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Dispositions relatives aux fonctionnaires et militaires originaires d’Outre-mer

L’examen de la proposition de loi de notre collègue Nicole Sanquer intervient alors que la vie chère dans les départements d’outre-mer est de nouveau au cœur de l’actualité. S’appliquant aux fonctionnaires d’État et aux militaires de ces régions, ce texte, apparemment technique, est l’occasion de prendre la mesure des décisions qui grèvent le pouvoir d’achat de nos compatriotes tout comme il nous éclaire sur la perte de confiance dans la parole publique quand l’État n’est pas au rendez-vous de ses engagements.
L’article 1er relatif à l’indemnité temporaire de retraite (ITR) illustre parfaitement ces deux aspects. La suppression sèche du dispositif se traduira par une recrudescence de la précarité chez les retraités concernés qui, faut-il le rappeler, appartiennent le plus souvent aux catégories B et C.
D’autre part, l’engagement du Gouvernement, lors de la réforme de 2008, de créer, en lieu et place de l’ITR, un système de compensation équitable et financièrement équilibré n’est pas respecté et a très vite été battu en brèche au motif que la réforme était déjà équitable.
Qu’il ait fallu mettre fin à des abus, bien sûr, nul ne le conteste. Mais se servir de cette première étape menée à bien avec le concours de tous pour justifier l’abandon du système compensatoire promis est une tromperie. Comment les écarts de prix, qui peuvent atteindre 30 à 60 %, et les taux de pauvreté constatés – les plus importants de France – ont-ils pu être à ce point occultés pour parvenir à une telle conclusion ?
L’article 1er vise uniquement à rappeler à l’État l’engagement pris auprès de la représentation nationale il y a treize ans et à l’inviter, en urgence, à mettre en chantier et de manière concertée un dispositif de remplacement.
Aucun des agents de la fonction publique originaires des outre-mer en poste dans l’Hexagone n’est indifférent à l’article 2 tant le centre des intérêts matériels et moraux (CIMM) conditionne le bénéfice des principales mesures auxquelles ils peuvent prétendre. C’est un dispositif pivot dont dépendent par exemple les congés bonifiés et surtout les possibilités d’affectation dans sa région d’origine. Chaque année, les parlementaires d’outre-mer mesurent l’impact de ce dispositif sur l’existence de leurs compatriotes lorsque ceux-ci sont contraints, notamment après avoir réussi un concours, de travailler et de vivre à des milliers de kilomètres de leur conjoint et de leurs enfants.
Il existe donc un véritable décalage entre l’incidence du CIMM et la libre interprétation laissée à chaque administration pour l’appliquer, ce qui provoque des inégalités de traitement et de grandes incompréhensions.
Toutes les tentatives d’harmonisation étant restées vaines, nous ne pouvons que saluer la volonté de cohérence dont témoigne l’article 2, qui prévoit que ce dispositif essentiel, générateur de droits, soit appliqué selon des règles précises et justes.
L’article 3 vise à mettre fin à une inégalité de traitement entre les outre-mer puisqu’il s’agit d’étendre enfin aux militaires originaires du Pacifique ou de Mayotte le bénéfice de l’indemnité d’installation des militaires ultramarins (INSMET). Si le principe de cette extension est unanimement partagé, le mode opératoire que le Gouvernement a annoncé récemment est plus que contestable. Il s’agit, ni plus ni moins, de demander à ces hommes et à ces femmes, engagés au service de la France, de régler cette question entre eux. L’égalité entre les militaires ultramarins mérite bien mieux que cette opération à somme nulle.
Ma collègue Karine Lebon souhaite, à l’occasion de ce débat, appeler l’attention du Gouvernement sur un autre dossier dans lequel le principe d’égalité est aussi mis à mal. Il s’agit de la législation sur les bénéfices de campagne, lesquels ne sont pas attribués à tous ceux qui pourraient y prétendre.
Ce dispositif datant de 1924, qui consiste à doubler les annuités de retraite des militaires pour les périodes de service effectuées outre-mer, ne s’applique pas à certains gendarmes ultramarins alors qu’ils y ont droit. Ni le décret du 3 novembre 2011 ni l’arrêt du Conseil d’État du 12 février 2020 n’ont permis de remédier à cette situation. L’argument du décret de forclusion leur est désormais opposé. Vous comprenez que nous tenions à interpeller le Gouvernement à ce sujet.
Au-delà des ajustements nécessaires, le Groupe GDR apportera tout son soutien à cette proposition de loi, dont nos collègues d’outre-mer ont souligné l’ambition. Au moment où nous parviennent des Antilles les échos des difficultés que rencontrent nos concitoyens, nous aurions tort, dans cet hémicycle, de négliger la portée d’un tel texte. (Applaudissements sur les bancs des groupes LR et SOC. – Mme Nicole Sanquer, rapporteure, applaudit également.)

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