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Favoriser et inciter les entreprises à augmenter les salaires nets de 10%

Il est nécessaire, urgent, impérieux que les salaires augmentent, que le travail soit reconnu et rémunéré. Hélas, c’est un tabou pour la majorité. Mais personne ne nous fera croire que c’est une priorité pour le Rassemblement national (« Oh ! » sur les bancs du groupe RN) : cela ne l’a jamais été. En juillet 2022 encore, les députés du Rassemblement national ont encouragé le contournement du salaire et refusé l’augmentation du Smic que nous proposions.

En septembre 2021, ils s’opposaient à l’augmentation des salaires : Marine Le Pen expliquait qu’« augmenter les salaires, c’est faire peser une charge sur des entreprises qui sont dans de grandes difficultés économiques » ou encore que la hausse des salaires avait été « trop longtemps empêchée par une immigration qui les a sans cesse tirés vers le bas ».

Tout ramène le Rassemblement national à ses obsessions sinistres et à ses tragiques lubies. Il n’est particulièrement pas qualifié en matière sociale et il voudrait le faire oublier par cette proposition de loi.
(Exclamations sur les bancs du groupe RN.)

L’émancipation sociale est en dehors des schémas de pensée de sa famille politique, enfermée dans son projet nationaliste et inégalitaire, marquée par une culture paternaliste de l’entreprise et corporatiste du travail.

Étant du côté des puissants, l’extrême droite n’a jamais su, dans notre histoire, qu’instrumentaliser la question sociale par opportunisme pour tromper les salariés, les ouvriers, les employés, le monde du travail.

Comme elle est obnubilée par ses logiques de stigmatisation et de division, qu’elle désigne des boucs émissaires au lieu de s’attaquer aux vrais responsables, la proposition que voici a tout d’une tentative d’imposture, d’une entreprise de mystification, d’un numéro d’illusionnisme, en somme d’une arnaque. Au mieux, cette proposition est inopérante. En effet, comme il n’identifie pas les causes de la situation, le Rassemblement national choisit de ne pas s’attaquer au capital, au système capitaliste.

C’est au système social que vous vous attaquez, à celui qui est issu du Conseil national de la Résistance auquel il est porté un coup chaque fois que le Rassemblement national le cite. Or, précisément, il faut s’attaquer au capital pour faire gagner celles et ceux qui travaillent. La prétendue augmentation promise pour faire bonne mesure est fondée sur l’exonération de cotisations sociales, sur de nouveaux cadeaux au grand patronat.

Cette proposition participe ainsi à la foire aux exonérations sociales qui, depuis tant d’années, abîme notre protection sociale et notre pacte social. Ce qui serait donné d’une main serait repris de l’autre, en amputant la sécurité sociale de ressources qui nous permettent de nous assurer mutuellement face aux risques et de financer, par exemple, les retraites. C’est justement en considérant que les cotisations sociales sont par nature abusives, indues, qu’on en vient à nous expliquer qu’il y a un déséquilibre financier et qu’il faudrait travailler plus longtemps. La prétendue augmentation serait prise sur la solidarité et, potentiellement, sur les pensions de retraite.

Cette proposition dédouane l’employeur de sa responsabilité économique et sociale ; le numéro d’illusion va jusqu’à exonérer les entreprises sans prendre en considération le chiffre d’affaires réalisé, sans distinction.
Bien entendu, un tel mécanisme par lequel l’État se substitue à l’employeur biaise le rapport de forces dans l’entreprise au détriment des salariés qui voudraient faire valoir de légitimes revendications. À ce titre, il est intéressant de noter que l’exposé des motifs considère que les dernières augmentations de salaires conquises par la négociation sont des « hausses de salaires arbitraires et unilatérales ».

Cette proposition d’augmentation imaginaire ne correspond pas aux revendications des organisations syndicales de salariés. Non seulement elle ne permettra pas une revalorisation significative des salaires mais, en plus, elle risque d’entraver les batailles pour les salaires et d’affaiblir les augmentations âprement négociées dans les entreprises. Elle ne résoudra pas les inégalités entre les femmes et les hommes. Je ne sais pas quelle démonstration on espère, mais cette proposition de loi d’inspiration libérale appuyée sur de vieilles recettes ferait « plouf ! »

Pour sa part, le groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES continuera donc de faire avancer ses propositions : augmentation du Smic avec un mécanisme de soutien aux petites entreprises, organisation d’une grande conférence sur les salaires, échelle mobile des salaires, révision des grilles de qualification et de rémunération, limitation des écarts de salaire dans l’entreprise.

Nous ne soutiendrons pas une proposition de loi d’affichage trompeuse, mal ficelée, à côté de la plaque. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES, LFI-NUPES et Écolo-NUPES.)

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Pierre
Dharreville

Député des Bouches-du-Rhône (13ème circonscription)

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