Interventions

Evaluation et contrôle du Gouvernement

Débat sur le mal-logement

QUESTION

Je me fais ici l’interprète de Mme Karine Lebon, retenue à La Réunion.

Une grande partie du mal-logement dans les outre-mer est liée à la rareté du foncier, elle-même exacerbée par le problème inextricable de l’indivision successorale. La loi du 27 décembre 2018, dite loi Letchimy, installe un modus vivendi qui, même s’il n’est pas pérenne, est indispensable pour dénouer des situations complexes que le droit commun ne pouvait résoudre.

Grâce à cette loi, des solutions commencent à être trouvées, mais les notaires, qui en sont la cheville ouvrière, doivent régler en moins de dix ans maintenant des successions non traitées sur plusieurs générations. Ils font face à l’absence de titre de propriété et à des indivisions en cascade dont certaines remontent à la période post-esclavagiste. Ils doivent de surcroît assurer la publicité de ces nouvelles mesures dans des territoires où le poids des traditions pèse sur des populations pour qui le recours au notaire n’est pas une évidence.

Si un notaire déterminé réussit à surmonter tous ces obstacles et arrive enfin au partage du bien indivis, il faut encore que les familles concernées acceptent de supporter les frais de cette démarche.

Lors du congrès des notaires d’octobre 2020, le garde des sceaux a rappelé aux notaires des outre-mer que leur implication était primordiale pour que cette loi soit appliquée.

Madame la ministre déléguée, nous devons aider les indivisaires à connaître et accepter la procédure prévue par cette loi. Les collectivités prennent déjà leur part de responsabilité dans l’acquisition des titres de propriété. Mais l’implication de l’État est également primordiale, et les notaires attendent de vous une aide financière spécifique destinée à financer les coûts induits par la sortie de l’indivision. Comment entendez-vous participer à cet effort collectif ?

Mme la présidente.

Mme Emmanuelle Wargon, ministre déléguée.

Je salue votre collègue Karine Lebon, dont je regrette qu’elle ait été retenue.

La question de l’indivision est essentielle un peu partout dans les outre-mer. À la Martinique, c’est 26 % du foncier qui est concerné, et je sais que ce chiffre est également significatif à La Réunion. Ces problèmes d’indivision entraînent des carences de titrement, ce qui pénalise les indivisaires ; l’indivision rend plus difficile la mobilisation du foncier pour construire, et mène in fine à l’abandon de biens qui finissent par constituer des sortes de verrues dans les villes. Enfin, l’insuffisance de l’offre foncière qui résulte de ces phénomènes tire les prix vers le haut et affaiblit le potentiel fiscal des collectivités.

Une première réponse, vous l’avez dit, est apportée par la loi Letchimy, qui assouplit le droit de propriété afin de mieux mobiliser le foncier, notamment en permettant de vendre ou de partager les biens indivis à la majorité et non à l’unanimité des indivisaires. Cette loi est une avancée ; elle propose une expérimentation sur dix ans.

Dans les faits, je reconnais qu’elle est peu appliquée, en particulier à La Réunion. Le Gouvernement est très attentif à la situation. Nous avons commencé par sécuriser le dispositif législatif par un décret, pris en 2020, pour répondre aux inquiétudes des notaires sur les formalités de publicité.

Il revient finalement aux notaires, vous l’avez dit, de se saisir pleinement de ces dispositions, comme l’a redit le garde des sceaux lors de leur congrès en octobre 2020. Un bilan de la loi Letchimy sera dressé cette année par la direction générale des outre-mer (DGOM). L’État suivra son application avec attention, et prendra le cas échéant les mesures complémentaires nécessaires.

Enfin, s’agissant plus généralement de la disponibilité du foncier à La Réunion, le plan Logement outre-mer 2, qui couvre les années 2019 à 2022, a permis de maintenir le niveau de la construction sur l’île et de doubler le nombre de réhabilitations sur ce territoire.

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