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Pn Sénat Organisation des services de la navigation aérienne en cas de mouvement social

Monsieur le rapporteur, vous avez publié en juin 2018 un rapport qui, se faisant l’écho de la position des compagnies aériennes et de la Commission européenne, dénonçait le nombre de jours de grève des contrôleurs et les retards induits dans le secteur aérien. Votre rapport recommandait déjà la mesure que vous nous proposez aujourd’hui. En 2021, la Cour des comptes est elle aussi montée au charbon (Sourires) pour préconiser une mesure tout à fait similaire. Bref, tous les directeurs de conscience sont au rendez-vous.

Bien évidemment, le mouvement social contre la réforme des retraites a aiguisé la prétention qui est la vôtre en vertu des « lourdes conséquences financières » pour les compagnies aériennes. Rappelons toutefois que ces lourdes conséquences n’ont pas empêché Air France-KLM de réaliser le meilleur résultat de son histoire au premier semestre 2023 ; son chiffre d’affaires devrait atteindre 8,7 milliards d’euros cette année.

Vouloir durcir le droit de grève pour en limiter les conséquences économiques, c’est d’abord – Lisa Belluco l’a relevé – vouloir faire disparaître le rapport de force qui permet aux intéressés d’obtenir des droits ou de conserver des acquis. C’est aussi faire peu de cas du fait que la grève est la marque d’un dialogue social en déshérence et de désaccords entre une direction et des personnels.

En l’espèce, précisément, la profession fait face depuis des années à une insuffisance des effectifs, à des conditions de travail dégradées et aux conséquences des retards pris dans la modernisation technique des centres de contrôle. C’est là qu’il faut chercher les causes réelles des perturbations du trafic aérien. D’ailleurs, conscient de ces difficultés, le Gouvernement a pris des engagements en matière de formation et de recrutement. Ces mesures ne produiront cependant leurs effets que dans quelques années, alors que la profession connaîtra une vague de départs à la retraite. En tout cas, les difficultés sont bien réelles, et c’est sur elles qu’il faut agir.

D’autre part, aucune disposition du droit du travail ne prévoit le cumul de l’obligation de déclaration préalable de l’intention de faire grève et du service minimum imposé par la loi, qui est fondé sur des astreintes. Les syndicats sont unanimement opposés à un tel cumul à moins d’une profonde révision des conditions d’exercice du service minimum. Vous avez pris l’engagement, monsieur le ministre délégué, d’assouplir les règles du service minimum, mais la publication du décret n’interviendra qu’après la discussion du texte qui nous occupe. Par surcroît, ces assouplissements ne régleront pas le problème de fond, à savoir la possibilité de combiner obligation de déclaration et régime d’astreinte.

Dès lors qu’un régime d’astreinte permet de garantir le respect du droit de survol du territoire national, la sécurité des personnes et des biens ou le maintien de liaisons assurant la continuité territoriale avec la Corse et les collectivités ultramarines, pourquoi prévoir une telle obligation ? Pourquoi instaurer ainsi un nouveau régime, que je qualifierais de « ceinture et bretelles », sinon pour servir les intérêts des grandes compagnies aériennes privées ?

Bien évidemment, les députés communistes et ultramarins ne souscriront pas à votre approche : cette proposition de loi is no good Or, quand on est Iznogoud, on se fait tacler !

(Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et Écolo-NUPES ainsi que sur quelques bancs du groupe LFI-NUPES.)

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