L’énergie est au cœur de nos préoccupations ; aussi mon intervention se concentrera-t-elle sur le programme 174 Énergie, climat et après-mines et sur le programme 345 Service public de l’énergie.
Le programme 174 consacre quelque 9 milliards d’euros à la compensation des pertes subies par les fournisseurs de gaz et d’électricité après l’entrée en vigueur du bouclier tarifaire. Vous nous proposez cette dépense dans le seul dessein de maintenir coûte que coûte le système concurrentiel la tête hors de l’eau – car le cœur du réacteur de votre politique est bel et bien celui-ci : le marché concurrentiel de l’énergie. (Mme Clémence Guetté applaudit.) Si ces mesures ont un effet évident sur le porte-monnaie des Français, elles s’inscrivent dans une logique de fuite en avant. Tant que nous ne mettrons pas un terme à l’empilement des mécanismes libéraux imposés par la Commission européenne au nom de la concurrence, nous ne parviendrons pas à juguler la crise énergétique. Parmi ces mécanismes figurent les subventions publiques massives allouées aux entreprises privées productrices d’énergies renouvelables, l’accès régulé à l’énergie nucléaire historique – mortifère pour EDF –, et le système de tarification exponentielle voulant que la facture des consommateurs s’indexe en temps réel sur la Bourse. En France, des voix toujours plus nombreuses réclament de sortir le secteur de l’énergie de la concurrence et des marchés, et de revenir, partout en Europe, à des systèmes publics qui soient garants d’une énergie accessible à tous. (M. Matthias Tavel applaudit.)
Les députés communistes en sont convaincus et agissent en ce sens : seule la maîtrise publique de la production d’énergie – nucléaire et/ou renouvelable – pourra répondre à l’immense défi énergétique et climatique qui nous attend, et desserrer l’étau de nos dépendances énergétiques et géostratégiques à l’égard de nos grands voisins exportateurs d’énergie fossile – tout particulièrement la Russie.
Avec le bouclier tarifaire, vous avez voulu éviter que l’inflation des prix de l’énergie n’affecte les 12 millions de Français en situation de précarité énergétique, pour lesquels l’électricité est devenue un luxe. Sachant toutefois qu’avec une hausse de 15 % des factures l’année prochaine, le bouclier tarifaire montre clairement ses limites. (M. Antoine Léaument applaudit.)
Pour tenter de mieux protéger les ménages les plus modestes, le Gouvernement a annoncé, dans la foulée, qu’un nouveau chèque exceptionnel serait adressé cet hiver à 40 % de ménages ayant les revenus les plus modestes. En 2023, ce chèque atteindra 200 euros pour les deux premiers déciles et 100 euros pour les suivants, soit une dépense totale de 1,8 milliard. Un constat s’impose néanmoins : le montant du chèque énergie ne suffira pas – loin de là – à sortir les ménages concernés de la précarité. Un rapport de l’Observatoire national de la précarité énergétique (ONPE), publié en 2018, indique ainsi que le montant nécessaire pour réduire l’écart des factures énergétiques des ménages précaires par rapport à la moyenne est d’environ 700 euros par an. Pour être efficace, il faudrait également augmenter le chèque énergie à hauteur de l’inflation prévue en 2023. En effet, l’inflation ne saurait servir de mécanisme incitatif aux économies d’énergie des plus modestes, qui subissent les conséquences de l’action gouvernementale, notamment en matière de rénovation de l’habitat. Certes, les dotations de MaPrimeRénov’ augmentent, mais, comme l’a souligné le HCC, le dispositif reste trop centré sur les petits travaux ; il ne favorise pas suffisamment les rénovations globales qui, seules, permettront de s’attaquer à court terme au parc de 7 millions de logements très énergivores. (Mme Clémence Guetté applaudit.)
Nous ne pourrons longtemps contourner les débats de fond concernant la satisfaction des besoins et la nécessité d’en revenir à un système de fixation des prix qui reflète les coûts de production de l’énergie. Dans l’immédiat, il serait urgent de s’inspirer de la dérogation de sortie du marché appliquée dans la péninsule Ibérique, et de corréler le tarif de l’énergie au coût réel de production dans chaque mix national. (Mme Eva Sas applaudit.) Cette solution est en germe dans les propositions des organisations syndicales qui vous seront soumises. Vous n’en prenez malheureusement pas le chemin, aussi voterons-nous contre ce budget. (Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LFI-NUPES, SOC et Écolo-NUPES.)