Actualités

Questions au gouvernement

Taxe Zucman

En février, l’Assemblée votait, grâce aux seules voix de la gauche, une proposition de loi instaurant une taxe de 2 % sur le patrimoine des plus riches, communément appelée « taxe Zucman ». (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, SOC et EcoS.) La semaine dernière, lors de l’examen du texte au Sénat, le camp présidentiel et la droite ont uni leurs voix pour le rejeter.
De quoi s’agit-il ? De s’assurer que les personnes dont le patrimoine est supérieur à 100 millions d’euros s’acquittent d’un impôt représentant au moins 2 % de leur fortune. La taxe concernerait les 4 000 contribuables les plus riches de notre pays, soit 0,01 % de la population, et rapporterait 15 à 20 milliards d’euros à l’État. Pourtant, le gouvernement, bien qu’il recherche désespérément 40 milliards, s’est férocement battu contre cette mesure, préférant une taxe à 0,5 % excluant les biens professionnels estimée quarante fois moins rentable.
Monsieur le ministre de l’économie, je vous mets en garde : en défendant ainsi coûte que coûte les ultrariches, vous fragilisez la République. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes GDR, SOC et EcoS.) Le consentement à la progressivité de l’impôt en est un des fondements puisque ce principe permet de mieux répartir les richesses. Vous préférez récupérer 40 milliards d’euros en supprimant des moyens à la santé, à l’éducation, à la justice, à la police ou aux collectivités locales au lieu de mettre à contribution les plus grosses fortunes françaises, dont le patrimoine a pourtant bondi de 200 à 1 200 milliards d’euros au cours des dix dernières années grâce à votre politique fiscale. Et comment pouvez-vous invoquer le risque d’exil des grandes fortunes alors que toutes les études démontrent qu’il n’existe pas ?
Pourquoi refuser ainsi de refuser de verser la plus petite goutte de justice sociale dans un océan d’austérité, quitte à fracturer durablement le pays ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et sur quelques bancs du groupe EcoS. –⁠ M. Dominique Potier applaudit également.)

M. Éric Lombard, ministre de l’économie, des finances et de la souveraineté industrielle et numérique
Une proposition de loi instaurant un impôt plancher de 2 % sur le patrimoine des plus riches a effectivement été rejetée par le Sénat. Elle ne répondait pas aux objectifs du gouvernement, qui cherche à garantir l’attractivité de la France envers les investissements afin de développer l’économie nationale. Je n’ai pas exactement les mêmes chiffres que vous sur le nouvel impôt qui était proposé et dont nous considérons qu’il aurait pu concerner 2 000 personnes pour un rendement cinq fois supérieur à celui de l’ISF, payé par 350 000 contribuables. Il est par ailleurs probable que cet impôt aurait été considéré comme inconstitutionnel.
Avec intérêt, j’écoute les commentaires et je lis les tribunes affirmant que des études établissent qu’un tel impôt n’aurait pas d’effet sur l’expatriation. Mais comme aucune taxe de ce type n’a jamais été mise en place dans aucun pays, je ne sais pas bien sur quoi se fondent ces études. En revanche, nous avons vu, les deux fois où un impôt sur la fortune a été instauré en France, que les gros patrimoines étaient mobiles. De plus, cette mobilité est encore plus facile à organiser dans le monde actuel.
Par ailleurs, une imposition à hauteur de 2 % du patrimoine obligerait les entreprises qui se développent soit à verser des dividendes importants soit à céder des parts, deux options qui ne nous paraissent pas souhaitables.
Je partage toutefois vos préoccupations et, au sein de l’OCDE, nous travaillons sur un impôt minimum sur le patrimoine dans le cadre de ce qu’on appelle le pilier 2. L’OCDE a approuvé une première étape, qui porte sur un impôt minimal pour les entreprises, et nous continuons à soutenir des réflexions au sein de cette organisation. En effet, ce n’est que partagées par les pays de l’OCDE que des taxations du patrimoine pourront avoir un avenir. En revanche, dans l’environnement actuel, il nous semble préférable de maintenir les impôts à leur niveau actuel pour faire revenir les investissements dans notre pays. C’est ce que nous faisons avec la flat tax et avec la fin de l’ISF. (M. Paul Midy applaudit.)

Imprimer cet article

Thématiques :

Affaires européennes Affaires économiques Lois Finances Développement durable Affaires sociales Défense nationale Affaires étrangères Voir toutes les thématiques