EXPOSÉ DES MOTIFS
Mesdames, Messieurs,
Comment analyser l’enchaînement des dysfonctionnements qui ont marqué l’actualité des transports aériens, ferroviaires et routiers au cours des dernières semaines de 2010 ?
On peut comprendre que les difficultés climatiques exceptionnelles nécessitent la mise en œuvre de mesures particulières pour préserver la sécurité des passagers.
Cependant, comment un pays développé comme la France, cinquième puissance économique mondiale, a pu se retrouver ainsi paralysé, avec des dizaines de milliers de passagers dormant, à même le sol, dans des halls d’aéroports, dans des gares de la SNCF, sans oublier les milliers de véhicules – poids lourds ou voitures particulières – bloqués sur des aires d’autoroutes ou sur les chaussées elles-mêmes ?
Comment tolérer qu’un aéroport comme Roissy puisse être ainsi perturbé par une insuffisance de chasse-neige et de glycol ?
Comment accepter que des routes et des autoroutes, dans des agglomérations comme en rase campagne, soient rendues impraticables par manque de sel et de coordination des moyens humains et matériels ?
Le secteur des transports est un élément essentiel de l’aménagement du territoire. Quel que soit le statut des entreprises, il est un maillon fondamental de la sécurité de notre pays et joue un rôle essentiel dans notre économie. Ses performances et sa fiabilité sont d’ailleurs parmi les atouts mis en avant pour expliquer l’importance des investissements étrangers en France. Son rôle est donc stratégique dans le développement de nos territoires. Dès lors, des évènements comme ceux qui viennent de se dérouler et leurs conséquences humaines et économiques ne peuvent que susciter des interrogations sur les causes, sans doute multiples, qui les ont entraînées, afin de définir les dispositions permettant de les surmonter. Il y va de l’attractivité de notre pays et de sa capacité à assurer la sécurité des usagers des transports sur notre territoire.
Alors, comment ne pas noter que le secteur des transports est parmi ceux qui ont le plus subi, ces dernières années, les effets des mesures de libéralisation.
« Le mieux est l’ennemi du bien ». Si l’on en croit la SNCF, dans son rapport remis à Madame la ministre de l’écologie et des transports, c’est sa volonté de bien faire, malgré des conditions climatiques difficiles, qui serait à l’origine des difficultés subies par les voyageurs du train Strasbourg-Nice-Port Bou.
Depuis 1992, la succession des « paquets » ferroviaires a provoqué la séparation de la SNCF et de RFF, la suppression de 25 5000 emplois de cheminots depuis 2002, la réduction de la maintenance des matériels roulants et du réseau, l’organisation en branches d’activité indépendantes qui empêche la mutualisation des moyens et des personnels, ce qui fait qu’un conducteur de TER ne peut plus remplacer un conducteur de train Corail en cas de besoin. De tels éléments seraient-ils tellement étrangers aux problèmes constatés que la SNCF ne les relève même pas dans son rapport, ne serait-ce que pour s’interroger sur leurs effets et alors qu’à l’évidence, ils sont au cœur des débats dans l’entreprise et dans le pays ?
La privatisation des autoroutes, puis la décentralisation qui a éclaté le réseau routier en plusieurs gestionnaires, ont profondément modifié le paysage. Ainsi, de l’avis des responsables des collectivités territoriales, le plus grand flou existe quant aux coordinations des moyens humains et matériels à mettre en œuvre par chaque acteur.
Comment ne pas relever également les évolutions des statuts des aéroports avec la multiplication de la sous-traitance, des concessions et des délégations diverses ? Comment ignorer l’irruption d’intérêts privés dans leur capital et la concurrence entre les différents acteurs, concurrence encore exacerbée avec l’arrivée, sur le marché, des compagnies « low cost ».
Notons d’ailleurs que la Commission Européenne a rappelé aux acteurs du transport aérien leurs obligations à l’égard de leurs clients, leur a demandé des explications, les menaçant de sanctions en cas de fautes !!!
Mais la Commission européenne s’est bien gardée d’envisager l’éventualité même de conséquences aux déstructurations du secteur public et des entreprises publiques concernées et au démantèlement des fonctionnements intégrés et cohérents qu’elle a imposés au nom d’une marchandisation effrénée, d’une réduction dogmatique des dépenses publiques et d’une gestion comptable par activité spécifique, à flux tendu. Et dans ce cadre, on ne peut ignorer l’accord total de la France et les coupes sombres dans le budget des transports, ces dernières années, accentuées dans la loi de finances 2011 avec la RGPP.
Alors, il n’est pas trop tard pour rechercher les causes profondes des dysfonctionnements que notre pays a connus ces dernières semaines. Il n’est pas trop tard pour opérer une véritable mise à plat de notre système de transport, de son fonctionnement, de son organisation et de ses moyens. Il n’est pas trop tard pour mettre en place un véritable service public des transports, capable de garantir la continuité des services, la sécurité des personnes et des biens et la meilleure gestion des aléas.
Autant de raisons qui motivent la demande de création d’une commission d’enquête parlementaire.
PROPOSITION DE RÉSOLUTION
Il est créé une commission d’enquête de 30 membres chargée de rechercher les raisons profondes des dysfonctionnements qui ont gravement mis en cause la sécurité des usagers des transports aériens, ferroviaires et routiers et porté atteinte à l’organisation, à la fiabilité et à la sûreté des services sur notre territoire, durant le dernier mois de décembre 2010 et de proposer les mesures propres à les corriger.
Propositions de résolution
PR n°3082 - d’une commission d’enquête sur les causes profondes des dysfonctionnements constatés dans le secteur des transports en décembre 2010
Publié le 11 janvier 2011
André
Chassaigne
Président de groupe
Député
du
Puy-de-Dôme (5ème circonscription)
Jean-Paul
Lecoq
Député
de
Seine-Maritime (8ème circonscription)
Daniel
Paul
Député
de
Seine-Maritime (8ème circonscription)
Jacques
Desallangre
Député
de
Aisne (4ème circonscription)
Jean-Claude
Sandrier
Député
de
Cher (2ème circonscription)
Jean-Jacques
Candelier
Député
du
Nord (16ème circonscription)
Marc
Dolez
Député
du
Nord (17ème circonscription)
Marie-George
Buffet
Députée
de
Seine-Saint-Denis (4ème circonscription)
Marie-Hélène
Amiable
Députée
des
Hauts-de-Seine (11ème circonscription)
le texte de la proposition