Madame la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation, jeudi dernier, sous le prétexte de rendre les universités « plus fortes » et de casser la concurrence avec les grandes écoles, le Président de la République a posé les jalons d’un projet de privatisation des universités. « On ne pourra pas rester durablement dans un système où l’enseignement supérieur n’a aucun prix pour la quasi-totalité des étudiants », a-t-il déclaré – ce n’est pas nous qui l’avons inventé, madame la ministre ! – après avoir reconnu, en creux, l’échec d’un quinquennat durant lequel il s’est contenté de colmater les brèches.
Alors que les étudiants font la queue pour obtenir de l’aide alimentaire, qu’un jeune sur trois renonce à des soins médicaux, que pour 56 % d’entre eux, l’accès aux produits de première nécessité est devenu difficile, le Président répond : université payante. C’est une honte, une insulte à tous ces jeunes que de faire croire que les études n’ont à leurs yeux aucun prix, alors qu’il leur faut payer les frais de scolarité, le loyer, la nourriture, le transport, avec un système de bourse qui ne fonctionne pas. Devons-nous vous rappeler que l’école française est l’une des plus inégalitaires, que les enfants d’ouvriers représentent seulement 12 % des étudiants à l’université et 3 % dans les grandes écoles, alors que les ouvriers représentent plus de 20 % de la population ?
À la société d’exclusion que vous nous préparez méthodiquement depuis cinq ans, nous, communistes, répondons « revenu étudiant », pour donner à chacun les moyens d’étudier. Nous refusons qu’ils hypothèquent leurs chances de réussite en cumulant études et travail. Vous rêvez d’une université à l’américaine, avec des jeunes endettés sur des dizaines d’années : nous voulons construire une société d’émancipation par le savoir pour toutes et tous.
Madame la ministre, pouvez-vous dire aux jeunes de notre pays combien ils devront débourser en plus pour avoir accès à une formation supérieure ? (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR et quelques bancs du groupe FI.)
La parole est à Mme la ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
Mme Frédérique Vidal, ministre de l’enseignement supérieur, de la recherche et de l’innovation.
C’est vraiment intéressant, monsieur le député, de vous voir aller toujours plus loin dans l’interprétation. Une fois de plus, je vous invite à relire le discours du Président de la République.
Que souhaitent les jeunes aujourd’hui ? Vous êtes-vous récemment entretenu avec des étudiants sur ce sujet ? Nombre de ceux qui ont un baccalauréat technologique souhaitent accéder aux IUT – instituts universitaires de technologie. C’est possible, désormais que la moitié des places leur est réservée, et cette mesure, c’est cette majorité, et non pas vous, qui l’a votée. Aujourd’hui, 75 % des étudiants de BTS – brevet de technicien supérieur – sont des bacheliers professionnels. C’était leur souhait le plus cher et c’est encore cette majorité qui l’a exaucé, et non vous. Quand on vous propose de consacrer plus de 5 milliards à l’accompagnement des étudiants de premier cycle, là encore vous refusez de voter pour, bien sûr. Quand on vous propose 25 milliards pour enfin réarmer notre recherche, c’est toujours non, bien sûr, ça ne suffit pas, mais parfois le mieux est l’ennemi du bien.
Le Président de la République l’a dit, et c’était la moindre des choses, pour réparer notre enseignement supérieur et notre recherche. Nous devons aller encore plus loin. Nous devons encore plus accompagner les jeunes vers l’insertion professionnelle. Je ne vois pas qui pourrait être contre cette idée.
M. Jean-Paul Lecoq.
À quel prix pour eux ?
M. Hubert Wulfranc.
Oui, combien vont-ils payer en plus ? Affichez la couleur avant les élections !
Mme Frédérique Vidal, ministre.
À quel prix pour eux, monsieur le député ? Mais il n’y a que vous qui vous posez cette question ! (Exclamations sur les bancs du groupe GDR.) Je vous le demande une fois de plus : pourquoi agitez-vous des propos qui n’ont jamais été ni dits ni écrits – c’est la quatrième fois que je vous le dis ?
M. Jean-Paul Lecoq.
Il l’a dit !
Mme Frédérique Vidal, ministre.
Ayez l’honnêteté intellectuelle de lire la totalité de la phrase prononcée par le Président de la République et la totalité de son discours, où il exprime sa volonté de replacer l’université française à sa place, celle de l’excellence, ainsi que de replacer les étudiants au cœur des projets de société en luttant réellement contre la précarité, ce que personne sur ces bancs, avant cette majorité, n’a été capable de faire depuis plus de vingt ans. (Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.)