QUESTIONS AU MINISTRE
Je profiterai du délai imparti pour vous poser trois questions précises. La première est simple. Il y a environ un an, le Gouvernement m’avait paru favorable à l’idée d’anonymiser le lycée d’origine des candidats inscrits sur Parcoursup – en tout cas, il n’y était pas hostile. Cette initiative a cependant tourné court, à cause, semble-t-il, de la pression exercée par certains groupes de parents d’élèves de lycées huppés. Êtes-vous prête à résister aux lobbys et à reprendre cette idée, le lycée d’origine constituant à l’évidence – vous en conviendrez aisément – un mauvais critère de sélection ?
Deuxièmement, êtes-vous prête a étudier, comme je l’ai proposé dans un rapport d’information rédigé avec ma collègue de la majorité présidentielle Christine Decodts, le possibilité de redéfinir le périmètre des académies, voire de créer une académie qui réunirait la Seine-Saint-Denis et Paris, au bénéfice de la mixité sociale ?
Troisièmement, une grève a été organisée aujourd’hui dans les établissements scolaires en Seine-Saint-Denis.
Comme je l’ai indiqué dans ce même rapport sur l’évaluation du plan L’État plus fort en Seine-Saint-Denis, si des progrès ont été observés dans l’exercice des missions essentielles de l’État – la justice, la sécurité publique et même la santé –, la régression est totale s’agissant d’un secteur : l’école. En croisant les IPS et les évaluations, on constate que ce département doit se contenter d’une pauvre école pour de pauvres gens. Non seulement l’école reproduit les inégalités sociales, mais elle les creuse – vous trouverez toutes les données objectivées dans le rapport d’information déjà cité.
Êtes-vous prête à entendre les syndicats, unanimes, et les nombreux élus et députés de ce département qui réclament un plan d’urgence, tel que celui qui avait été lancé en 1998 – certes, c’est un peu ancien – et qui avait produit des résultats ? Êtes-vous prête à étudier la possibilité de concevoir un nouveau plan pour succéder à ceux déjà déployés ?
Pour conclure, une grande campagne de recrutement a été lancée il y a une semaine pour pourvoir des postes dans les écoles catholiques du département. Elle coûte un pognon de dingue – on retrouve ce message sur des panneaux publicitaires, dans toutes les boîtes aux lettres ou encore sur des calicots devant les établissements scolaires. Je trouve cela scandaleux.
Mme la présidente
La parole est à Mme la ministre.
Mme Nicole Belloubet, ministre
Je suis un peu embêtée car je ne suis pas sûre d’être en mesure de répondre à vos trois questions.
Tout d’abord, s’agissant de l’anonymisation des lycées d’origine sur Parcoursup, je comprends parfaitement votre démarche mais je ne sais pas si une telle mesure est techniquement possible. Je ne peux pas vous apporter de réponse aujourd’hui mais je m’engage à vous en donner une prochainement.
Vous avez ensuite émis le souhait de redéfinir le périmètre des académies, en évoquant l’idée d’une fusion entre la Seine-Saint-Denis et Paris. Vous m’interrogez à brûle-pourpoint et, là encore, je ne peux pas vous répondre immédiatement. Un tel changement ne me semble pas très simple à mettre en œuvre, mais l’idée mérite en tout cas réflexion et je perçois bien l’objectif.
Je suis un peu plus à l’aise pour m’exprimer sur le dernier point. En effet, j’avais pris part, en tant que ministre de la justice, aux travaux relatifs au plan L’État plus fort en Seine-Saint-Denis, lancé par le Premier ministre Édouard Philippe. Nous avions alors consenti à déployer des moyens corrélés aux difficultés rencontrées par le département.
Je ne sais pas encore comment le département de Seine-Saint-Denis est traité au sein du système éducatif national, mais je conviens que les singularités auxquelles vous êtes confrontés nécessitent des réponses qui soient également singulières. J’examinerai cette question avec attention. On m’informe cependant que la baisse du nombre d’élèves du premier degré est assez importante : elle serait deux fois plus rapide qu’au niveau national. Je ne sais pas si vous êtes d’accord avec ces chiffres – nous en reparlerons. Quoi qu’il en soit, les chiffres de la démographie sont une chose, la nécessaire prise en considération de la situation d’un département en est une autre.
M. Stéphane Peu
Avec la hausse de la natalité observée en Seine-Saint-Denis, ces chiffres sont impossibles !
Mme la présidente
Monsieur le député, je vous demande de respecter l’organisation de ce débat. Je vous rappelle qu’aucun droit de réplique n’est prévu.
Mme Nicole Belloubet, ministre
Je m’engage en tout cas à vous donner des réponses sur ces trois dossiers dès que je les aurai étudiés – c’est-à-dire très bientôt.