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Urgence pour Mayotte - CMP

Le 14 décembre dernier, l’intensité du cyclone Chido s’est avérée exceptionnelle. Les cases détruites, les bâtiments éventrés et les forêts dévastées en témoignent encore, tandis que la débrouille pour survivre caractérise désormais le quotidien de nos compatriotes mahorais. Mayotte est dramatiquement sortie de l’oubli ; Mayotte est courageusement entrée dans l’urgence.
Deux mois après Chido, le projet de loi d’urgence pour Mayotte entre dans sa phase finale. Le groupe GDR votera majoritairement cette dernière version du texte car les Mahorais ne peuvent – et ne doivent – plus attendre. Tout est frappé du sceau de l’urgence à Mayotte : les besoins sont à la fois vitaux et gigantesques ; la menace de nouvelles catastrophes naturelles est réelle ; la confiance dans l’action publique est à restaurer au plus vite ; et la spirale du sous-développement doit être stoppée. Face à cela, les termes de l’alternative qui s’offre à la République française sont connus : continuer à appliquer des méthodes, désormais largement dénoncées, qui consistent à apporter des aides ponctuelles lorsqu’une crise éclate, avant de se désintéresser de ce territoire éloigné en attendant la crise suivante ; ou alors faire preuve de davantage d’ambition et lancer – enfin – un véritable projet de développement. Pour cela, l’État doit aligner Mayotte sur les standards nationaux, qu’ils soient administratifs, réglementaires ou sociaux. Le texte a été enrichi d’une mesure prévoyant la remise au Parlement d’un rapport sur les disparités persistantes entre les montants des prestations sociales versés dans l’Hexagone et les autres départements d’outre-mer. Cela nous semble être un premier pas dans la bonne direction.
Plus largement, le projet de loi d’urgence s’articule autour de trois grands axes. Le premier est celui de la coordination dans la reconstruction des écoles, des bâtiments publics et, plus largement, de Mayotte. Notons que les élus mahorais privilégient, quant à eux, le terme éloquent de refondation. Le deuxième axe est centré sur l’adaptation des règles d’urbanisme et de construction. Le troisième axe comprend des mesures en faveur de la population de Mayotte. Pour ce qui est des pays dits d’outre-mer, l’expérience incite à préciser que ces mesures d’urgence devront impérativement, sous peine d’aboutir à un échec programmé, tenir compte de l’histoire du territoire, de ses réalités sociales et linguistiques, de sa géographie, de ses talents et ses potentialités.
Malgré les garde-fous qui entourent l’assouplissement des règles d’urbanisme et de la commande publique, nous restons inquiets car le respect des normes sismiques et cycloniques est la condition sine qua non de la pérennité de la refondation. De plus, nous restons insatisfaits de la prise en considération, largement insuffisante, des pratiques linguistiques locales dans les modalités d’information du public. Les Mahorais ne souhaitent pas – et ne doivent pas – devenir les spectateurs de la reconstruction de leur pays. S’il est légitime de vouloir accélérer l’instruction des demandes d’autorisation d’urbanisme, il ne faut pas faire fi de la coexistence de deux langues : la langue française, qui n’est pas nécessairement maîtrisée par l’ensemble de la population de l’île, et le shimaoré, compris et parlé par la très grande majorité des Mahorais. Nous appelons donc, une nouvelle fois, à systématiser l’affichage dans les deux langues.
Ce texte, bien que nécessaire, est encore insuffisant à bien des égards. La question de l’eau n’est toujours pas traitée à la hauteur des besoins et des risques sanitaires. Pourtant, l’urgence avait précédé Chido et beaucoup déplorent que l’accès à l’eau potable et la distribution des bouteilles d’eau connaissent encore trop de ratés. Il est aussi regrettable que le débat sur l’immigration à Mayotte – comme dans d’autres territoires – parasite la réflexion sur le développement de l’archipel, qui doit nécessairement être pensé en lien avec l’environnement régional. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR, ainsi que sur quelques bancs du groupe LIOT. – MM. Gérard Leseul et Karl Olive applaudissent aussi.)

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Stéphane
Peu

Député de Seine-Saint-Denis (2ème circonscription)
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