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Questions au gouvernement

Crise de la démocratie

Il y a vingt ans, presque jour pour jour, le peuple français s’exprimait pour la dernière fois par référendum. Le 29 mai 2005, il rejetait massivement le traité constitutionnel européen,… (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et LFI-NFP ainsi que sur plusieurs bancs du groupe EcoS.)…contre l’avis confiant d’une majeure partie des politiques, des médias et des sondeurs.
Toutefois, passé le traumatisme des élites, ce refus populaire fut rapidement piétiné, balayé, trahi par la ratification du traité de Lisbonne en 2008. (Applaudissements sur quelques bancs des groupes GDR et LFI-NFP.) En 2012, la promesse de campagne d’une renégociation sera reniée dès le lendemain de l’élection, aggravant davantage la défiance des Français envers leurs gouvernants. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LFI-NFP et EcoS.)
Depuis, cette crise démocratique n’a cessé de croître. En 2023, un nouveau seuil a été franchi : le gouvernement, aveugle ou inconscient, a imposé par 49.3, sans vote, la réforme des retraites, malgré l’opposition de la majorité des Français et une mobilisation sociale historique.
Il a ensuite utilisé l’obstruction pour bloquer tous les débats sur le sujet. Et le président vient de refuser, il y a quelques jours, la proposition d’organiser un référendum. Une plaie béante s’est ouverte dans notre démocratie et les Français ne sont pas près de tourner la page.
Le 5 juin, le débat reviendra dans l’hémicycle lors de la discussion en séance publique de notre proposition de résolution visant à abroger cette réforme brutale et injuste. (Applaudissements sur les bancs du groupe GDR, sur plusieurs bancs du groupe EcoS et sur quelques bancs des groupes LFI-NFP et SOC.) L’Assemblée pourra enfin, pour la première fois, se prononcer au sujet de cette réforme, au nom du peuple français. Nous ne doutons pas que le vote dont cette proposition de résolution fera l’objet traduira la volonté majoritaire des Français. Alors, monsieur le premier ministre, vous aurez l’occasion d’en tirer les conséquences et de réparer ainsi la fracture démocratique qui défigure notre République.
Ma question est simple : serez-vous l’homme qui aura réconcilié ou celui qui aura laissé s’enkyster cette blessure au cœur même de notre nation ? (Plusieurs députés du groupe GDR et quelques députés du groupe EcoS se lèvent et applaudissent. –⁠ Les autres députés du groupe GDR, quelques autres députés du groupe EcoS et quelques députés du groupe LFI-NFP applaudissent également.)

Mme la présidente
La parole est à M. le premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique.

M. François Bayrou, premier ministre, chargé de la planification écologique et énergétique
Je pourrais naturellement ajouter des arguments à ce que vous avez dit, parce qu’historiquement, candidat à cette élection présidentielle, j’avais défendu l’idée que le résultat d’un référendum ne pouvait être changé que par un autre référendum. Je n’ai pas été entendu à cette époque et d’autres choix ont été faits. Je n’étais pas président de la République…

M. Jean-Paul Lecoq
Là, vous êtes premier ministre !

M. François Bayrou, premier ministre
…et je vois que vous le regrettez. (Sourires.)

M. Alexis Corbière
Il y a un petit problème de lucidité !

M. François Bayrou, premier ministre
La deuxième question porte évidemment sur les retraites. Vous avez déposé un texte ; on verra ce que vote cette assemblée. Je veux vous dire une chose certaine : hier, la Cour des comptes a déclaré que les dépenses sociales étaient –⁠ je cite entre guillemets – « hors de contrôle ».
Si nous ne sommes pas capables, tous, de prendre la situation comme elle est, d’essayer de construire un projet qui puisse rassembler les sensibilités différentes autour d’une réalité qui, elle aussi, nous rassemble, alors nous allons vers de très graves déboires.
Comme vous le savez, j’ai proposé que les organisations syndicales et les représentations des entreprises se réunissent dans ce qu’on a appelé un conclave –⁠ le mot, en ce début d’année, a été à la mode. Elles sont au travail. J’ai bon espoir que le progrès qu’elles réalisent ensemble soit capable de présenter un chemin qui puisse réunir très largement les sensibilités du pays, mais je sais que, la situation étant ce qu’elle est, il n’existe aucun chemin de progrès qui ne tienne compte de la réalité et ne choisisse au travers du temps un projet pluriannuel de retour à l’équilibre des finances publiques, des finances de l’action publique et des finances sociales du pays.
Si nous nous éloignons de cette nécessité, nous allons avoir de très graves déboires et toute la société le paiera, avec toutes les entreprises, tous les salariés et toutes les familles.

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