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Approbation de la Mesure 1 (2005) – annexe VI au Protocole au Traité sur l’Antarctique

La mesure 1 de l’annexe VI de ce protocole va introduire une notion de solidarité collective en cas d’accident dégradant l’environnement local. Grâce à cela, l’Antarctique devient réellement un bien commun que chacun est chargé de protéger.

Ce territoire fait face à de plus en plus d’activités privées et non scientifiques qui doivent être mieux réglementées. Sur ce plan, cette annexe est un facteur de progrès puisqu’elle permet la prise de mesure d’exécution à l’égard des opérateurs privés et l’institution d’un principe de responsabilité environnementale pour tous les acteurs dans la zone antarctique. Nous voyons d’un bon œil le fait que cette annexe permettra de créer des plans d’urgence pour prévenir et anticiper tout dommage environnemental en Antarctique. Enfin, le régime de responsabilité et d’indemnisation en cas d’accident permettra de créer les conditions d’une meilleure sécurité en Antarctique.

Puisqu’il n’y a que de bonnes mesures, on se demande pourquoi l’exécutif a attendu seize ans pour proposer la ratification de ce texte. Le président Bourlanges vient d’apporter une réponse, en exposant quelques considérations techniques et diplomatiques. Quoi qu’il en soit, la diplomatie française ne devra pas se contenter de ces avancées, car elles ne sont qu’un premier pas vers un travail bien plus ambitieux pour ce continent.

Le premier chantier, auquel les députés communistes ont pris leur part en demandant à débattre de ce texte aujourd’hui dans l’hémicycle, c’est de mieux faire connaître ce continent et ses enjeux aux Français.
Le deuxième chantier, plus concret, c’est d’élargir le régime de responsabilité des risques pour l’environnement imputables à certaines activités dans le cadre de cette annexe. Ce régime reste trop limité. Il ne dit rien des modalités à mettre en place pour une intervention d’urgence en cas de crise. Il dit trop peu concernant la notion de réparation qui ne prend en compte que le coût qui aurait dû être engagé pour limiter l’impact et non le véritable coût à l’environnement. Il ne dit rien sur la couverture des activités terrestres. Pourtant, face à la multiplication des activités et des acteurs dans la région Antarctique, il est nécessaire d’anticiper les futurs enjeux afin d’en limiter les potentiels impacts environnementaux.

Le troisième chantier concerne la maîtrise de l’augmentation exponentielle du tourisme. Quand on affecte un gros pourcentage de hausse à une petite quantité, le nombre final reste certes modeste. C’est la tendance qu’il faut regarder, comme Jacques Maire nous y invite. La concentration des visites dans la péninsule Antarctique pose déjà problème car 95 % des visiteurs débarquent dans quelques lieux, ce qui les fragilise. Ne faudrait-il pas limiter le tourisme et les activités de loisir de manière globale sur ce continent ? La question se pose. La France ne pourrait-elle pas internationaliser sa notion de sanctuarisation de l’Antarctique, excluant ainsi toute activité autre que la recherche scientifique ou en établissant des quotas touristiques stricts ? La réflexion autour de la mise en place d’aires marines protégées au large de ce continent nous semble également aller dans la bonne direction, que nous vous encourageons à suivre.

Cela nous conduit au quatrième chantier : le rôle de la France dans cet espace. La France doit tout d’abord augmenter de façon significative les budgets alloués à la recherche polaire. Écoutons l’alerte lancée par notre ambassadeur pour les pôles, M. Poivre d’Arvor, ainsi que les recommandations du rapport de nos collègues Girardin et Meyer Habib. Elle doit ensuite y intégrer notre armée. Celle-ci doit changer profondément de mission, ne plus être utilisée pour protéger les seuls intérêts économiques de la France. Si notre pays veut être champion de la protection de la planète, il doit utiliser son armée à protéger nos territoires, au premier rang desquels notre territoire maritime qui, je le rappelle, est le deuxième plus grand du monde. Grâce à sa capacité de projection, l’armée française dispose d’un moyen pour limiter les atteintes à l’environnement de nos espaces maritimes en cas de pollution ou de pêche illégale. C’est une mission qui doit être renforcée, a fortiori dans l’espace antarctique.

Ainsi, les députés communistes proposent qu’une part du budget des armées – par exemple celui que j’évoque souvent consacré à la modernisation de l’arme nucléaire, qui nous coûte 14,5 millions d’euros par jour – soit alloué au renforcement de la capacité de surveillance de ces territoires maritimes.

Ainsi, mieux faire connaître ce continent et ses enjeux au grand public ; créer un régime de responsabilité fort pour le protéger ; maîtriser strictement le tourisme ; renforcer le budget de la recherche polaire ; renforcer la mission de lutte contre les crimes environnementaux sont autant de chantiers qui auront un impact concret sur l’Antarctique, mais aussi, vous l’avez déjà tous dit, sur notre planète et sur notre avenir.

Les députés communistes voteront donc une mesure qui, nous l’espérons, permettra d’enclencher ces travaux.

Nous remercions Jacques Maire pour son excellent rapport ainsi que les administrateurs qui l’ont accompagné. Ce travail montre la capacité de l’Assemblée nationale a approfondir les sujets et à faire en sorte que le peuple français soit associé à l’Antarctique et qu’il soit son défenseur. (Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et FI ainsi sur les bancs des commissions.)

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Jean-Paul
Lecoq

Député de Seine-Maritime (8ème circonscription)

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