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Emploi des séniors jusqu’à la retraite

Avec ce texte, il s’agit d’une autre paire de manches que pour le précédent. Il tape dans le dur. L’emploi des seniors est en effet un sujet crucial, qui mérite une ambition politique largement renouvelée. La mission d’information de la commission des affaires sociales a montré qu’il s’agissait d’un angle mort des politiques publiques, alors que la situation des travailleurs dits expérimentés s’est progressivement fragilisée sur le marché du travail. Lorsqu’ils ne sont pas en emploi, plus des deux tiers d’entre eux sont concernés par le chômage de longue durée, tout en accédant moins à la formation que les autres travailleurs. En France, en 2017, comme cela a été rappelé, le taux d’emploi pour cette tranche d’âge était inférieur aux autres pays de l’Union européenne. Toutefois, cette faiblesse doit être relativisée, car elle s’explique en grande partie par le fait que l’âge légal de départ en retraite est fixé à 62 ans dans notre pays.
C’est d’ailleurs là que résident une partie du problème et sa solution. Nul ne peut ignorer que la situation peu enviable des travailleurs seniors s’explique par les réformes successives menées ces dernières années pour retarder le départ à la retraite : la suppression des dispositifs de préretraite dans le public dans les années 2000, le recul progressif de l’âge légal de la retraite à 62 ans, avec la réforme de 2010 et l’allongement de la durée de cotisation nécessaire pour disposer d’une pension à taux plein avec la réforme de 2014. Ces réformes ont été imposées sans anticiper les effets potentiels des mesures de report d’âge sur le basculement dans le chômage ou la précarité.
La situation actuelle constitue une double peine : les salariés doivent travailler toujours plus longtemps et dans le même temps les entreprises se montrent toujours plus réticentes à embaucher des seniors, considérés à tort comme moins productifs, comme cela a été dit. Dans ce contexte, qui peut croire que l’instauration de la retraite à 64 ans, envisagée par la majorité, permettra aux seniors de trouver un emploi et de le conserver ? Outre son caractère injuste et régressif, une telle mesure reviendrait à nier le caractère pénible de certains métiers, qui usent les corps bien avant le bénéfice de la retraite.
Devant ces constats, ce qui reste du texte, notamment l’instauration d’un label pour les entreprises exemplaires en matière d’emploi des seniors, tient plus de la distribution de bons points qu’autre chose.
Par ailleurs, nous étions opposés à l’article 5 de la version initiale du texte, supprimé en commission, qui visait à développer le cumul emploi-retraite. Ce dispositif va à l’encontre du partage du temps de travail et incite les travailleurs à travailler toujours plus longtemps au détriment de leur santé, parfois pour compléter une faible pension. Il se retournerait immanquablement contre les seniors privés d’emploi.
D’autres propositions auraient mérité d’être débattues. Nous pensons par exemple au rétablissement de la négociation obligatoire d’entreprise sur le thème de l’emploi des seniors, que la majorité a supprimé aux termes des ordonnances travail de 2017 ; aux mesures d’aménagement des fins de carrière prévoyant la possibilité d’un départ anticipé pour les personnes ayant occupé un emploi pénible ; aux mesures permettant de faciliter l’accès à la formation en déplafonnant le CPF pour les salariés âgés de plus de 45 ans. Ces quelques propositions, absentes de ce texte, auraient permis d’améliorer concrètement la situation des seniors sur le marché du travail.
Le groupe GDR maintiendra donc un vote défavorable sur l’ensemble de cette proposition de loi, qui a été vidée de l’essentiel de sa substance en commission.

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