moscou (Sourires) quand vous vous exprimez librement –de vous démontrer à quel point notre dissuasion nucléaire est défensive, suffisante et proportionnée et pourquoi il faut la protéger et investir pour elle.

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