Interventions

Evaluation et contrôle du Gouvernement

Débat sur le thème « La répression du mouvement social contre la réforme des retraites »

DISCUSSION GENERALE

En préambule, j’aimerais, pour prévenir tout amalgame, rappeler la position de notre groupe, qui s’oppose à la violence sous toutes ses formes et la condamne.

La réforme des retraites, élaborée sans réelle négociation avec les partenaires sociaux ni dialogue avec les forces politiques, et présentée dans des délais contraints qui ont empêché tout débat serein et approfondi, cristallise légitimement une opposition massive de la population, une contestation unitaire des syndicats et un large rejet de la part des oppositions.

Refusant le dialogue et rejetant tout esprit d’ouverture, ayant menti à défaut de convaincre, vous avez décidé d’adopter cette réforme à marche forcée, en recourant à l’article 49.3 de la Constitution, le 16 mars dernier.

Depuis cette date et ce déni de démocratie, les rassemblements spontanés, les blocages, les grèves et les manifestations pacifiques et massives se sont renforcés. Le peuple français exprime ainsi une colère profonde, légitime. Il exprime aussi une soif de justice sociale et de respect.

Face à ce grand mouvement populaire, à une crise démocratique et sociale, nous vous avons appelés à maintes reprises à reconnaître la légitimité sociale de la rue en retirant votre réforme et en consultant le peuple par référendum. Vous avez choisi de répondre par l’intransigeance, le mépris et la répression violente des mouvements sociaux : interpellations massives, détentions abusives, gaz lacrymogènes, matraquages aveugles, usage de LBD, interventions brutales et disproportionnées au mépris des libertés fondamentales.

Face à ces violences policières, le ministre de l’intérieur aurait dû rappeler les forces de l’ordre à leur devoir d’exemplarité. Loin de procéder à ce rappel à l’ordre, l’exécutif a laissé faire et a menti en affirmant que la participation à une manifestation non déclarée constitue un délit. Des mises en garde vous ont pourtant été adressées par les organisations internationales, les institutions nationales et constitutionnelles indépendantes, les ONG, les associations de défense des droits de l’homme, les syndicats de magistrats et d’avocats.

La France est pointée du doigt par la communauté internationale pour les méthodes violentes employées dans sa gestion du maintien de l’ordre. La commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe s’est alarmée de l’« usage excessif de la force » contre les manifestants. Le rapporteur spécial de l’Organisation des Nations unies sur les droits à la liberté de réunion pacifique et à la liberté d’association a déclaré suivre de « très près les manifestations en cours et [a rappelé] que les manifestations pacifiques sont un droit fondamental ».

La Défenseure des droits a indiqué avoir enregistré 115 saisines depuis le début de la mobilisation contre la réforme des retraites. Elle dénonce « des images excessivement choquantes et des propos inadmissibles » de la part de policiers, notamment de membres des Brav-M, les brigades motocyclistes de répression de l’action violente. La répression physique exercée contre les manifestants a également suscité l’inquiétude de la Commission nationale consultative des droits de l’homme, qui mentionne des gardes à vue abusives décidées « de manière sommaire et arbitraire ».

Nous souhaitons vous rappeler solennellement que la première mission des forces de l’ordre consiste à protéger les citoyens et les droits de l’homme et qu’un strict équilibre doit être respecté entre les exigences de paix civile et de sécurité publique. Nous appelons donc le Gouvernement à rétablir une doctrine française du maintien de l’ordre. L’escalade de la violence doit cesser ; l’ordre public, constitutif de l’État de droit, doit permettre de conforter les libertés fondamentales, non de les réduire.

Alors que les policiers sont épuisés, que nos concitoyens ont peur de manifester, il faut sortir d’une gestion frontale du maintien de l’ordre et adopter une stratégie qui assure le respect de la liberté de manifester et de la liberté d’association. N’est-ce pas le seul moyen de restaurer le lien de confiance entre la population et les forces de l’ordre et de ne pas fragiliser davantage notre édifice démocratique ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR-NUPES.)

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