Madame la ministre, nous avons souhaité organiser ce débat car nous considérons que l’avenir d’EDF ne peut échapper à la représentation nationale. À vingt ans de dérégulation s’ajoutent l’urgence climatique et les objectifs que nous nous sommes fixés en matière de neutralité carbone. Vous engagez-vous à tirer le bilan de vingt ans de politique libérale dans le domaine énergétique ? Dans ce projet de scission, de dépeçage d’EDF, allez-vous choisir la concurrence au détriment de l’avenir et le marché au détriment d’un développement juste ? Vous vous apprêtez à découper EDF et à repeindre en bleu un pôle à capitaux publics qui portera la dette nucléaire et en vert un bloc partiellement privatisé qui aura pour mission de gérer la transition vers les énergies nouvelles.
Par ce découpage brutal, les activités rentables seront cédées à des intérêts privés, et la puissance publique portera la responsabilité des activités non rentables – dont le sort, de surcroît, apparaît de plus en plus flou au vu de vos différentes déclarations et de l’absence de stratégie du Gouvernement.
Sur ces différents points, nous avons donc besoin de réponses. De quelle manière sera piloté le projet Hercule ? Disposez-vous d’un calendrier ? Quels sont les objectifs réels pour EDF ? Quel avenir est prévu pour les salariés, dont le nombre dépasse 150 000 ? Combien d’emplois indirects sont concernés par ce projet ?
Aucune information n’a été communiquée aux salariés, hormis par voie de presse. Est-il normal qu’une entreprise publique qui a participé au développement de notre pays soit ainsi méprisée et que son sort se joue dans les antichambres, à coup de débats technocratiques et de négociations entre les bureaux de l’Elysée et ceux de la Commission européenne ? Qu’allez-vous faire du service public de l’électricité ? Le service rendu aux usagers français, déjà affecté par la fuite en avant libérale, ne risque-t-il pas de se détériorer encore – je pense notamment au droit à l’énergie – à la faveur du découpage que vous envisagez ? Telles sont quelques-unes de nos premières questions.
M. le président. La parole est à Mme la ministre.
Mme Élisabeth Borne, ministre. J’entends ici des propos tout à fait caricaturaux. Le Gouvernement joue pourtant son rôle en proposant une stratégie énergétique, qui consiste, je le rappelle, à contribuer, par nos modes de production d’énergie, à l’objectif majeur de lutte contre le dérèglement climatique.
L’électricité aura un rôle très important à jouer demain et doit être totalement décarbonée : tel est le cadre défini par le Gouvernement.
Cela suppose des actions ambitieuses de la part d’EDF, à la fois pour porter à cinquante ans la durée d’exploitation des centrales nucléaires du parc historique, pour développer les énergies renouvelables et pour adapter les réseaux. Ces actions entrent dans le cadre de la politique énergétique du Gouvernement qui a, je le rappelle, fait l’objet d’un vote du Parlement, dans le cadre de la loi relative à l’énergie et au climat.
Par ailleurs, comme je l’ai déjà dit, nous avons pour objectif de protéger les consommateurs français de la volatilité des prix des énergies fossiles et de protéger l’exploitant du parc nucléaire historique, EDF, du risque de prix bas qui le priveraient de sa capacité à investir et à maintenir le parc nucléaire historique.
Voilà le cadre posé par le Gouvernement. Il appartient ensuite aux dirigeants de l’entreprise de proposer une organisation qui réponde à ces objectifs, en concertation, évidemment, avec les organisations syndicales, démarche qui a été engagée par le président-directeur général d’EDF