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Questions au gouvernement

Rapprochement entre Fincantieri et Naval Group

Monsieur le ministre de l’économie et des finances, sous les auspices de l’État, Fincantieri et Naval Group veulent créer une entité dans laquelle l’Italien tiendra une place prépondérante.
Ce projet signe la fin de la vocation historique de l’entreprise, qui consiste à pouvoir répondre à tous les besoins de notre marine. Il signe la montée en puissance irréversible d’une logique d’actionnaire au sein d’un groupe qui opère pourtant dans le secteur stratégique de l’armement.
On va nous rassurer, comme avec STX ou avec Alstom-Siemens. On va nous abuser en nous parlant d’un Airbus de l’industrie navale ! Mais Airbus, c’est la coopération de deux États, pas le bradage d’un fleuron industriel français.
On va nous épater : ce mariage conditionnerait l’obtention d’un contrat de 9 frégates avec l’Australie pour plus de 25 milliards d’euros, il faudrait donc le hâter.
Mais Fincantieri, c’est le loup dans la bergerie avec la bénédiction du berger, l’État français. Fincantieri a mangé STX pour s’offrir la plus grande capacité de fabrication de navires en Europe. Son PDG s’est vanté d’avoir acquis un « morceau de France ».
Avec Naval Group, il pourra produire des navires militaires à Saint-Nazaire avec un taux de marge brute de 26 %, contre 7 % pour un paquebot.
À Cherbourg, à Brest, à Lorient, on s’inquiète. La dot est belle, mais en contrepartie nous aurons la logique d’actionnaire : externalisation de ce qui rapporte le moins et suppression d’emplois pour les doublons.
Le carnet de commandes de Naval Group est plein, et pendant que Fincantieri tourne autour de la mariée, l’Italie commande deux sous-marins aux Allemands.
M. Christian Hutin. Tout à fait !
M. Sébastien Jumel. Monsieur le ministre, quand allez-vous associer l’Assemblée nationale à un sujet aussi stratégique pour notre souveraineté nationale et militaire ? Je doute que le candidat à la primaire aurait cautionné ce que le ministre de l’économie et des finances fait aujourd’hui. Réveillez en vous ce qui reste de De Gaulle ! Monsieur le ministre, il est temps de réagir ! (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR ainsi que sur plusieurs bancs des groupes FI, NG, UDI-Agir et LR.)
M. le président. La parole est à M. le ministre de l’économie et des finances.
M. Bruno Le Maire, ministre de l’économie et des finances. Monsieur le député, la seule logique qui est la nôtre, c’est une logique industrielle.
La seule logique qui est la nôtre, c’est de construire des champions industriels européens dans un monde où la compétition industrielle est toujours plus dure.
Que voulez-vous ? Laisser l’industrie navale française seule face à l’émergence de géants chinois ou américains ?
M. Alexis Corbière et M. Loïc Prud’homme. Oui !
M. Bruno Le Maire, ministre. Laisser nos champions industriels ferroviaires seuls face à la menace des géants industriels chinois, ou être capables de faire bloc avec les meilleurs industriels européens ?
M. Christian Hutin. Jamais !
M. Bruno Le Maire, ministre. Nous avons fait ce choix, que nous revendiquons, et qui est un choix gaulliste, de rassembler les forces européennes pour défendre notre industrie nationale. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM et sur plusieurs bancs du groupe MODEM.)
M. Éric Coquerel. Sous domination étrangère !
M. Bruno Le Maire, ministre. Ne confondez pas, par ailleurs, STX et Fincantieri. Oui, nous avons voulu reprendre la main. Oui, nous avons refusé l’accord qui était celui du précédent gouvernement, qui visait à vendre STX à Fincantieri, en garantissant à ce dernier un contrôle à plus de 54 % de l’ensemble de l’entreprise.
M. Stéphane Le Foll. Ce n’est pas vrai !
M. Bruno Le Maire, ministre. Nous avons révisé le pacte d’actionnaires.
M. Alexis Corbière. Ça revient au même !
M. Bruno Le Maire, ministre. Nous avons même fait ce qui devrait vous plaire : une nationalisation temporaire pour garantir les intérêts français.
Au bout du compte, nous avons réussi à obtenir un partage équitable…
M. Sébastien Jumel. Non !
M. Bruno Le Maire, ministre. …pour que, pendant les douze années qui viennent, nous puissions garantir le contrôle des investissements, le respect des engagements en termes d’emplois à Saint-Nazaire, et l’assurance que les technologies de pointe ne partiront pas dans des pays étrangers.
M. Stéphane Le Foll. Pas plus, c’était déjà dans le contrat !
M. André Chassaigne. Vous savez que ce n’est pas vrai, ce que vous dites !
M. Bruno Le Maire, ministre. S’agissant de Naval Group, ne parlez pas de pacte d’actionnaires. Il n’est pas question d’un pacte d’actionnaires entre Fincantieri et Naval Group. Il est question d’un rapprochement industriel et militaire pour les navires de surface, qui ne concerne pas les sous-marins.
Avec la ministre de la défense, nous sommes allés à Rome il y a quelques jours, pour nous permettre de renforcer l’industrie navale militaire française. (Applaudissements sur les bancs du groupe REM et sur quelques bancs du groupe MODEM.)
M. Sébastien Jumel. Venez à Cherbourg !

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