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Pt programmation des finances publiques 2012 à 2017 (nouvelle lecture)

M. le président. La parole est à M. Nicolas Sansu.
M. Nicolas Sansu. Monsieur le président, monsieur le ministre délégué, mes chers collègues, les lois de programmation ont vocation à être des instruments clés de la politique économique, à en souligner les urgences et les priorités ; elles ne sont pas l’occasion d’une simple querelle de chiffres ; elles soulignent les choix essentiels.
Avec l’adoption du traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance de l’Union économique et monétaire et de la loi organique sur la gouvernance des finances publiques, le Gouvernement a fait le choix de donner la priorité à la réduction des déficits en privilégiant, à notre sens, une austérité de mauvais aloi.
Pourtant, à l’issue du quinquennat, et pour s’en tenir aux prévisions gouvernementales, la dette de notre pays sera encore de 20 % supérieure au seuil de déclenchement des procédures pour déficits excessifs. Pourquoi ce résultat malgré tous les efforts demandés aux Français ? Parce que, selon nous, vous prenez le problème à l’envers. C’est la croissance qui nous permettra de réduire nos déficits et non pas la réduction des déficits qui fera advenir, comme par miracle, la croissance.
En disant cela, nous ne nions pas, bien au contraire, qu’il était nécessaire de redresser la barre, de mettre un coup d’arrêt à la stratégie d’assèchement des finances publiques poursuivie avec acharnement depuis dix ans par la droite, au bénéfice des plus aisés et des grandes entreprises.
Le Gouvernement avait entamé un redressement fiscal avec l’adoption d’une série de mesures : la taxation du capital au même niveau que le travail, la suppression ou le plafonnement de niches fiscales, le rétablissement de l’ISF et la lutte contre la fraude et l’évasion fiscale. Pourtant, comment ne pas s’inquiéter de voir revenir sur le devant de la scène les recettes libérales de transfert des richesses du travail vers le capital, avec le crédit d’impôt compétitivité emploi et l’augmentation de la TVA ?
Si nous ne nous satisfaisons pas de cette loi de programmation des finances publiques, c’est parce qu’elle programme la stagnation des effectifs de la fonction publique, le gel des investissements et la baisse des crédits, notamment en matière de logement, de politique de la ville et d’action sociale. Quant aux collectivités locales, elles sont condamnées à se serrer toujours plus la ceinture, avec une baisse drastique de leurs dotations à compter de l’année prochaine. La présente loi de programmation propose, rappelons-le, que les concours de l’État en faveur des collectivités soient réduits de 750 millions d’euros par an en 2014 et 1,5 milliard en 2015 par rapport à 2013. De même, elle organise le quasi-gel des dépenses de santé et de sécurité sociale, malgré les besoins dans ce secteur.
C’est bel et bien parce que nous estimons que la gauche doit porter une autre politique et changer de braquet en répondant enfin aux attentes sociales que nous ne pouvons vous suivre sur cette programmation. Le cap que vous vous êtes fixé conduit notre pays sur une voie dangereuse, avec comme seul horizon la ligne fatidique des 3 %. Le risque est grand de plonger l’économie française dans la dépression et, au bout du compte, d’accroître encore l’endettement public.
Vous avez décidé d’opter pour la rigueur afin, dites-vous, de mieux préparer l’avenir. Préparer l’avenir, selon nous, c’est faire tout autre chose. C’est faire des salaires et de l’emploi, de la croissance et de la transition écologique vers un nouveau mode de production, de la lutte contre la pression croissante qu’exercent les marchés sur notre système productif les priorités et les leviers d’action de la gauche ; c’est réhabiliter l’impôt en permettant à nos concitoyens d’en voir les fruits dans les dépenses publiques utiles, développer l’investissement public et privé avec l’appui d’un pôle financier public et moduler l’imposition des entreprises en fonction de l’usage qu’elles font de leurs bénéfices.
Certes, la situation est difficile. Notre pays connaît un taux de chômage record et la pauvreté progresse dans des proportions alarmantes. Raison de plus pour changer de cap, sortir de l’impasse de l’austérité et forger les instruments d’une réponse à l’attente de toutes les forces sociales qui, au printemps dernier, ont voulu le changement.
Nous formulons des propositions, qu’il s’agisse de la modulation de l’imposition des entreprises, de la mise en œuvre d’une taxe sur la réimportation des productions délocalisées, de la création d’un pôle financier public, de l’augmentation des salaires et des retraites afin de soutenir une demande qui seule peut véritablement accompagner la croissance.
Le texte qui nous est présenté, en cohérence avec les choix budgétaires et économiques du Gouvernement, est le signe de l’abandon de mesures fortes et concrètes qui auraient pu changer la donne face au pouvoir de la finance et œuvrer pour une autre répartition des richesses.
Monsieur le ministre, ce projet de loi de programmation s’inscrit pleinement dans les pas du traité européen d’austérité budgétaire. En conséquence, vous ne serez pas surpris : les députés du Front de gauche confirmeront leur vote de la première lecture en s’opposant à ce texte.

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Nicolas
Sansu

Député de Cher (2ème circonscription)

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