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Etendre le revenu de solidarité active pour les jeunes de 18 à 25 ans

Camarade rapporteur, notre pays fait face à une crise sociale majeure. L’épidémie de covid-19 a passé notre société au révélateur, en mettant au jour les vulnérabilités sociales préexistantes. Les inégalités sociales continuent de se creuser à la faveur de la crise sanitaire ; la pauvreté concerne désormais 10 millions de personnes ; la précarité alimentaire touche 5 millions de nos concitoyens et les demandes de RSA explosent dans nos départements.

Dans ce contexte économique morose, la jeunesse souffre particulièrement : étudiants dépourvus de petits boulots ou privés de premier emploi ; intérimaires brutalement remerciés ; apprentis qui ne trouvent pas d’entreprises pour les accueillir ; jeunes qui viennent grossir les rangs des banques alimentaires. La crise a pesé deux fois plus sur le revenu des 20-25 ans que sur celui du reste de la population française, comme le montre une étude du Conseil d’analyse économique (CAE) de janvier.
À ces difficultés matérielles s’ajoute de plus en plus une détresse psychologique en raison de la limitation des interactions sociales, de la fermeture des universités, de la mise à l’arrêt des activités culturelles et sportives.

Tous ces constats ont été dressés dans l’excellent rapport, remis en décembre 2020, de la commission d’enquête pour mesurer et prévenir les effets de la crise du covid-19 sur les enfants et la jeunesse, dont notre collègue Marie-George Buffet était la rapporteure, et à l’issue de laquelle soixante-cinq propositions ont été formulées et votées à l’unanimité pour répondre aux problèmes éducatifs, psychologiques, financiers et sociaux rencontrés par les enfants et les jeunes – l’ouverture du RSA aux jeunes de 18 à 25 ans en faisait partie.

Depuis un an, force est de constater que le Gouvernement et sa majorité n’ont pas pris la mesure du choc économique et social subi par la jeunesse, se contentant de distribuer des aides ponctuelles de 150 euros et de présenter un plan jeunes largement insuffisant qui laisse sur le bord de la route une part importante de notre jeunesse.

Nous pouvons être aussi sceptiques sur le choix de solutions éprouvées depuis vingt ans – contrats aidés ou service civique, qui ont tendance à créer des voies d’insertion parallèle sans mettre fin au chômage massif des jeunes –, ainsi que sur la proposition sortie ce matin du chapeau présidentiel comme le lapin du prestidigitateur. Pire, le Gouvernement s’obstine à appliquer sa réforme de l’assurance chômage qui, comme l’ont révélé Les Échos cette semaine, pénalisera fortement les jeunes entrant sur le marché du travail après avoir enchaîné des petits contrats pendant leurs études. Cette réforme est un non-sens social et économique. Elle doit être mise au placard. (Mme Marie-George Buffet applaudit.)

Dans ce contexte, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine souscrit pleinement à l’extension du RSA aux jeunes de 18 à 25 ans, proposée par nos collègues de La France insoumise. Il est en effet nécessaire d’instaurer un filet de solidarité minimum pour les jeunes dans ce contexte de double crise sanitaire et économique. Il n’est pas normal que la France soit l’un des rares pays européens dans lesquels la majorité n’ouvre pas droit à une protection sociale minimale. La majorité civile étant accordée à 18 ans, rien ne justifie que nous refusions la majorité sociale et solidaire jusqu’à 25 ans et que nous continuions de fermer les yeux sur les conditions réelles de vie des jeunes. Cette mesure d’urgence apparaît aujourd’hui indispensable.

Il nous faut également inventer des dispositifs pérennes de soutien à la jeunesse pour leur assurer un revenu garanti et une continuité de leurs droits sociaux. Souvent inéligibles à l’assurance chômage, faute d’avoir suffisamment travaillé, exclus du RSA en raison de leur âge, les jeunes sont aujourd’hui confrontés à une crise économique majeure qui leur ferme les portes du marché du travail. Nous devons agir. C’est notre devoir.

Nous prônons depuis de nombreuses années l’instauration d’un revenu étudiant ou d’une allocation d’autonomie permettant de garantir aux jeunes une autonomie financière durant leur formation.

Il nous faut également travailler à un élargissement de l’assurance chômage tout en renforçant les moyens des structures d’accompagnement dédiées à la jeunesse. Toutes les associations de jeunesse le réclament et la situation sociale l’impose. Pourtant, le Gouvernement et la majorité continuent de botter en touche, renvoyant au dispositif de la garantie jeunes, qui n’a concerné que 100 000 jeunes en 2020, peut-être 200 000 en 2021, et dont la mise en œuvre nécessite des moyens humains colossaux dans les missions locales et à Pôle emploi. Or l’ouverture du RSA aux jeunes de 18 à 25 ans pourrait s’adresser à 800 000 jeunes précarisés dès aujourd’hui. Nous avons la responsabilité de ne pas faire de la génération covid une génération sacrifiée. L’urgence sociale nous oblige à protéger notre jeunesse. Ce texte est l’occasion de lui envoyer un signal positif. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI.)

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André
Chassaigne

Président de groupe
Député du Puy-de-Dôme (5ème circonscription)

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