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Aménagement du territoire : instauration d’un bouclier rural au service des territoires d’avenir

Madame la présidente, monsieur le ministre, chers collègues, les députés communistes, républicains et du Parti de gauche soutiennent cette proposition de loi visant à instaurer un bouclier rural.
La France a un atout considérable : depuis 1945, ses territoires ruraux ont pu bénéficier de la présence forte des services publics. Grâce à cette présence dynamique, la République s’est enracinée dans chaque parcelle de nos territoires. Cet héritage de notre histoire, cette conquête sociale, a permis à chacun de nos concitoyens d’accéder à des droits fondamentaux : l’éducation, l’énergie, les transports ou la santé, mais aussi la justice, le logement ou l’emploi. Cette politique, en apportant une réponse aux besoins humains, est aussi un facteur déterminant pour un aménagement harmonieux du territoire.
Ce développement bénéfique subit depuis trente ans les coups de boutoir des libéraux de tous bords. L’interminable cortège des déréglementations, des suppressions de postes, des coupes budgétaires et des privatisations mettent en danger notre France rurale.
Les collectivités territoriales, dont les finances sont sciemment asséchées par l’État, peuvent de moins en moins répondre aux besoins des populations. La récente réforme les privera de près de trois mille élus, qui pourront de moins en moins relayer les exigences des populations, ce qui constitue un coup considérable porté à la démocratie locale.
Les services publics locaux sont ainsi directement menacés d’être abandonnés ou sacrifiés à la marchandisation et à la rentabilité. Pourtant, nos territoires ruraux sont des territoires d’avenir, et la proposition de loi de nos collègues socialistes a le mérite de le montrer.
Les citadins reviennent aujourd’hui vers les campagnes à la recherche d’une vie plus humaine, loin des centres-villes, bien souvent devenus des zones de spéculation immobilière, et de leurs périphéries, devenues des zones de relégation.
De plus en plus de nos concitoyens s’installent, quand ils le peuvent, à l’écart des agglomérations , enrayant ainsi les phénomènes d’exode rural et d’urbanisation démentiels qu’on croyait irrépressibles. Mais ce mouvement heurte la doctrine libérale, qui veut concentrer l’essentiel des investissements et des capitaux sur les seuls territoires qualifiés de performants, à même de s’inscrire dans la mondialisation économique.
Sous le prétexte de la course à la compétitivité, elle promeut une concurrence acharnée entre les territoires qui s’avère désastreuse. Dans cette dérive, les zones rurales dans lesquelles se battent nos agriculteurs, confrontés à la baisse insupportable de leurs revenus, et où s’accrochent des PME de proximité, sont de fait abandonnées par les pouvoirs publics, tout comme les quartiers populaires.
Il convient donc d’agir pour avant tout garantir la présence effective des services publics sur l’ensemble du territoire. C’est pourquoi cette proposition de loi va dans le bon sens.
Plusieurs dispositions de ce texte répondent à des questions centrales, comme celle de la démographie médicale.
Depuis de nombreuses années, les politiques libérales ont fortement atténué l’attractivité des territoires ruraux et donc réduit la présence de praticiens généralistes. L’instauration d’un temps de trajet maximal pour se rendre chez un médecin est une piste intéressante et il est devenu indispensable de supprimer le numerus clausus établi sous le prétexte fallacieux de limiter les dépenses de santé au détriment de l’humain.
Des maisons de santé implantées au cœur de bassins d’urgence médicale peuvent permettre une activité pluridisciplinaire, qu’il faut conforter par des formations universitaires décentralisées afin d’attirer et fidéliser les étudiants, favorisant ainsi leur future installation.
Enfin, pourquoi ne pas réfléchir à la possibilité d’un financement et d’une rémunération en cours d’études, en contrepartie d’un engagement à exercer sur une période définie dans une zone où la couverture médicale est insuffisante ?
De même, la présence effective de bureaux de poste de plein exercice doit être assurée. Il convient cependant d’être attentif à ce que les temps maximaux de trajet n’aient pas d’effet pervers et bien distinguer le bureau de poste du simple point contact. Pour cela, il est incontournable de s’attaquer aux logiques européennes de privatisation et de mise en concurrence qui ne peuvent qu’entraîner la fin du service universel et de la péréquation territoriale.
Enfin, obliger les banques à publier le volume des crédits alloués dans chaque canton permettra de dénoncer les disparités territoriales et l’exclusion bancaire qui sévit en milieu rural. Encore faut-il mettre en œuvre des leviers et des contraintes contre la spéculation financière afin de réorienter l’argent des banques vers le développement économique, avec des fonds régionaux pour l’emploi et la formation.
Pour toutes ces raisons, vous l’aurez compris, les députés communistes, républicains et du Parti de gauche voteront ce texte. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur les bancs du groupe SRC.)
 

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André
Chassaigne

Président de groupe
Député du Puy-de-Dôme (5ème circonscription)
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