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Questions au gouvernement

Etat d’urgence et mouvements sociaux

La parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour le groupe de la Gauche démocrate et républicaine.
Mme Jacqueline Fraysse. Le 19 novembre dernier, dans les circonstances dramatiques et inédites que chacun connaît, les députés du Front de gauche ont estimé que la prorogation de l’état d’urgence que vous avez demandée, monsieur le Premier ministre, était justifiée pour une durée limitée, dans un cadre strictement défini.
M. Jacques Krabal. Bravo !
Mme Jacqueline Fraysse. Conscients que l’état d’urgence porte atteinte aux libertés, cette décision n’a pas été simple à prendre tant l’équilibre entre l’exigence de liberté et celle de sécurité est extrêmement précaire.
C’est pourquoi, monsieur le Premier ministre, une particulière vigilance de votre part s’impose. C’est aussi ce qui nous a conduits à exiger la mise en place d’un contrôle parlementaire hebdomadaire.
Pourtant, plusieurs événements vécus comme des excès nous sont d’ores et déjà signalés. En aucun cas l’état d’urgence ne peut signifier l’interpellation brutale et les gardes à vue sans fondement de citoyens n’ayant rien à se reprocher, ce qui cultive un climat de peur, d’insécurité et de division contre lequel, monsieur le Premier ministre, vous dites, à juste titre, vouloir lutter.
L’entrave constatée à certaines expressions citoyennes et syndicales nous inquiète également. En effet, comment comprendre que les marchés de Noël, très fréquentés, soient autorisés, alors que des rassemblements sociaux pacifiques peuvent faire l’objet d’une interdiction ?
Plusieurs députés du groupe Les Républicains. Pacifiques ?
Mme Jacqueline Fraysse. Face à cette situation, nous vous demandons, monsieur le Premier ministre, de rappeler quelles mesures vous comptez prendre pour empêcher certains excès constatés sans pour autant que soient entravées les légitimes interventions militantes et citoyennes inhérentes à l’exercice démocratique le plus élémentaire ? (Applaudissements sur les bancs du groupe de la Gauche démocrate et républicaine et sur certains bancs du groupe écologiste.)
Mme la présidente. La parole est à M. le ministre de l’intérieur.
M. Bernard Cazeneuve, ministre de l’intérieur. Madame la députée, je veux vous confirmer que l’état d’urgence n’a pas du tout pour vocation d’empêcher des formes d’expression citoyenne ou militante. Ce n’est ni son esprit ni la manière dont je souhaite qu’il soit mis en œuvre par les préfets de la République. Je vous le dis très clairement.
Certaines manifestations, du fait de la présence d’individus violents, ont fait l’objet d’interventions des forces de l’ordre, dans les conditions que nous savons, et de l’enclenchement de l’action publique, sous l’autorité du procureur de la République. C’est aussi cela, l’État de droit.
Mais j’ai donné des instructions aux préfets pour que chaque rassemblement pacifique permettant l’expression de revendications ou d’attentes citoyennes puisse être autorisé, dès lors que toutes les conditions sont réunies. Les préfets ont mission d’organiser les relations avec les acteurs concernés, pour que cela soit possible. Ce week-end, soixante rassemblements pacifiques ont eu lieu, parce que des militants responsables et sincères les ont organisés, en étroite liaison avec les préfets.
Les rassemblements organisés par des organisations syndicales pourront avoir lieu dans le même esprit. L’interdiction de manifester, qui prévalait, a été levée hier soir, à minuit. Elle n’est reconduite que sur des territoires particuliers où des risques précis existent. Il n’y a donc pas d’interdiction de manifester à portée générale – contrairement à ce que j’ai pu lire dans certains textes ou manifestes fort mal informés.
C’est la raison pour laquelle je souhaite que le contrôle parlementaire s’exerce. Comme j’ai eu l’occasion de vous l’indiquer, madame la députée, ainsi qu’à votre groupe – ces propos s’adressent à l’ensemble des parlementaires de tous les groupes – lorsque des manquements et des difficultés existent, ils doivent être signalés. Le Premier ministre réunira, à dix-sept heures, l’ensemble des groupes politiques de la représentation nationale, pour que ces règles soient définies en bonne intelligence avec elle. (Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe socialiste, républicain et citoyen et sur certains bancs du groupe écologiste.)

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