Interventions

Budget de l’État

PLF 2020 - Mission relations avec les collectivités territoriales

Alors que l’Assemblée examinera bientôt le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique, le projet de budget pour 2020 ne traduit aucune prise de conscience par l’État de la nécessité d’accorder aux collectivités territoriales, et en particulier aux communes, les moyens d’exercer leurs compétences toujours plus importantes pour la vie quotidienne de nos compatriotes. Les deux programmes que comporte cette mission et les deux articles qui s’y rattachent ne révèlent pas la véritable nature des relations entre l’État et les collectivités territoriales qui figurent au cœur de votre projet de budget pour 2020. En revanche, la réforme de la fiscalité locale et la suppression précipitée de la taxe d’habitation auront des conséquences bien plus graves dans la mesure où elles touchent au principe, essentiel, d’autonomie financière des collectivités territoriales.

Le Gouvernement tente tout naturellement de rassurer les maires à la veille de leur congrès et des élections municipales. Il met en avant le projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique dans l’espoir d’apaiser la colère des élus locaux, qui ne cesse d’enfler.

Malgré tout, la réforme de la fiscalité locale mettra à mal l’édifice patiemment construit de la commune, une commune qui prend soin de la population, pare les crises, amortit les morsures des politiques libérales, pallie l’absence des services publics. En supprimant la taxe d’habitation, y compris pour les foyers les plus riches, vous affaiblissez les communes et la démocratie de proximité.

L’autonomie fiscale des collectivités territoriales ressort de ce projet de budget plus figée qu’elle ne l’était. C’est encore plus flagrant pour ce qui concerne les départements. Souvent en proie à de graves difficultés financières, ne disposant pas de solutions pour mener leurs politiques sociales, ils sont les grands perdants des récentes mesures fiscales. Nous le savons, les départements sont menacés et leurs marges de manœuvres s’amoindrissent.

Cette année, la dotation globale de fonctionnement est stabilisée à 28,6 milliards d’euros et les concours financiers de l’État aux collectivités territoriales à 48,7 milliards d’euros. Hélas, cette stabilisation, hors inflation, fait suite à quatre années de baisse des dotations, qu’elle est loin de combler.

Ainsi, en Seine-Saint-Denis, la DGF a baissé de 26 % entre 2013 et 2017 pour n’augmenter que de 5 % ces deux dernières années. Dans le Val-d’Oise, elle a diminué de 20 % durant la même période pour n’augmenter que de 2 % ces deux dernières années.

Il n’y a pas de rattrapage ni de volonté de rattrapage. Le projet politique pour les collectivités est de les placer dans la trajectoire des finances publiques, de les faire entrer au chausse-pied dans le pacte de stabilité, de les contraindre à contractualiser. Alors que le local porte l’investissement public dans notre pays, nous ne sommes pas revenus au niveau de 2012. Les verrous de la politique de stabilité le permettent d’autant moins qu’elle s’accompagne, sur le terrain, de quelques tours de passe-passe au détriment des collectivités, pour l’investissement comme pour le fonctionnement.

Tour de passe-passe quand l’État, qui numérise et réduit les services publics à tour de bras, fait appel aux budgets des collectivités pour assurer le maintien de ceux-ci. Tour de passe-passe quand la dotation d’équipement des territoires ruraux doit être partagée entre un plus grand nombre de communes. Tour de passe-passe quand le financement de la péréquation au sein de la dotation globale de fonctionnement s’opère par redéploiement. Si le principe de solidarité avec les quartiers prioritaires de la politique de la ville et avec la ruralité est établi, le Gouvernement n’accorde pas les moyens indispensables à sa concrétisation. En Île-de-France, par exemple, les communes ne peuvent répondre aux demandes de l’État et de l’Agence nationale pour la rénovation urbaine, l’ANRU, faute d’une péréquation suffisante.

Cette mission aurait pu concrétiser le tournant écologique. L’année 2020 aurait pu être celle d’un véritable virage dans la lutte contre le changement climatique et l’effondrement de la biodiversité. La dotation de soutien à l’investissement local aurait pu être un levier utile en ce qu’elle permet aux collectivités territoriales de renforcer leurs actions en faveur de la transition écologique. Hélas, une nouvelle fois, malgré l’importance des enjeux, vous avez jugé que la stabilité suffirait largement. Pourtant, cette stabilité ne compensera pas la baisse drastique du financement des collectivités territoriales, décidée année après année, et empêchera les élus locaux d’agir.

Pour toutes ces raisons, le groupe de la Gauche démocrate et républicaine votera contre ce projet de budget. (Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.)

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Marie-George
Buffet

Députée de Seine-Saint-Denis (4ème circonscription)

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