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PLF 2013 (séance publique) : Anciens combattants, mémoire et liens avec la nation

M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Candelier.
M. Jean-Jacques Candelier. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la présidente de la commission de la défense, mes chers collègues, la moyenne d’âge des anciens combattants dépasse aujourd’hui les 75 ans, tandis qu’on comptabilise plus de trois millions d’ayants droit.
Pour le projet de loi de finances 2013, le Gouvernement se contente simplement de maintenir les droits en faveur du monde combattant : le budget consacré à la réparation ne contient strictement aucune mesure nouvelle.
M. Jean-Luc Reitzer. Eh oui, c’est bien triste !
M. Jean-Jacques Candelier. Seule la hausse de la retraite du combattant, décidée sous la législature précédente, en année électorale, est financée.
M. Jean-Luc Reitzer. Elle l’est, c’est l’essentiel !
M. Philippe Vitel. Eh oui, c’est déjà ça !
M. Jean-Jacques Candelier. Par ailleurs, l’abondement de 500 000 euros au budget social de l’Office national des anciens combattants et victimes de guerre serait insuffisant, d’après des représentants du conseil d’administration, pour permettre le financement en 2013 de l’allocation différentielle aux veuves, d’un montant de 900 euros.
Le programme phare de la mission, « Reconnaissance et réparation en faveur du monde combattant », est en baisse de 75 millions d’euros par rapport à l’année dernière, une baisse qui fait suite aux 447 millions d’euros en moins sous la législature précédente. La disparition naturelle des pensionnés et retraités aurait dû diminuer mécaniquement le budget de 4,4 %. Mais en combinant l’inflation à la baisse nominale du budget de 2,4 %, on en arrive aux 4,4 % de baisse !
Combien d’années va-t-on encore attendre pour répondre aux légitimes revendications des anciens combattants ? Va-t-on accepter qu’avec un tel budget, l’État soit un grand pourvoyeur de pauvreté ? À budget constant, étant donné la disparition progressive des bénéficiaires des pensions militaires d’invalidité et de la retraite du combattant, à raison d’environ 60 000 personnes par an, on pourrait rapidement donner satisfaction sur de nombreux points.
Par exemple, l’allocation différentielle de solidarité, créée à l’unanimité par la représentation nationale pour les veuves d’anciens combattants les plus démunies, a vu son fonctionnement amélioré et son plafond relevé. Il est difficilement acceptable que cette allocation soit plafonnée à un niveau inférieur au seuil de pauvreté.
M. Julien Aubert. Très bien !
M. Jean-Jacques Candelier. Pour les bénéficiaires de cette aide, nous demandons que le plafond soit porté à 964 euros. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Par ailleurs, la pauvreté ne frappe pas les seuls conjoints survivants : de nombreux anciens combattants sont concernés. Nous souhaitons qu’ils puissent bénéficier, eux aussi, d’une telle allocation différentielle, qui leur permettrait de vivre dignement, alors qu’ils ont dignement servi la France.
Je rappelle aussi que la valeur du point de pension militaire d’invalidité, qui détermine les PMI, les retraites du combattant et le plafond des rentes mutualistes, accuse un retard de près de 43 %, et que le plafond majorable des rentes mutualistes stagne à 125 depuis 2007.
Autre dispositif de reconnaissance que nous devons améliorer : l’attribution de la campagne double aux anciens d’Afrique du Nord. Sur ce point, le Conseil d’État a tranché en condamnant l’État à rétablir l’égalité rompue. Face à cette décision, un décret inacceptable a limité l’application de la campagne double sous de fallacieux prétextes. Monsieur le ministre, allez-vous abroger le décret inique du 29 juillet 2010 et octroyer enfin la campagne double à tous les anciens d’Afrique du Nord ? Les députés communistes et du Front de gauche ont pris leurs responsabilités en déposant une proposition de loi relative à cette question.
Toujours en ce qui concerne le conflit en Afrique du Nord, le Gouvernement précédent s’était engagé à élargir les conditions d’attribution de la carte du combattant, en prévoyant de l’octroyer dès lors que les combattants totalisaient 120 jours de présence avec une arrivée sur le sol algérien avant le 2 juillet 1962. Aujourd’hui, il faut trancher.
Il y aurait encore tant à dire sur les pupilles, les orphelins de guerre que l’on fait lanterner scandaleusement, les pensions des conjoints survivants des grands invalides de guerre, ou encore l’indemnisation des victimes des essais nucléaires, qui est un véritable scandale. Sur ce dernier point, la provision de dix millions d’euros risque de ne pas être utilisée en l’état du dispositif d’indemnisation. Alors que plus de 700 dossiers ont été reçus, seulement sept d’entre eux ont fait l’objet d’une réponse positive, pour un montant total de 290 000 euros. Monsieur le ministre, comptez-vous améliorer le dispositif d’indemnisation, en inversant la charge de la preuve dans l’établissement du lien de causalité entre la pathologie des personnes et leur exposition à la radioactivité ?
Je veux encore dire un mot sur la politique de mémoire. Le Gouvernement, qui se targue de vouloir tourner le dos à la RGPP, est-il prêt à revenir sur la suppression des délégués à la mémoire combattante dans les offices départementaux, décidée par le gouvernement de droite qui l’a précédé ? Il faut des moyens pour exposer les causes des conflits aux populations, aux jeunes générations, dans le but de leur permettre d’agir pour empêcher les drames, les injustices, les massacres, les exactions, les crimes de guerre et toutes les atteintes à la dignité humaine.
Je terminerai sur quelque chose qui ne coûte strictement rien. À l’approche des commémorations du centenaire de la guerre de 1914-1918, il faudrait réhabiliter tous les fusillés pour l’exemple de la Première Guerre mondiale. Là encore, nous avons déposé une proposition de loi. Le Gouvernement est-il prêt à faire ce geste d’apaisement de la mémoire nationale ?
Pour les raisons que j’ai évoquées précédemment, les députés du Front de gauche émettront évidemment un avis négatif sur la mission « Anciens combattants, mémoire et liens avec la Nation » du PLF 2013, dotée de crédits décevants. (« Très bien ! » sur les bancs du groupe UMP.)
Cela étant, vous n’avez pas fait mieux, chers collègues de droite !

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Jean-Jacques
Candelier

Député du Nord (16ème circonscription)

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