PLFSS (projet de financement de la sécurité sociale) pour 2026 (2ème lecture)
Publié le 2 décembre 2025Avant de vous livrer notre appréciation sur cette version du projet de loi de financement de la sécurité sociale, permettez-moi une remarque d’ordre général. Le texte qui nous revient du Sénat est un véritable ovni – un objet volant non identifié –, certainement à l’image de la majorité politique qui lui a donné naissance. Tout d’abord, c’est bien un objet, au sens strict du terme, puisqu’il n’y a aucune humanité dans les propositions formulées par la Haute Assemblée.
C’est sur les plus fragiles que reposent les efforts à fournir. Ensuite, il est volant parce que totalement hors sol par rapport aux besoins réels de santé qui s’expriment chaque jour plus fortement dans notre pays. Pour rappel, six Français sur dix déclarent renoncer à des soins et un sur quatre le fait pour des raisons financières. Enfin, il est non identifié notamment parce qu’il ne dit pas, à lui seul, toutes les mauvaises mesures qui sont en préparation. Je pense aux décrets prêts à sortir pour entériner une nouvelle hausse injuste des franchises médicales ou pour remettre en cause les cures thermales en les déremboursant, ce qui serait une mesure de grave régression en matière de prise en charge, s’attaquant notamment, et très directement, aux personnes souffrant d’ALD – affection de longue durée.
Nous allons donc devoir, une fois de plus, revêtir nos habits de démineurs pour tenter de donner un nouveau visage à ce PLFSS, d’assurer un avenir à notre sécurité sociale et surtout de protéger celles et ceux pour qui elle existe. Malheureusement, force est de constater que ce projet de loi n’a jamais aussi mal porté son nom car en matière de financement de la sécurité sociale, nous sommes décidément bien loin du compte. Non seulement vous êtes incapables – vous et la majorité sénatoriale – de doter la sécurité sociale de recettes nouvelles, assises sur la richesse produite, mais vous semblez complètement inaptes à conduire les réformes structurelles qui s’imposent, celles qui doivent être prises de toute urgence pour préserver notre modèle social et garantir une réponse digne et de qualité aux besoins sociaux et médicaux de tous les Français.
Votre manque de courage en la matière peut coûter cher à la sécurité sociale, dont le déficit va immanquablement se creuser. Il peut coûter cher, encore plus cher, à l’ensemble des ménages que vos mesures indigentes vont appauvrir – je pense au gel des prestations sociales et des retraites, ou à la taxe sur les mutuelles qui sera répercutée par une nouvelle augmentation de leurs cotisations. Il peut aussi coûter cher à nos personnels soignants et non soignants qui, dans nos hôpitaux et dans nos Ehpad, pourraient encore subir une réduction de leurs moyens.
Le rejet quasi unanime, au Sénat, par les groupes de gauche et par une partie de la droite, de l’objectif national de dépenses d’assurance maladie, l’Ondam, est emblématique de cette impasse dont vous êtes responsables. Vous aviez prévu une progression historiquement basse, fixée à 1,6 %. Le comité d’alerte ayant immédiatement fait savoir qu’un tel objectif de dépenses ne tenait pas la route, vous avez, au cours de la première lecture, consenti à porter cette progression à 2 % – ce qui demeure très faible, la seule hausse naturelle des besoins se situant aux alentours de 4,5 %. Reconnaissons au moins que cette modification a permis d’accorder 850 millions d’euros supplémentaires aux hôpitaux ; leur déficit culminant désormais à 2,8 milliards, ils en ont bien besoin.
Nous, les députés de la Gauche démocrate et républicaine, défendons une réforme simple : sortir de l’Ondam au profit d’une loi de programmation pluriannuelle en santé qui parte des besoins et définisse, de façon pluriannuelle, les ressources nécessaires. Votre manque de courage s’illustre également par un amendement très problématique que vous avez fait adopter au Sénat et qui autorise un nouveau transfert de dette de 15 milliards vers la Cades : nous combattrons résolument cette mesure. Osez le débat de fond sur la financiarisation de la dette de la sécurité sociale ! Osez ce débat où chacun devra rendre compte publiquement de ses choix politiques et de leurs conséquences en matière d’accès aux soins !
Notre groupe cherchera bien entendu à supprimer toutes les dispositions qui aggraveraient encore le quotidien des Français, qui les appauvriraient et réduiraient leur accès à des soins de qualité, voire les inciteraient tout bonnement à renoncer à se faire soigner. Nous validerons toute ressource nouvelle comme celle adoptée en première lecture, financée par la CSG. Nous tenterons, dans les faibles marges accordées par une seconde lecture, de convaincre encore du caractère sensé et utile de notre méthode, qui consiste à répondre aux besoins par de nouvelles recettes et non par un catalogue d’économies nouvelles. Ne nous cachons pas : sans cotisations, pas de sécu !
Pour finir, je considère qu’aucun vote sérieux ne peut se déterminer sans un débat assidu sur le fond, ni sans la connaissance des modifications qui en résulteraient. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’à titre personnel, j’ai voté contre la motion de rejet préalable (Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem), sans que ce vote ne préfigure mon appréciation sur le texte final – je ne sais pas encore quel sera mon vote, tenez-le vous pour dit. Notre sécu mérite un vrai débat, honnête et rigoureux, mais quand on aime la sécu, on la finance ! (Applaudissements sur quelques bancs des groupes EPR, SOC et Dem.)