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Questions au gouvernement

Relance du pouvoir d’achat et de la politique industrielle

M. le président. La parole est à M. André Gerin, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
M. André Gerin. Avec la crise financière, la France paye cash l’abandon industriel dont elle a été victime depuis Georges Pompidou. La France est blessée, attaquée par les ogres de la finance, victime de ce que j’appelle le pétainisme industriel.
Il faut empêcher les pertes d’emplois industriels, éviter l’effondrement de notre industrie. La consommation demeure un pilier essentiel de la croissance. Il faut relancer le pouvoir d’achat des salaires, des pensions, des retraites. C’est vital.
Je propose, avec les députés communistes, un plan ORSEC pour les PME de moins de vingt salariés. Il faut protéger nos secteurs stratégiques. Actuellement, on nous vole des activités du fait de l’insuffisance des fonds souverains. Il faut mobiliser l’épargne pour aider l’emploi dans les régions. Il faut moderniser l’assurance crédit, qui exerce un véritable droit de vie et de mort sur les entreprises, notamment les plus petites d’entre elles - il y a des chefs d’entreprise qui sont traités comme des délinquants pour 3 000 euros de découvert. Il faut réformer l’accès aux marchés publics, qui privilégient encore les grands groupes et demeurent aléatoires pour les PME. Il faut en finir avec les délais de paiement insupportables, en se souvenant que les plus mauvais élèves sont souvent l’État et les grands services publics. Il faut, enfin, instaurer une fiscalité équitable à l’échelle européenne pour les PME, loin du maquis technocratique qui profite aux privilégiés.
Monsieur le premier ministre, l’État va-t-il intervenir pour répondre aux préoccupations vitales des PME, avec des dispositions ciblées pour les équipementiers et les sous-traitants ?
M. Patrick Roy. Ça m’étonnerait !
M. André Gerin. Enfin, il faudrait se mobiliser pour relocaliser des activités industrielles abandonnées depuis vingt ou trente ans, et reconstituer des filières françaises, créatrices d’emplois, à l’exemple de l’Allemagne.
M. Jean Auclair. La question !
M. André Gerin. Monsieur le Premier ministre, dans l’intérêt de la France, allez-vous prendre ces mesures que réclament les acteurs de l’économie et de la production ? (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes GDR et SRC.)
M. le président. La parole est à M. François Fillon, Premier ministre.
M. François Fillon, Premier ministre. Vous avez daté de la fin du mandat de Georges Pompidou les difficultés de l’industrie française ; j’en conclus que vous avez fait, avec l’ensemble des membres de cette assemblée, une autocritique forte sur les politiques menées dans les années 1980 et 1990 ! (Applaudissements sur de nombreux bancs des groupes UMP et NC.)
J’en conclus aussi que vous allez soutenir les mesures que nous proposons, puisque la plupart de celles que vous venez d’évoquer figurent dans le plan de relance qui a été proposé par M. le Président de la République. (" Non ! « sur les bancs des groupes GDR et SRC.)
Vous nous dites qu’il faut investir dans les industries stratégiques : nous avons annoncé la création d’un fonds stratégique qui est déjà doté de vingt milliards d’euros et qui va investir dans les secteurs stratégiques. Nous avons d’ailleurs déjà commencé en prenant une participation dans les Chantiers de l’Atlantique.
Vous nous dites ensuite qu’il faut réformer l’assurance crédit : nous sommes en train de le faire. Nous avons déjà mis en place une garantie d’État pour éviter l’effet de blocage dû à l’excès de prudence de l’assurance crédit.
Vous nous dites encore qu’il faut réduire les délais de paiement : j’imagine que vous avez voté la loi de modernisation de l’économie, qui a décidé de réduire les délais de paiement à soixante jours pour le secteur public comme pour le secteur privé !
Vous nous dites encore qu’il faut réformer les marchés publics : nous vous proposerons, dès le début du mois de janvier, une réforme profonde des marchés publics, en particulier pour aider les PME bloquées par une complexité aussi gênante pour les collectivités locales que pour les entreprises elles-mêmes.
Vous nous dites enfin que la fiscalité européenne sur l’entreprise doit devenir plus équitable : comme notre fiscalité sur les entreprises est la plus élevée d’Europe,...
MM. André Gerin et Roland Muzeau. Ce n’est pas vrai !
M. François Fillon, Premier ministre. ...il en découle naturellement que vous souhaitez, avec nous, la réduire !
M. Jean-Paul Lecoq. Et le pouvoir d’achat ?
M. François Fillon, Premier ministre. Je suis heureux, monsieur Gerin, que nous puissions progresser ensemble dans cette direction. ( » Très bien ! " sur plusieurs bancs des groupes UMP et NC.)
Mais vous avez aussi indiqué que vous souhaitiez une relance par la consommation. Permettez-moi de vous dire qu’une telle relance n’aurait pas beaucoup de sens dans un contexte de baisse rapide des prix et de baisse des taux d’intérêt ; il ne se trouve presque aucun grand économiste pour la recommander et elle n’est pratiquée en Europe que par la Grande-Bretagne, qui seule a vu sa consommation baisser aussi drastiquement, et qui a abandonné depuis longtemps son industrie nationale.
Mais vous devez, je pense, garder le souvenir de la glorieuse relance par la consommation de 1981, quand, soutenant le Gouvernement de l’époque, vous aviez décidé de créer massivement des emplois publics, d’augmenter massivement les salaires, de réduire le temps de travail et l’âge de départ à la retraite ! (Mouvements divers.)
Le résultat, ce fut une augmentation sans précédent du chômage (Protestations sur les bancs des groupes SRC et GDR), une augmentation de l’inflation, une augmentation de nos déficits intérieurs et extérieurs. (Même mouvement.) Le résultat, ce fut le fameux plan de rigueur, la dévaluation de la monnaie, le gel des salaires et des prix - c’est le plan que vous appelez de vos voeux depuis dix-huit mois et qui, comme vous pouvez le constater, n’est pas au rendez-vous cette fois-ci !
Je sais bien qu’il ne faut pas toujours regarder dans le rétroviseur de l’histoire ; mais il est parfois utile de tenir compte des leçons qu’elle nous offre, surtout quand, comme le groupe communiste, on en a été un acteur important ! (Applaudissements sur les bancs des groupes UMP et NC.)

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André
Gerin

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