Interventions

Budget de l’État

PLF pour 2021 - Conseil et contrôle de l’Etat

Nous examinons les crédits de trois missions et d’un budget annexe, dont nous avons noté la stabilité. Je m’en tiendrai à quelques remarques sur les ambitions que nous pouvons donner au CESE et à la CNDA.

Cette année, vous le savez, le CESE a d’une certaine manière réussi à s’imposer dans le champ institutionnel et médiatique, grâce aux travaux de la convention citoyenne sur le climat. Après la crise des gilets jaunes, le Président de la République a demandé à des citoyens tirés au sort de travailler d’arrache-pied pour formuler des propositions ambitieuses sur le climat. Une fois leurs travaux achevés, les 150 participants ont été invités à l’Élysée, où le chef de l’État leur a annoncé en grande pompe, le 29 juin, qu’il s’engageait à faire passer en conseil de défense écologique ou à soumettre au Parlement toutes leurs propositions, sans filtre, à l’exception de trois d’entre elles : la baisse de la vitesse maximale à 110 kilomètres heure sur autoroute, l’inscription de la protection de l’environnement dans le préambule de la Constitution, et la taxe de 4 % sur les dividendes.

Trois mois plus tard, pour ceux qui avaient peut-être un peu d’espoir, c’est la désillusion. Le Gouvernement se lance en cette rentrée dans l’effilochage des propositions et, semaine après semaine, une par une, les mesures fortes de la convention sont abandonnées. On peut même dire que sur certaines, le recul est extrêmement fort.

Face à la grogne légitime alors exprimée par les membres de la convention citoyenne, et par nous autres, parlementaires, soucieux que les propositions formulées trouvent une traduction concrète dans le projet de loi de finances pour 2021, le Président de la République s’est contenté, dans un courrier adressé à l’association des 150 citoyens de la convention climat, de répondre que certaines « propositions font débat dans notre société », et que certaines des « mesures méritent des ajustements ». Pour notre part, nous n’étions pas dupes des intentions réelles du Président de la République qui, en matière d’écologie, sait souvent avoir de grandes envolées lyriques alors qu’il a dans les faits le plus grand mal à contrevenir à ce que dicte la toute-puissance du marché.

Disons-le, cette attitude profondément méprisante pour les travaux menés par nos concitoyens dégrade un peu plus notre démocratie et la confiance en l’État. Chacun s’interroge désormais sur la pertinence des conventions citoyennes et de surcroît sur celle du CESE, si ce dernier est condamné à devenir l’objet de propagande du Gouvernement.

Dans une Ve République qui a drastiquement réduit l’expression et les prérogatives du Parlement – je crois que nous avons pu en faire l’expérience une nouvelle fois aujourd’hui même – la démocratie participative dans les mains du pouvoir exécutif est condamnée à devenir l’instrument de la majorité. Le destin réservé aux 149 propositions de la convention citoyenne en est hélas ! le funeste témoignage.

Cette situation doit nous amener à reconsidérer, plus que jamais, la pertinence institutionnelle du Conseil économique, social et environnemental. Pour notre part, ce n’est pas un secret, nous considérons que l’heure est à une innovation démocratique, à l’instauration d’une chambre d’un nouveau genre, réellement représentative, avec une dose importante de tirage au sort. Nous pensons que la démocratie participative et la délibération permanente ont toute leur place dans notre République, à condition qu’elles soient complémentaires d’un régime parlementaire qui aujourd’hui nous fait plutôt défaut.

Je souhaite profiter de la minute qui me reste pour évoquer la Cour nationale du droit d’asile. Depuis maintenant trois ans, nous déplorons le traitement réservé par le Gouvernement à la CNDA, la plus grande juridiction administrative du pays par le nombre de décisions rendues. Depuis trois ans, nous rappelons qu’il ne peut y avoir de République sans politique humaniste du droit d’asile, que c’est à ce prix que nous garantirons un accueil digne et sécurisé des nouveaux venus dans notre pays.

À ce titre, l’ordonnance du 13 mai dernier prévoyant que, pendant la période d’état d’urgence sanitaire, la Cour pouvait statuer sur tous les dossiers en audience à juge unique et élargissant les possibilités de recourir à la vidéo-audience n’était pas de nature à nous rassurer. Même si le Gouvernement a été désavoué par le Conseil d’État, nous savons qu’il entend poursuivre sa course folle aux statistiques. Or nous pensons que cette politique est parfaitement contraire aux intérêts des demandeurs d’asile, mais aussi des Françaises et des Français qui souhaitent que le traitement de ces dossiers se fasse dans des conditions adaptées.

Au prix de cette politique, la CNDA reste donc aujourd’hui sous tension à l’aube d’un confinement qui ne sera pas sans conséquence sur le nombre de reports de procédure et sur l’explosion à venir des dossiers en traitement. Pour ces raisons, notamment, nous voterons contre les crédits alloués à ces missions. (Applaudissements sur les bancs du groupe FI.)

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