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Pouvoirs publics : Conseil économique, social et environnemental

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, si nous approuvons les évolutions du Conseil économique et social et les nouvelles compétences qui lui sont dévolues en matière d’environnement, il nous semble important de mettre en question trois des dispositions du projet de loi organique.
Tout d’abord, s’agissant de la répartition des sièges, je regrette que le système des personnalités qualifiées, dont on ne sait pas de quelles qualifications elles disposent, ait été maintenu. Le choix de ces experts semble être le fait du prince. L’absence de critères de compétence précis pour encadrer ces nominations brouille l’image du Conseil.
Ainsi, dans le nouveau collège dédié à la protection de l’environnement, siégeront dix-huit représentants des associations et pas moins de quinze personnalités qualifiées. Le spécialiste de la loutre l’emportera-t-il sur le spécialiste de l’écrevisse à patte blanche ? Pourquoi ne pas avoir accordé davantage de sièges aux associations ? Cela aurait pu favoriser le pluralisme et la compétence au regard des domaines d’intervention spécifiques de beaucoup d’entre elles et des réelles capacités d’expertise associées à une représentativité territoriale dont elles disposent.
Le système des personnalités qualifiées risque de faire du Conseil une sorte de réserve de la République où des gloires en fin de carrière pourraient pantoufler. Ce n’est pas en laissant à l’exécutif un pouvoir de nomination des membres du Conseil que la légitimité de cette institution sera grandie.
Ne serait-il pas préférable d’introduire une réelle représentation d’organismes bien ciblés tels ceux du logement social, oubliés dans le texte ? Les connaissances du réel et la pratique sociétale sont bien préférables à une qualification théorique qui tient parfois de l’ignorance encyclopédique.
Ensuite, s’agissant de la représentation du monde agricole dans le Conseil économique, social et environnemental, nous déplorons que les exploitants et les représentants des activités agricoles perdent cinq sièges et les représentants de la mutualité et des coopératives agricoles, six. Ce sont au total onze sièges en moins pour le monde agricole dont on sait pourtant les difficultés extrêmes depuis quelques années.
Cette adaptation se comprend au regard des évolutions économiques. Reste que le signal envoyé n’est pas très positif. Un petit syndicat comme le MODEF, défenseur d’une agriculture à taille humaine, conservera-t-il un représentant parmi les vingt représentants des exploitants agricoles ?
Nous savons que l’implication de son représentant actuel et la sensibilité qu’il porte ont été appréciées et largement reconnues. Mais la limitation de la représentativité syndicale risque de remettre en cause le pluralisme syndical puisque certaines sensibilités et certaines orientations ne pourraient plus s’exprimer.
Serait-ce la bonne voie pour remédier aux problèmes que connaissent les agriculteurs dans notre pays et pour répondre aux grands enjeux d’une alimentation de qualité, qui exigent de sortir des idées dominantes ? J’utiliserai une métaphore en disant qu’il est parfois bon de quitter les autoroutes des grands groupes majoritaires pour aller découvrir tout ce que peuvent offrir les petits chemins creux.
Enfin, je me préoccupe de la représentation des salariés. Si celle-ci est maintenue au même niveau, le projet de loi organique ne tiendrait aucun compte de la loi du 20 août 2008 portant rénovation de la démocratie sociale et réforme du temps de travail. Aux termes de cette loi, en effet, il existe des critères précis de représentativité des centrales syndicales. La représentation actuelle des syndicats au Conseil économique, social et environnemental n’est pas conforme à ce qu’elle devrait être s’il était tenu compte des résultats des élections prud’homales. Il convient de remédier à ce hiatus, ce qui ne devrait pas poser de difficultés particulières puisque le décret en Conseil d’État précisant la répartition des sièges pourra inclure un mécanisme permettant d’ajuster les effectifs du collège des salariés en fonction des scores aux élections prud’homales.
Notre groupe a déposé des amendements qui vont dans le sens des remarques que je viens de formuler. Si l’examen des articles permet à ce texte d’évoluer dans le bon sens, nous le voterons. Dans le cas contraire, nous nous abstiendrons.
 

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André
Chassaigne

Président de groupe
Député du Puy-de-Dôme (5ème circonscription)
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