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PLF 2016 (séance) : Politique des territoires (EV + 1Q)

Madame la Présidente, madame la ministre, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Politique des territoires », qui intègre depuis l’an dernier la politique de la ville, représente pour 2016 un budget total de 674 millions d’euros en autorisations d’engagement et de 718 millions d’euros en crédits de paiement.
Cette année est marquée par la mise en œuvre des contrats de plan État-région de nouvelle génération, la signature des nouveaux contrats de ville et les mesures décidées dans le cadre des comités interministériels sur la ruralité.
La nouvelle génération des contrats de plan État-région 2015-2020 constitue un enjeu majeur pour l’investissement public. Les CPER ont en effet vocation à favoriser la relance de l’investissement dans les territoires au service de l’emploi.
Avec des crédits en baisse et des dotations aux collectivités locales en chute libre, nous doutons de la capacité du budget qui nous est présenté à impulser des politiques partenariales ambitieuses et à donner un nouvel élan à la politique des territoires.
Comme le soulignait en commission élargie l’un de nos collègues du groupe Les Républicains, Alain Chrétien,…
M. Jean-Louis Bricout. Quelle référence !
M. Patrice Carvalho. …l’État, bien avant cette législature, a décidé de se retirer de l’aménagement du territoire faute de moyens, laissant aux collectivités le soin d’aménager leur propre territoire.
Asphyxiées par la baisse des dotations, celles-ci ne peuvent plus faire face.
Dans un tel contexte, on voit mal comment les contrats de plan pourront exercer un effet de levier pour élever le niveau d’équipement des territoires, soutenir l’emploi et préparer l’avenir.
La réforme territoriale – que ces contrats de plan accompagnent – n’apporte pas non plus de réponse quant à l’autonomie financière des régions, pas plus qu’elle ne traite de la question d’une réforme fiscale juste.
La métropolisation des territoires et, au-delà, des politiques publiques, contribue au contraire à créer des déséquilibres, avec d’un côté des territoires soumis à la concurrence internationale, avec les métropoles qui capteront les ressources de territoires jusque-là stables, et de l’autre des zones rurales et périurbaines laissées à l’abandon. C’est la réalité territoriale qui se dessine.
Ce qui est vrai du territoire dans son ensemble l’est encore en matière de politique de la ville. Nous avons en effet appris en la matière à nous défier des effets d’annonce, mais pour nombre des 1 300 quartiers prioritaires de la politique de la ville, la baisse des dotations est là aussi une dure réalité, malgré les avancées obtenues pour augmenter la solidarité nationale, avec la dotation de solidarité urbaine et la solidarité intercommunale via le Fonds national de péréquation des ressources intercommunales et communales, le FPIC.
Nous avons une fois encore un problème de cohérence entre les ambitions affichées et les moyens effectivement mis en œuvre.
Concernant les territoires ruraux, nous nous heurtons au même paradoxe, pour ne pas dire à la même hypocrisie. D’un côté, des annonces tonitruantes visant la santé et l’éducation en milieu rural, la résorption de la fracture numérique, le soutien à l’investissement public local à hauteur d’1 milliard d’euros pour soutenir les projets portés par les communes et les intercommunalités. De l’autre, sous couvert d’intercommunalité, des communes rurales dévitalisées par la loi NOTRe et privées de moyens par la baisse des dotations. Il faut sortir de cette logique d’austérité et de gestion de la pénurie, sans laquelle nous ne pourrons ni endiguer la fracture territoriale, ni garantir plus longtemps la cohésion républicaine qu’assurent et garantissent les mécanismes de solidarité nationale.
Les moyens manquent cruellement aujourd’hui pour valoriser la cohésion territoriale, implanter ou développer des équipements ou des services, organiser et favoriser l’accueil de populations nouvelles dans les territoires ruraux, soutenir et encourager les projets de développement local et les rendre vertueux au sens du développement durable.
Compte tenu de l’austérité qui gouverne les choix opérés et paralyse l’ambition gouvernementale, nous ne voterons pas le présent budget.
