Interventions

Motions de censure

Programmation des finances publiques 2023-2027 - Nlle lect

Moins de trois jours ! Il vous aura fallu moins de trois jours pour débuter ce qui est déjà annoncé comme une litanie de recours au 49.3 sur les textes budgétaires, textes majeurs de notre assemblée et de notre République. Il vous aura fallu moins de trois jours pour vous essuyer les pieds sur la représentation nationale. Il vous aura fallu moins de trois jours pour passer par-dessus le vote négatif, extrêmement large, de notre assemblée sur cette loi de programmation des finances publiques, il y a moins d’un an !

Ne vous en déplaise, madame la Première ministre, la brutalité dont vous faites preuve ne cachera nullement les difficultés dans lesquelles vous vous enferrez, tout simplement parce que les choix budgétaires que vous défendez ne règlent en rien les fractures qui se font jour. Nul besoin d’en dresser une liste à la Prévert ! Il suffit de s’arrêter devant ces centaines, ces milliers d’étudiants qui font la queue devant les distributions de colis par les associations caritatives pour comprendre que nous préparons mal l’avenir. Il suffit de parcourir les rues de nos grandes métropoles la nuit, d’y retrouver ces 2 000 enfants qui y dorment, pour comprendre que c’est l’essence même de notre humanité qui est discutée. Il suffit de voir ces malades entassés dans des services d’urgence, sur des brancards, dans les couloirs, pour comprendre que la casse de notre système de santé réduit les chances de vie de trop de nos concitoyens.

Oui, quels que soient les auto-satisfecit que vous professez sans cesse, l’échec de vos choix politiques est patent, visible et dangereux. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et Écolo-NUPES.) Il est dangereux, car en continuant sur cette voie, c’est notre pacte social que vous menacez. Ce pacte social est fondé sur des choix collectifs forts : la sécurité sociale, les services publics nationaux et locaux, les investissements publics, la maîtrise de grands secteurs essentiels au développement du pays, particulièrement pour réussir la transition écologique.

Or votre projet de loi de programmation des finances publiques, qui acte une baisse en valeur de l’intervention publique, qui exige un redressement des finances publiques en excluant toute possibilité de modification de l’architecture fiscale au nom d’un principe dont l’inefficience le dispute à la stupidité, porte en lui les ingrédients de la France qui gronde. Rien ne peut justifier ce coup de force, pas même un chantage indécent dû à votre incapacité à porter la parole de la France devant l’Europe.

Vous nous dites sans cesse : « Moins d’impôts. » Nous vous répondons : « De meilleurs impôts pour de meilleurs services publics. » (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et Écolo-NUPES.) Ce qui se joue, c’est le consentement à l’impôt, avec un nouveau pacte fiscal qui porte la belle valeur d’égalité et donc la pérennité de notre pacte social. Remettre de la progressivité dans les prélèvements obligatoires, reprendre la main sur la réelle accumulation des richesses et des patrimoines pour redonner du souffle aux services publics, briser la folie financière qui accapare le fruit des efforts de tous avec des records de versement de dividendes ou de rachat d’actions en 2022, records qui seront battus en 2023 : voilà quels devraient être vos objectifs, voilà ce qui pourrait être débattu en séance et défendu par une majorité, de même que certaines dispositions et recommandations proposées dans le rapport que nous avons remis, Jean-Paul Mattei et moi, relatif à la fiscalité du patrimoine.

Mais du débat, du respect de la représentation nationale, vous n’en avez cure. L’article 16 du projet de loi de programmation des finances publiques, consacré aux collectivités territoriales, est, à ce titre, plus qu’éclairant : refusé en commission des finances en 2022, supprimé en séance en octobre dernier, au cœur du refus de la commission mixte paritaire, il a encore fait l’objet d’un vote négatif, lundi dernier, en commission.

On pouvait penser, en toute naïveté, que le Gouvernement profiterait de ces longs mois pour trouver un chemin acceptable. Que nenni ! Rien, vous ne lâchez rien dans votre volonté de corseter les collectivités locales – comme l’assurance maladie. Ainsi s’exprime la réalité de votre méthode, et ce ne sont pas les monologues de Bercy ni les rencontres bilatérales qui y changent quoi que ce soit. Sur ce texte qui aurait pu être discuté jusqu’au bout, le choix du passage en force est le symbole de votre enfermement.

Engoncés dans vos certitudes, vous avez choisi d’affaiblir le Parlement, vous avez choisi, tout simplement, d’ignorer le vote des Français.

Le profond irrespect dont vous faites preuve ne s’adresse pas seulement à nous, députés de l’opposition, mais à toutes celles et tous ceux que nous représentons, dans notre diversité, sur le territoire national, dans l’Hexagone comme en outre-mer. Comment ne pas s’étonner, voire éprouver de la sidération en voyant nos collègues de la minorité présidentielle se lever et applaudir à tout rompre le recours au 49.3, une procédure qui nous enlève la prérogative essentielle du droit de légiférer ? Cela prêterait à sourire si ce n’était si grave. Le message envoyé à nos concitoyens par ces 49.3 à répétition est celui d’un pouvoir qui se recroqueville, qui n’a pas confiance en ses institutions les plus démocratiques, qui n’a pas confiance en son peuple.

La souveraineté populaire est consubstantielle au respect de l’Assemblée nationale.

Madame la Première ministre, cessez de brutaliser le Parlement ! Acceptez enfin qu’une assemblée sans majorité absolue est une assemblée qui ne souffre pas d’illégitimité. Ne donnez pas d’armes aux ennemis de la démocratie. Les députés du groupe Gauche démocrate et républicaine-NUPES, associés à cette motion de censure, vous demandent, avec gravité, de changer de méthode, de cesser de vous essuyer les pieds sur la représentation nationale, de respecter la France, la République et la démocratie. Le reste est irresponsable. (Applaudissements sur les bancs des groupes GDR-NUPES et LFI-NUPES ainsi que sur les bancs des groupes SOC et Écolo-NUPES, dont plusieurs députés se lèvent.)

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Nicolas
Sansu

Député de Cher (2ème circonscription)

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