QUESTION A LA MINISTRE
L’aide sociale à l’enfance est, hélas ! en souffrance, notamment dans la prise en charge des mineurs non accompagnés. Or le Conseil d’État a jugé, en 2019, que le refus d’assurer dans les plus brefs délais un accueil d’urgence de ces mineurs constituait une carence caractérisée des autorités de chaque département. Je regrette que certains hommes et femmes politiques prennent prétexte de la nationalité de ces jeunes pour justifier que l’État ne leur vienne pas en aide, alors qu’ils sont avant tout des enfants en danger qui ont besoin d’être protégés.
Aussi, je m’interroge sur les initiatives que vous avez prises, au nom de l’État, afin d’imposer le respect de la loi aux collectivités qui s’en affranchissent et choisissent de laisser ces enfants à l’abandon. N’y aurait-il pas là matière à renforcer les contrôles et à faire respecter les obligations ?
Les contrats jeune majeur concernent 10 % des personnes suivies, soit environ 35 000 jeunes âgés de 18 à 21 ans. On comprend mal pourquoi les jeunes étrangers présents sur notre sol ne pourraient pas bénéficier de ces contrats. La loi pour contrôler l’immigration, améliorer l’intégration du 27 janvier 2024 a supprimé l’obligation de prendre en charge dans ce cadre ceux qui font l’objet d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF). Pourtant, le rapport de la Cour des comptes de janvier dernier souligne que le très grand nombre de procédures enclenchées « engorge les préfectures », qui « délivrent parfois des OQTF à des personnes insérées dans la société » ou qui « ne peuvent pas être éloignées », par exemple les ressortissants des pays en guerre. Comptez-vous mettre fin à cette discrimination en ouvrant les contrats jeune majeur aux mineurs non accompagnés, qui ont souvent la volonté de s’intégrer dans notre société ?
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre déléguée.
Mme Sarah El Haïry, ministre déléguée
Ce qui est certain, c’est qu’un enfant doit être accueilli et protégé, quelle que soit sa nationalité. Nous devons aux mineurs non accompagnés le même accueil et le même accompagnement qu’aux autres. Certes, la loi « immigration » supprime l’obligation pour les départements de prendre en charge, dans le cadre d’un contrat jeune majeur, les jeunes sous OQTF. Mais les présidents de conseil départemental conservent la possibilité de le faire.
Par ailleurs, je serai au rendez-vous de l’accompagnement des départements qui veulent s’investir pour trouver des solutions. Quant à ceux qui ne le souhaitent pas ou qui défendent des positions politiques en la matière, une instruction, en cours de rédaction, sera adressée aux préfets pour rappeler que la France est un État de droit et qu’il est le même pour tout le monde : on ne pioche pas dans le droit en fonction de ce que l’on veut faire. Nous favoriserons donc les déférés contre les délibérations des conseils départementaux qui n’accueillent pas de MNA dont la minorité a été reconnue : parce que ces derniers sont des enfants, ils doivent être accueillis et protégés. Il arrive, m’a-t-on rapporté, que personne ne soit là pour accueillir à la gare des mineurs qui descendent de leur train. Je ne suis pas naïve. Les déférés engageront la responsabilité des départements devant les tribunaux administratifs.