Question de P Carvalho :
Afin de garantir l’égalité d’accès aux services pour tous, le Gouvernement s’est fixé l’objectif d’implanter 1 000 maisons de services au public d’ici à la fin 2016, contre 363 existantes aujourd’hui. Il s’est également assigné un objectif de diversification du contenu et de l’offre des MSAP, qui se traduirait par un accroissement du nombre d’opérateurs partenaires.
Vous avez souligné, madame la ministre, que l’implantation des maisons de services au public se ferait de manière souple : les préfets jouiront de la latitude nécessaire pour définir, avec les élus et les opérateurs, la localisation la plus pertinente en fonction des besoins locaux, des schémas d’accessibilité et des stratégies poursuivies. Les opérateurs financeront en 2016 les maisons de services au public à hauteur de 7,3 millions d’euros, soit autant que l’État, via le FNADT et l’abattement fiscal supplémentaire consenti à La Poste. Les collectivités apporteront quant à elles 14,5 millions d’euros, par des financements directs aux maisons classiques ou, pour les maisons abritées par La Poste, par le biais du fonds postal national de péréquation territoriale. Ce projet se veut une tentative de réparation de la casse des services publics opérée par la droite sous les deux précédents quinquennats.
Pourtant, l’accroissement du nombre d’opérateurs partenaires n’est pas une bonne nouvelle : c’est le paravent d’un recul des services publics de proximité, qui va de pair avec la fermeture de postes, de centres des impôts, de petites gares. Ne croyez-vous pas qu’il est aujourd’hui nécessaire de bâtir une stratégie de reconquête du service public en milieu rural, en lieu et place de cette retraite en rase campagne ?
Mme la présidente. La parole est à Mme la ministre.
Mme Sylvia Pinel, ministre. Monsieur le député, vous m’interrogez sur la présence des services publics dans les territoires ruraux. C’est un sujet auquel j’attache une importance toute particulière car il garantit l’équité entre nos concitoyens, assure leur qualité de vie et participe à l’attractivité des territoires. C’est pourquoi nous avons prêté une attention particulière à ces sujets à l’occasion des différents comités interministériels. En témoignent les schémas d’accessibilité des services au public, élaborés conjointement entre les services de l’État et les présidents de conseils départementaux pour définir et élaborer une stratégie territoriale. Par ailleurs, un partenariat ambitieux a été conclu avec La Poste, ce qui nous permet d’accélérer le déploiement de ces maisons de services au public pour atteindre l’objectif de l’ouverture de 1 000 maisons d’ici la fin de l’année 2016.
Je sais que certains élus se sont inquiétés des lieux d’implantation proposés par La Poste ; cela ne préjuge évidemment en rien des choix définitifs qui seront faits après concertation entre les préfets et les collectivités territoriales. Il s’agit en effet de tenir compte des stratégies développées pour définir ces lieux d’ouverture.
Vous m’avez par ailleurs interrogée sur le financement des MSAP. Nous avons travaillé avec l’ensemble des acteurs pour le sécuriser. Les opérateurs se sont engagés à prendre en charge 25 % du coût, soit environ 21,5 millions d’euros, pour la période 2015-2017. Par ailleurs, aucun financement propre ne sera demandé aux collectivités, grâce à une réorientation d’une partie du fonds postal de péréquation territoriale.
Vous le voyez, monsieur le député, ce dispositif permet d’améliorer l’accès de nos concitoyens aux services publics dans les territoires ruraux. En faisant participer des opérateurs, il leur épargne la nécessité d’effectuer de longs déplacements pour quelques minutes d’entretien ou pour accomplir une simple formalité, en particulier grâce aux services numériques déployés dans les maisons de services au public. Nous travaillons sur ce dossier en lien étroit avec les collectivités territoriales mais aussi avec les autres opérateurs. C’est donc bien un travail partenarial qui, là encore, nous fait avancer.

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Patrice
Carvalho

Député de Oise (6ème circonscription)

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