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Représentation plus juste des Français à l’Assemblée nationale

La proportionnelle est un véritable serpent de mer institutionnel. Promise à intervalles réguliers au nom de la juste représentation, elle est sans cesse repoussée aux calendes grecques.

Candidat, Emmanuel Macron s’y était engagé. Devenu Président, il avait confirmé cet engagement le 3 juillet 2017 devant les parlementaires réunis en Congrès, en indiquant qu’il proposera « que le Parlement soit élu avec une dose de proportionnelle pour que toutes les sensibilités y soient justement représentées ».

Le 9 mai 2018, un projet de loi constitutionnelle, un projet de loi organique et un projet de loi ordinaire ont ainsi été présentés en Conseil des ministres. Ils prévoyaient, entre autres mesures, la diminution du nombre de parlementaires de 30 % et l’introduction d’une dose de proportionnelle fixée à 15 % des députés. On s’en souvient, l’examen de cette réforme a été suspendu à la suite de l’affaire Benalla et les textes ont été retirés.

Le mouvement des gilets jaunes a ensuite relancé le sujet, qui figurait d’ailleurs parmi les thèmes du grand débat national voulu par le chef de l’État début 2019 pour tenter de sortir de la crise. Un nouveau projet de réforme a alors été détaillé par Emmanuel Macron lors d’une allocution, le 25 avril 2019. Cette réforme constitutionnelle, présentée en Conseil des ministres le 28 août 2019, visait notamment à introduire une dose de proportionnelle de 20 % dans le mode d’élection des députés. Cette nouvelle réforme des institutions n’a toutefois jamais été examinée, ayant été mise de côté puis balayée par la crise sanitaire.

Malgré les sollicitations répétées de différentes forces politiques, dont celle de la Gauche démocrate et républicaine, à l’endroit du chef de l’État, lui rappelant sa promesse d’instaurer la proportionnelle, celui-ci n’aura donc pas tenu parole.

Nous voici ainsi réunis une nouvelle fois pour examiner une proposition de résolution, élaborée par le groupe MODEM. Nous nous en félicitons, même si celle-ci se limite à inviter « le Gouvernement à conduire une réflexion sur la réforme du mode de scrutin des élections législatives pour le rendre davantage représentatif des préférences partisanes de chaque électeur ».

Les députés communistes qui, depuis tant d’années, ont avec constance défendu la proportionnelle, ne peuvent que souscrire à ce qui n’est finalement qu’une modeste invitation à l’instaurer. Nous voterons donc cette proposition de résolution.
Elle constitue une réponse à la défiance croissante de nos compatriotes, laquelle se traduit par une abstention massive et grandissante à chaque nouveau scrutin. Rappelons que 57 % des électeurs se sont abstenus au second de tour des élections législatives de 2017 : jamais aussi peu de Français étaient allés voter à ce scrutin depuis 1958.

Les différentes enquêtes menées année après année mettent en lumière cette insatisfaction grandissante vis-à-vis de notre vie démocratique. Récemment interrogés sur cette question, 70 % des Français déclaraient ainsi que le système démocratique fonctionne plutôt mal dans notre pays et que leurs idées ne sont pas bien représentées.

L’introduction de la proportionnelle constituerait donc une réponse adaptée, permettant de refléter plus fidèlement les différentes opinions et la diversité de la société, et de garantir à chaque électeur une plus juste représentation. Car, si le scrutin majoritaire est souvent présenté comme le moyen d’obtenir une stabilité politique indispensable, il s’agit en réalité d’une stabilité faussée et précaire que nous payons au prix fort. En effet, moins la représentation démocratique semble refléter fidèlement les positions qui s’expriment dans le pays, plus elle est source de défiance institutionnelle et de l’instabilité politique que l’on cherchait pourtant à éviter.

Je tiens à rappeler, chers collègues, que le scrutin majoritaire utilisé en France pour élire les députés est une exception dans le paysage institutionnel européen. La plupart des pays ont recours au scrutin proportionnel, partiel ou intégral, pour élire leurs députés.

Si en 2017, une telle disposition avait été adoptée, notre assemblée aurait un tout autre visage, et l’absence de majorité absolue en son sein aurait rendu aux travaux de notre chambre leur place centrale dans la vie démocratique du pays : l’arrogance et les logiques monarchiques qui exaspèrent tant nos concitoyens auraient dû faire place au dialogue et à la recherche de compromis.

Enfin, au-delà d’une meilleure représentation politique, c’est aussi un autre visage du pays qui se serait affiché, avec une plus grande diversité et une parité mieux respectée.

Pour toutes ces raisons, nous voterons en faveur de cette proposition de résolution. (Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. Gilles Le Gendre applaudit également.)

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